NarrĂȘtons pas de chercher Ă  avoir des activitĂ©s qui nous plaisent Mettons de la couleur dans notre grisaille Sourions aux petites choses de la vie qui mettent du baume dans nos cƓurs. Et malgrĂ© tout, il nous faut continuer de profiter avec sĂ©rĂ©nitĂ© de ce temps qui nous reste. Essayons d'Ă©liminer les "aprĂšs" ♄ Je le fais aprĂšs

barbara jacques prĂ©vert analyse 18 janvier 2021 0 0 2 Answers. La colombe poignardĂ©e et le jet d’eau, Apollinaire, Ce cƓur qui haĂŻssait la guerre, Robert Desnos, La technique INCONTOURNABLE pour faire dĂ©coller tes notes en commentaire. Introduction Jacques PrĂ©vert est nĂ© le 4 fĂ©vrier 1900 et est mort le 
 MERCI d’avance si vous pouvez m’éclairer car lĂ  je cale !! Dans Barbara » Jacques PrĂ©vert dĂ©nonce l’horreur de la guerre, en faisant rĂ©fĂ©rence aux bombardements de la ville de Brest entre 1940 et 1944. Barbara - Jacques PrĂ©vert analyse 307 mots 2 pages Jacques PrĂ©vert est un poĂšte du XXe siĂšcle et ce texte intitulĂ© "Barbara" est extrait de son premier succĂšs, le recueil de poĂšmes Paroles paru en 1946. His best-regarded films formed part of the poetic realist movement, and include Les Enfants du 
 merci d’avance!! ♩ La colombe poignardĂ©e et le jet d’eau, Apollinaire commentaire Bonne approche votre. Il a eu beaucoup de mal Ă  se faire reconnaĂźtre des critiques car on lui reprochait sa poĂ©sie trop simple Le poĂšte créé Ă  travers des effets de contraste et de rupture un choc entre la douceur du souvenir des deux amoureux et l’intervention brutale et violente de la guerre, qui menace le bonheur du couple. The author used lexical repetitions to emphasize a significant image; toi, je, sur, de are repeated. PrĂ©vert exprime sa sympathie pour les amoureux en gĂ©nĂ©ral Je dis tu Ă  tous ceux qui s’aiment / MĂȘme si je ne les connais pas » v. 27-28. Il souhaite avec ce recueil, dont le titre est significatif de son ambition poĂ©tique puisque Paroles est l’anagramme de la prose, s’affranchir de toutes les rĂšgles traditionnelles pour crĂ©er une poĂ©sie proche de la langue orale et marquĂ©e par le goĂ»t de l’anaphore et
 Mis Ă  jour 14/03/2020. Annonce des axes. Ceux qui nous encadrent au ministĂšre de l’éducation nationale ne font Ă  cotĂ©e de ce que vous faites. Tips for literary analysis essay about - Barbara - by Jacques Prevert. Le poĂšme porte le nom d’une femme Barbara. VĂ©rifie notamment l'orthographe, la syntaxe, les accents, la ponctuation, les majuscules ! On note d’ailleurs la prĂ©sence du champ lexical de la disparition disparu » v. 44, plus » et 50, disparaissent » v. 54, au loin » v. 56-57. Peut on citer, le mouvement littĂ©raire de l’absurde dĂšs que la guerre figure dans le texte ? Barbara, Jacques PrĂ©vert. Si vous continuez Ă  utiliser ce site, nous supposerons que vous en ĂȘtes satisfait. AmĂ©lie Vioux, professeur particulier de français, je vous aide Ă  booster vos notes au bac de français. Le rĂŽle du poĂšte est avant tout de cĂ©lĂ©brer et de chanter la vie et l’amour. - Barbara - Poem by Jacques Barbara Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-lĂ  Et tu marchais souriante Remember Barbara It was raining ceaselessly on Brest that day And you were walking smiling Beaming delighted dripping Under the rain Remember Barbara It was raining ceaselessly on Brest And I passed you in the rue de Siam You were smiling And me I was smiling the same smile Remember Barbara You who I didn't
 Au vers 46, le poĂšme bascule dĂ©finitivement dans le prĂ©sent Il pleut sans cesse sur Brest ». La pluie semble ainsi associĂ©e au personnage de Barbara d’abord heureuse comme la jeune femme, elle finit par partager le deuil hypothĂ©tique de son amant Est-il mort disparu », v. 44. Tu ne dois pas chercher Ă  rĂ©pondre Ă  la question de ton professeur en seulement deux mots. MĂȘme si les soldats sont implicitement comparĂ©s aux chiens et aux nuages, le poĂšte suggĂšre que lhumanitĂ© a disparu avec l’apparition de la guerre. Barbara » de Jacques PrĂ©vert est un poĂšme dĂ©stabilisant et pessimiste qui dĂ©nonce l’horreur de la guerre. Ces anaphores expriment une douleur lancinante et donnent au poĂšme un fort pouvoir persuasif. Ce poĂšme traite du sujet de la guerre, dans lequel PrĂ©vert dĂ©crit une scĂšne une femme qui s'appelle Barbara, Ă  Brest. Jacques PrĂ©vert . ici PrĂ©vert, Ă  quel mouvement appartient il ? Tous les auteurs ne se rattachent pas Ă  un mouvement littĂ©raire. On pourrait croire que la rencontre a lieu entre le poĂšte et Barbara, puisqu’il s’adresse directement Ă  elle tout au long du poĂšme Ă  travers une apostrophe familiĂšre Ă  la deuxiĂšme personne Rappelle-toi Barbara » vers 1, 11, 29. Jacques PrĂ©vert 4 February 1900 – 11 April 1977 was a French poet and screenwriter. The same words toi, rappelle, sur are repeated. AmĂ©lie, vous etes pour moi un grand soutien. Paroles. Ce poĂšme traite du sujet de la guerre, dans lequel PrĂ©vert dĂ©crit une scĂšne une femme qui s'appelle Barbara
 Brest was a beautiful city on the coast of France before WWII. Barbara PoĂšme de Jacques PrĂ©vert. Sur la copie que j’ai il n’y a qu’un blanc avant le dernier vers et de plus le poĂšme est dit libre » ! Bonjour, Pouvez vous me dire qu’est ce qui fait la force de ce poĂšme svpppp. Montre plus Jacques PrĂ©vert est un poĂšte du XXe siĂšcle et ce texte intitulĂ© "Barbara" est extrait de son premier succĂšs, le recueil de poĂšmes Paroles paru en 1946. Jacques PrĂ©vert, poĂšte, parolier, dialoguiste et scĂ©nariste français, publie, en 1946, Paroles. bonjour je suis en troisiĂšme et j’étudie ce poĂšme, notre professeur nous demande de trouver un sentiment d’espoir vers la fin de ce poĂšme, pourriez vous m’aider ? Est-ce comique, pathĂ©tique ou lyrique ? Answer Save. Ce poĂšme. On trouve aussi un champ lexical de la mort sang » v. 41, 51, mort » v. 44, deuil » crĂšvent » v. 53, pourrir » v. 56. -Jacques PrĂ©vert 1900-1977. Ma formation privĂ©e pour gagner 4 Ă  9 points au bac de français en 7 semaines, 2011-2021 - AmĂ©lie Vioux - Droits d'auteur rĂ©servĂ©s - Tous les articles sont protĂ©gĂ©s AVANT publication - Reproduction sur le WEB interdite - Mentions lĂ©gales -, Commande ton livre 2021 en cliquant ici ↓, MĂ©thode complĂšte du commentaire de A Ă  Z en vidĂ©o. Jacques PrĂ©vert Ă©voque ce souvenir avec nostalgie ce n’est plus pareil », v. 48. Rappelle-toi Barbara
 Cordialement. On retrouve cette symĂ©trie un peu plus loin, oĂč le poĂšte prĂ©cise qu’ils ne se connaissent pas Toi que je ne connaissais pas / Toi qui ne me connaissais pas » v. 12-13. Barbara By Jacques Prevert? 1 decade ago. Jacques Prevert4 February 1900 – 11 April 1977 Jacques PrĂ©vert was a French poet and screenwriter. Jacques PrĂ©vert 1900-1977 En 1946, publication de son recueil "Paroles" accueilli avec beaucoup de succĂšs. His poems became and remain very popular in the French-speaking world, particularly in schools. Tu souriais. On nous demande de mettre en relation l’oeuvre qu’on a choisie avec une autre oeuvre de n’importe quelle nature Pourriez vous me donner des conseils quant Ă  Barbara? Je voulais savoir quelle est le registre de ce poĂšme. Il ne faut donc pas chercher Ă  mettre tous les auteurs dans des cases. Barbara . Lecture expressive. Insert. ♩ La grasse matinĂ©e, PrĂ©vert commentaire It doesn't have a pessimistic view about love, but it may have a pessimistic view about human existence. Jacques PrĂ©vert avoue connaĂźtre Barbara uniquement grĂące Ă  un inconnu, un homme sous un proche » seul Ă  s abriter » de la pluie en un lieu indĂ©fini en opposition Ă  toutes les prĂ©cision spatio-temporelles du texte ce jour-lĂ  » reprĂ©sente un moment inconnu du 
 Je ne sais pas comment vous exprimer ma gratitude, ma reconnaissance pour cet effort louable. L’emploi du passĂ© composĂ© voir A indique que le souvenir est rĂ©actualisĂ© et a une rĂ©percussion sur le prĂ©sent. Parole de Jacques PrĂ©vert est un recueil de poĂšmes qui fut publiĂ© pour la premiĂšre fois en 1946. ♩ Etudiez la progression du poĂšme Lis le poĂšme plusieurs fois puis lis attentivement mon analyse. Epanouie ravie ruisselante. Neither mark predominates. pouvez vous me dire pourquoi ce poĂšme appartient au registre pathĂ©tique et non au registre tragique?? Leur rencontre s’opĂšre dans un cri d’amour Et il a criĂ© ton nom / Barbara » v. 18-19. PrĂ©vert exprime ici son dĂ©goĂ»t face Ă  l’horreur de la guerre. x x Reply. Does the poem Barbara by Jacques Prevert have a generally pessimistic view about love despite being about war? Anonymous. The poet used anaphora at the beginnings of some neighboring lines. Bonjour, bien que n’étant pas en 1Ăšre je suis en 3Ăšme, votre site m’a Ă©tĂ© trĂšs utile quant Ă  la rĂ©alisation de mon recueil de poĂ©sie. je vous remercie beaucoup pour votre rĂ©ponse et le temps que vous avez passer Ă  me rĂ©pondre, bonjour Il pleuvait sans cesse sur Brest . TĂ©moin Ă  la fois de l’amour et de la mort, PrĂ©vert exprime son dĂ©goĂ»t et son impuissance dans une forme poĂ©tique libre et sans contrainte, la poĂ©sie demeurant sa seule arme face Ă  la destruction de la ville de Brest qu’il aimait tant. Jacques PrĂ©vert – Paroles – Barbara . Plan. Pourtant, le texte bascule progressivement vers la guerre et la mort III. Au vers 38, le ton du poĂšme change soudainement. Use the criteria sheet to understand greatest poems or improve your poetry analysis essay. Merci pour ce beau paragraphe bien rĂ©digĂ©s cela m’as beaucoup aider , Bonjour, trĂšs jolie poĂšme, La photographie en dĂ©but de lecture analytique, qui l’a faite ? Je suis professeur particulier spĂ©cialisĂ©e dans la prĂ©paration du bac de français 2nde et 1re. bonjour j’aimerai savoir si ce poeme est un rondeau et si s’en est pas un, de quoi s’agit il ? Sur mon site, tu trouveras des analyses, cours et conseils simples, directs, et facilement applicables pour augmenter tes notes en 2-3 semaines. ♩ Ce cƓur qui haĂŻssait la guerre, Robert Desnos commentaire merci infiniment Commentaire et texte du poĂšme Barbara, de Jacques PrĂ©vert, extrait de Paroles. Le poĂšme se termine en effet sur le mot rien » v. 58. Le souvenir Ă©voquĂ© dans Barbara » est un souvenir particulier ce jour-lĂ  » v. 2, cette pluie » v. 31 et 34, aux rĂ©fĂ©rences prĂ©cises Brest » v. 2, 7, rue de Siam » v. 8, le bateau d’Ouessant » v. 36. Bonjour, j’aimerais savoir, auriez-vous des ouvertures pour ce texte s’il vous plait ? Bonjour, j’aime beaucoup votre site donc tout d’abord un grand merciiii Le poĂšte cĂ©lĂšbre sa beautĂ©, qui passe principalement par le sourire souriante » v. 3, Tu souriais » v. 9. Barbara est un cĂ©lĂšbre poĂšme de 58 vers Ă©crit par Jacques PrĂ©vert et publiĂ© dans le recueil Paroles en 1947. ♩ Quel rĂŽle joue le souvenir dans ce texte ? Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expĂ©rience sur notre site web. Le souvenir est le prĂ©texte d’une comparaison entre avant » v. 47 et maintenant » v. 39. boujour, quel est l’auteur de l’illustration de la dame portant un parapluie ? ♩ Analyser les effets de contraste et de symĂ©trie dans ce poĂšme Merci d’avance ♩ En quoi ce poĂšme est-il une dĂ©nonciation de la guerre ? Rappelle-toi Barbara Bonjour, Merci pour tout ce que vous faite ! Merci de laisser un commentaire ! quand un auteur est du XXe ou du XXIe, que mettre pour le mouvement littĂ©raire s’il n’appartient Ă  aucun citĂ© en cours ? Est-ce que vous pourriez proposer une ouverture possible pour ce poĂšme s’il vous plait. Tu Ă©tudies Barbara » de PrĂ©vert ? Jacques PrĂ©vert . The punctuation marks are various. Ma prof nous a donner le poĂšme Arbres » de mais ne nous a pas donner les idĂ©es principales du poĂšme. j’ai dĂ©jĂ  tentĂ© de poser cette question en cours mais, dĂšs que l’on pose une question, on reçoit une pluie de ricanements, je n’ose plus poser de questions Voir ici une anthologie des poĂšmes de la langue française. Le contraste avec le passĂ© est bien marquĂ© par l’inversion des temps et le parallĂ©lisme avec le dĂ©but du poĂšme Il lui donna la mĂȘme construction que celle qu’il avait projetĂ©e pour ’Une femme dans la nuit’’. En ma basant sur mes cours je ne trouve pas la solution, soit 2 strophes 25-1, soit pas de strophe ou 6 strophes 5-5-5-5-5-1 ? J’aurais aimĂ© vous Ă©crire un Ă©crire un long message pour faire part de ma profonde considĂ©ration. His poems became and remain popular in the French-speaking world, particularly in schools. Ensuite, ferme mon site internet et essaie de rĂ©diger une rĂ©ponse Ă  partir des Ă©lĂ©ments dont tu te souviens. Brest was totally destroyed by bombing raids by the end of the war. Pay attention the program cannot take into account all the numerous nuances of poetic technique while analyzing. Je dois donner le nombre de strophes et combien chacune d’elle contient de vers ? merci d’avance, Bonjour je voudrais savoir se que tu pourrais me dire par rapport a la dualiter entre le rĂ©el et l’irĂ©el de se poeme merci. During WWII it was occupied by the allies, then the Germans. Some of the movies he wrote are extremely well regarded, with Les Enfants du Paradis considered one of the greatest films of all time. CLIQUE ICI et deviens membre de ! Il n’est plus question d’humains dans les derniers vers, mais uniquement de chiens qui disparaissent » ps C’est toujours une joie de retrouver un texte qu’on Ă©tudie sur votre site. Enfin, l’anadiplose reprise au dĂ©but d’une proposition de termes de la proposition prĂ©cĂ©dente aux vers 53-54 
comme des chiens / Des chiens qui disparaissent » et aux vers 57-58 
au loin / Au loin trĂšs loin de Brest » produit un effet d’écho qui marque l’idĂ©e d’une rĂ©sonance liĂ©e au vide. Jacques PrĂ©vert French [ʒak pʁevɛʁ]; 4 February 1900 – 11 April 1977 was a French poet and poems became and remain popular in the French-speaking world, particularly in schools. If you write a school or university poetry essay, you should Include in your explanation of the poem Good luck in your poetry interpretation practice! MalgrĂ© le tutoiement, le poĂšte se place en observateur externe et garde une distance physique avec le couple d’amoureux. Le titre de son Ɠuvre n’est pas choisi au
 Bonjour je n’ai pas trĂšs bien compris ce que signifie l’hymne Ă  la beautĂ© fĂ©minine ». ProblĂ©matique. Pouvez-vous m’aider s’il vous plaĂźt ? I. Le poĂšme, dans un style presque incantatoire, insiste sur la nĂ©cessitĂ© de ne pas oublier le passĂ© Rappelle-toi », N’oublie pas ». Étude du poĂšme Barbara de Jacques PrĂ©vert. Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-lĂ . Je crĂ©e des formations en ligne sur depuis 9 ans. J’analyse tout cela dans mon commentaire – je ne vais quand mĂȘme pas non plus rĂ©diger ton paragraphe de rĂ©ponse ! Je vous remercie beaucoup pour votre rĂ©ponse et pour votre site qui me sera sĂ»rement trĂšs utile plus tard. Et tu marchais souriante. Merci , Ce poĂšme est un chasse croisĂ© entre le lyrisme et le pathĂ©tique. Pourrirez-Vous m’aidez ? merci. ♩ Strophes pour se souvenir, Aragon faire le lien entre ce poĂšme et celui de PrĂ©vert est intĂ©ressant. Tu accĂ©deras gratuitement Ă  tout le contenu du site et Ă  mes meilleures astuces en vidĂ©o. Lisez ce LittĂ©rature Commentaire de texte et plus de 247 000 autres dissertation. Les poĂšmes qui se trouvent dans ce recueil ont Ă©tĂ© en premier lieu publiĂ©s sĂ©parĂ©ment les uns des autres, dans diffĂ©rentes revues comme Le Commerce ou les Cahiers d’Art durant les annĂ©es 1930. Le souvenir est dĂ©crit Ă  l’imparfait Il pleuvait » v. 2 et 7, s’abritait » v. 17 et au passĂ© composĂ© je t’ai croisĂ©e » v. 8, il a criĂ© » v. 18, tu as couru » v. 20. Sous la pluie. Jacques PrĂ©vert adapta, profondĂ©ment semble-t-il, un scĂ©nario original d’AndrĂ© Cayatte, pour redire Ă  quel point il Ă©tait persuadĂ© que l’amour doit se vivre mĂȘme sous la menace et dans l’imminence de la mort. Jacques PrĂ©vert, poĂšte, parolier, dialoguiste et scĂ©nariste français, publie, en 1946, Paroles. Relevance. Barbara retrouve en fait son amant. Cela ma bien aidĂ©e, Bonjour, je suis actuellement en 1Ăšre S. Évoquez un mouvement littĂ©raire uniquement lorsque vous ĂȘtes sĂ»rs de vous Ă  100%. Tu peux Ă©galement retrouver mes conseils dans mon livre RĂ©ussis ton bac de français 2021 aux Ă©ditions Hachette. "Barbara" de Jacques PrĂ©vert Analyse Jacques PrĂ©vert - 4 fĂ©vrier 1900 - PoĂšte et scĂ©nariste français Contexte historique - 11 avril 1977 - Le plus grand poĂšte du XXe siĂšcle Nous verrons dans ce commentaire que le poĂšme se prĂ©sente d’abord comme un poĂšme d’amour I Ă  travers l’évocation d’un souvenir heureux II. Barbara Jacques PrĂ©vert Barbara Rappelle-toi Barbara Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-lĂ  Et tu marchais souriante Épanouie ravie ruisselante Sous la pluie Rappelle-toi Barbara Il pleuvait sans cesse sur Brest Et je t'ai croisĂ©e rue de Siam Tu souriais Et moi je souriais de mĂȘme Rappelle-toi Barbara Toi que je ne connaissais pas La mĂ©taphore de lorage au vers 50 pour reprĂ©senter les bombardements destructeurs Ce n’est mĂȘme plus l’orage / De fer d’acier de sang » laisse place Ă  un paysage ravagĂ© tout est abĂźmĂ© » v. 48. Merci d’avance. Cet anĂ©antissement se traduit Ă©galement par une dĂ©shumanisation progressive. PS votre site est super ! La mĂ©taphore de la pluie prĂ©sente dĂšs les premiers vers subit une mĂ©tamorphose progressive. Rappelle-toi Barbara / Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-lĂ  / Et tu marchais souriante / Epanouie ravie ruisselante / Sous la pluie / Rappelle-toi Barbara / Il pleuvait sans PrĂ©vert. merci AmĂ©lie de tout cƓur. Rappelle-toi Barbara . Il nous fait part de l'attachement qu'avait son auteur pour la ville de Brest ainsi que de sa tristesse Ă  la suite de sa destruction par les bombardements alliĂ©s lors de la Seconde Guerre mondiale . Le poĂšte partage ici avec les amoureux un souvenir prĂ©cieux. Bonjours, merci beaucoup pour vos explications
.. Barbara, Jacques PrĂ©vert, Paroles analyse pour l’oral du bac Et moi je souriais de mĂȘme. A ce sourire est associĂ© un sentiment de ravissement Épanouie » et ravie » v. 4 et v. 21. Le poĂšte n’est donc que le tĂ©moin de cette scĂšne de retrouvailles. Bonjour, Pourquoi on peux faire un lien entre Barbara et Strophe pour se souvenir je ne comprend pas ? 
 Commentaire composĂ© sur Barbara de Jacques PrĂ©vert. Cette analyse sur Barbara de Jacques PrĂ©vert a Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e par un professeur de français. Pouvez vous me dire quel est l’engagement du poĂšme svp ? Mercii "Barbara" de Jacques PrĂ©vert L'auteur et son contexte historique SĂ©duit par la rĂ©volution surrĂ©aliste Conclusion AprĂšs 1935, il rĂ©dige des scĂ©narios de films exemple Lisez ce LittĂ©rature Commentaire de texte et plus de 247 000 autres dissertation. Jacques PrĂ©vert, Paroles . il m’a beaucoup aidĂ©, particuliĂšrement pour les textes de Candide. Il pleut sans cesse sur Brest » // Il pleuvait sans cesse sur Brest » v. 2 et 7, Comme il pleuvait avant » v. 47. Outils d’analyse. cordialement enseignat du FLE au MAROC, Pourquoi peut-on Ă©tablir une analogie entre ce poĂšme et celui de Louis Aragon, strophes pour se souvenir? Cliquez ici pour lire le poĂšme Barbara ». Toggle Navigation. Merci . Cet hymne Ă  la beautĂ© fĂ©minine se caractĂ©rise enfin Ă  travers le contraste entre le paysage pluvieux de Bretagne et la beautĂ© radieuse de la femme, qui illumine ce dĂ©cor. Pour des raisons pĂ©dagogiques et pour m'aider Ă  mieux comprendre ton message, il est important de soigner la rĂ©daction de ton commentaire. Le poĂšte Ă©voque leur rencontre au vers 8 Et je t’ai croisĂ©e rue de Siam », puis l’échange d’un sourire Tu souriais / Et moi je souriais de mĂȘme » v. 9-10. Ce qui fait la force de ce poĂšme, c’est l’ensemble des Ă©lĂ©ments que j’analyse dans mon commentaire ! Je ne comprrend pas ce poĂšme, J’aimerais connaitre le nom de l’artiste qui a rĂ©alisĂ© l’oeuvre de la femme sous un parapluie? Le port de Brest, Antoine Morel-Fatio, 1854. Merci, Bonjour, que pourriez vous proposer en guise d’ouverture pour ce commentaire composĂ© ? Il souhaite avec ce recueil s’affranchir de toutes les rĂšgles poĂ©tiques traditionnelles pour crĂ©er des poĂšmes en vers libre, proches de la langue orale et marquĂ©s par le goĂ»t de l’anaphore et de l’énumĂ©ration. Le champ lexical du bonheur indique qu’il s’agit d’un souvenir heureux souriante » v. 3, souriais » v. 9-10, ravie » et Ă©panouie » v. 4 et 21, heureuse » v. 31 et 33, heureux » Comment trouver un plan de dissertation ? On passe d’une pluie sage et heureuse » v. 31 Ă  une pluie de fer / De feu d’acier de sang » et enfin une pluie de deuil terrible et dĂ©solĂ©e » v. 49. Home; Top poets; All poets; Topics; Articles; Analyze a poem online - Barbara - by Jacques Prevert poem analysis. This is an analysis of the poem - Barbara - that begins with The information we provided is prepared by means of a special computer program. Pour ĂȘtre parfaitement prĂȘt pour l'oral du bac de français. De plus, les phrases prennent une tournure impersonnelle Il pleut » v. 46, ce n’est plus pareil » v. 48, Cest », Ce n’est mĂȘme plus » v. 49-50, dont il ne reste » v. 58. AmĂ©lie. We make no warranties of any kind, express or implied, about the completeness, accuracy, reliability and suitability with respect to the information. Les commentaires qui ne sont pas soignĂ©s ne sont pas publiĂ©s. Dans la comparaison entre les nuages et les chiens, les hommes sont dĂ©jĂ  effacĂ©s des nuages / Qui crĂšvent comme des chiens » v. 52-53. Only three buildings were left standing. L’expression tout simplement » v. 52, rĂ©ductrice, souligne ce processus de nĂ©antisation. Merci d’avance. There is a poetic device epiphora at the end of some neighboring lines pas is repeated. Kadiri Abderrahim,FĂšs,Royaume du Maroc. Je dois analyser le poĂšme Le chat et l’oiseau » de Jacques PrĂ©vert . Jacques PrĂ©vert est nĂ© le et est mort le Le champ lexical du souvenir et de la mĂ©moire est prĂ©sent Rappelle-toi » v. 1, 6, 11, etc. Les anaphores reprise des mĂȘmes termes traduisent l’insistance du poĂšte Rappelle-toi Barbara » vers 1, 6, 11, 23, 29, Rappelle-toi » v. 14 et 15, Sur » vers 32, 33, 35, 36, Et » vers 3, 8, 10, 18, 20, 22, 24, MĂȘme si » v. 26 et 28, Cette pluie » v. 31 et 33. Voici une analyse du poĂšme Barbara » issu du recueil Paroles 1946 de Jacques PrĂ©vert. Rappelle-toi Barbara Et je t’ai croisĂ©e rue de Siam . When the allies were forced to abandon it in 1940 to the Germans, they blew up bridges and other facilities which could have been used by the Germans. Favourite answer. J’ai peut-ĂȘtre ratĂ© quelque chose mais j’ai une question peut-on dire que ’’ Barbara’’ est un poĂšme engagĂ© ? Rappelle-toi Barbara. Tu passes le bac de français ? Introduction. C’est une des conditions pour qu’il fasse parti de mon recueil et j’aimerais bien le prendre. La familiaritĂ© et la sympathie laissent place Ă  la vulgaritĂ© et Ă  la violence d’un langage antipoĂ©tique qui rompt avec le lyrisme Quelle connerie ». On note dans Barbara » une gradation descendante vers l’anĂ©antissement absolu. La beautĂ© de Barbara se caractĂ©rise aussi Ă  travers sa gestuelle, marquĂ©e par une gradation Et tu marchais » v. 3, Et tu as couru » v. 20, Et tu t’es jetĂ©e dans ses bras » v. 22. P-S votre site est un miracle ❀. , N’oublie pas » v. 16 et 30, avant » v. 47. par Jacques PrĂ©vert 243 Lectures 1 Points 0 AVIS, ... Partagez votre avis, critique ou analyse ! Bonjour, je suis en classe de troisiĂšme et je passe donc l’épreuve d’histoire des arts cette annĂ©e. La guerre est directement nommĂ©e au vers 38 et se manifeste Ă  travers un champ lexical l’arsenal » v. 35, fer » v. 40 et 51, feu », v. 41, acier » v. 41 et 51. Barbara - Jacques PrĂ©vert analyse 307 mots 2 pages. The Breton city of Brest, France, where the poet saw Barbara, was the main German submarine base for the Atlantic during World War II. Jacques PrĂ©vert rĂ©cite ''Barbara''Extrait ''Le poĂšte dĂ©nudĂ©'' 2004 Paroles 1946 de Jacques PrĂ©vert analyse du tableau de Picasso “Nature morte Ă  la pomme” ... Barbara » de Jacques PrĂ©vert, Paroles 1946. Cette violence transparaĂźt Ă©galement dans les sonoritĂ©s L’allitĂ©ration en d » et en t » des vers 39 Ă  58 marque l’agressivitĂ© du poĂšte, et une forte allitĂ©ration en r » dans les quatre derniers vers du poĂšme dĂ©nonce la violence de la guerre sur Brest », pourrir », reste », rien ». Regarde aussi ♩ Barbara, PrĂ©vert analyse le commentaire rĂ©digĂ© avec problĂ©matiques possibles Ă  l’oral ♩ Strophes pour se souvenir analyse ♩ Cours sur l’objet d’étude poĂ©sie ♩ Les fonctions du poĂšte vidĂ©o Est ce que cela reviens Ă  dire Ce poĂšme Ă  la beautĂ© fĂ©minine » ? Théùtre De Poche SĂšte Programme 2019, Anthony Joshua Fils, Www Guisimmobilier Fr, C'est Ă  Vous 2019, Ninive Dans La Bible, Formulaire ImpĂŽt FĂ©dĂ©ral 2019, Je Suis DĂ©solĂ© Pour Toi DĂ©finition, Majorette Renault 5 N°257, Protocole D'une Dilution, Juin 1984 Calendrier,

ï»żĂ‰critentre 1930 et 1944, Paroles figure parmi la poĂ©sie la plus lue de son temps et constitue une Ɠuvre marquante pour PrĂ©vert. Sans ponctuation ni style proprement dĂ©fini, le recueil de textes reste nĂ©anmoins publiĂ© sous la forme d'un corpus qui regroupe des textes courts de quelques lignes voire d'une ligne unique, et des textes plus Oh, je voudrais tant que tu te souviennes,Des jours heureux quand nous Ă©tions amis,Dans ce temps lĂ , la vie Ă©tait plus belle,Et le soleil plus brĂ»lant qu'aujourd' feuilles mortes se ramassent Ă  la pelle,Tu vois je n'ai pas feuilles mortes se ramassent Ă  la pelle,Les souvenirs et les regrets aussi,Et le vent du nord les emporte,Dans la nuit froide de l' vois, je n'ai pas oubliĂ©,La chanson que tu me une chanson, qui nous ressemble,Toi qui m'aimais, moi qui t' vivions, tous les deux ensemble,Toi qui m'aimais, moi qui t' la vie sĂ©pare ceux qui s'aiment,Tout doucement, sans faire de la mer efface sur le sable,Les pas des amants vivions, tous les deux ensemble,Toi qui m'aimais, moi qui t' la vie sĂ©pare ceux qui s'aiment,Tout doucement, sans faire de la mer efface sur le sableLes pas des amants dĂ©sunis...How to Format LyricsType out all lyrics, even repeating song parts like the chorusLyrics should be broken down into individual linesUse section headers above different song parts like [Verse], [Chorus], italics lyric and bold lyric to distinguish between different vocalists in the same song partIf you don’t understand a lyric, use [?]To learn more, check out our transcription guide or visit our transcribers forum

JacquesSternberg 1 Le temps du Christ est le temps oĂč nous sommes. Il nous demande encore d'inventer l'homme. Roger Bodart 3 On croit user le temps,

On croit que c’est facile de ne rien faire du tout au fond c’est difficile c’est difficile comme tout il faut passer le temps c’est tout un travail il faut passer le temps c’est un travail de titan Ah! du matin au soir je ne faisais rien rien ah ! quelle drĂŽle de chose du matin au soir du soir au matin je faisais la mĂȘme chose rien! je ne faisais rien j’avais les moyens ah ! quelle triste histoire j’aurais pu tout avoir oui ce que j’aurais voulu si je l’avais voulu je l’aurais eu mais je n’avais envie de rien rien Un jour pourtant je vis un chien ce chien qui me plut je l’eus c’était un grand chien un chien de berger mais la pauvre bĂȘte comme elle s’ennuyait s’ennuyait d’ son maĂźtre un vieil Ecossais j’ai achetĂ© son maĂźtre j’avais les moyens ah! quel drĂŽle d’écho oh! quel drĂŽle d’Écossais c’était que le berger de mon chien toute la journĂ©e il pleurait toute la nuit il sanglotait ah! c’était tout Ă  fait insensĂ© l’Ecossais dĂ©pĂ©rissait il ne voulait rien entendre il parlait mĂȘme de se pendre J’aime mieux mes moutons chantait-il en Ă©cossais et le chien aboyait en l’entendant chanter j’avais les moyens j’achetai les moutons je les mis dans mon salon alors ils broutĂšrent mes tapis et puis ils crevĂšrent d’ennui et dans la tombe l’Écossais les suivit ah! et le chien aussi C’est alors que je partis en croisiĂšre Pour-me-calmer-me8-petits-nerfs. Voter pour ce poĂšme!
PoĂšmede Jacques PrĂ©vert Ă©voquant le temps qui passe. La succession des moments de la journĂ©e reste une notion difficile Ă  apprĂ©hender. Voir cette Épingle et d'autres images dans Astuces pour la classe par Marie-Laure Gault. Le Temps Qui Passe Difficile Reste Prevert Jacques Jacques PrĂ©vert Le Matin Ma JournĂ©e Apprentissage Nuit
Zusammenfassungen Dans une perspective nĂ©o-thomiste, Jacques Maritain considĂšre qu’un artiste est religieux non par les thĂšmes qu’il choisit ou la foi qu’il professe, mais lorsqu’il saisit les formes dans les choses et les reconstruit selon la nĂ©cessitĂ© de sa subjectivitĂ© crĂ©atrice ». C’est ainsi que Maritain a pu reconnaĂźtre en Chagall le type mĂȘme de l’artiste religieux. S’il n’a jamais essayĂ© de christianiser » le peintre, il n’en a peut-ĂȘtre pas Ă©tĂ© de mĂȘme avec RaĂŻssa Maritain, surtout lorsque Chagall, Ă  partir de 1938, peint ses grandes crucifixions. Tous deux cependant s’accordent Ă  relĂ©guer l’art sacrĂ© » contemporain, c’est-Ă -dire, selon eux, l’art prĂ©sent dans les lieux de culte, au bas d’une assez stricte hiĂ©rarchie esthĂ©tique. En cela, ils s’accordent avec le dominicain Couturier et l’équipe de la revue L’Art SacrĂ©. In a neo-thomist perspective, Jacques Maritain considers that an artist can be qualified as religious not by the themes he chooses or by the faith he professes, but when he grasps the forms of things and reconstructs them according to the demands of his “creative subjectivity”. This is how Maritain thought to have recognised in Chagall the prototype of the religious artist. If he never attempted to “christianise” the painter, the same cannot be said of RaĂŻssa Maritain, especially when Chagall began painting his great crucifixions, from 1938 onwards. Both are however agreed in relegating contemporary “sacred” art –that is, present artistic expressions found in places of cult– at the bottom of a rather strict esthetical hierarchy. On this point, they agree with the Dominican Couturier and the editorial view of the journal L’Art Index-EintrĂ€ge Seitenanfang Volltext 1 JĂ©sus le Christ dans l’Ɠuvre de Chagall, sous la direction de Pierre-Marie Beaude, UniversitĂ© de Me ... 2 105 eaux-fortes de 1931 Ă  1939, dont 39 planches reprises et achevĂ©es de 1952 Ă  1956. 3 C’est au plus tard en 1950, selon l’article publiĂ© par RaĂŻssa Maritain dans la revue L’Art SacrĂ© n ... 1Dans une thĂšse soutenue Ă  Metz en 20061, GeneviĂšve Schmitt- Rehlinger montre que Chagall a peint ou dessinĂ© plus de trois cent soixante crucifiĂ©s ou Ɠuvres comportant le motif du crucifiĂ©. Sa premiĂšre crucifixion, un dessin Ă  la plume, date de 1908 ou 1909. Si l’on tient compte des Ɠuvres oĂč il a illustrĂ© l’Ancien Testament, il peut apparaĂźtre comme l’un des principaux artistes religieux du XXe siĂšcle. Mais sa premiĂšre commande biblique est d’origine profane, elle date des annĂ©es 1930, quand il a rĂ©alisĂ© Ă  la demande d’Ambroise Vollard des gravures pour la Bible 2. Il faut attendre 1957 et la tĂ©nacitĂ© d’un franc-tireur, le dominicain Marie-Alain Couturier, pour qu’une de ses Ɠuvres entre dans une Ă©glise, prĂšs d’un demi-siĂšcle aprĂšs la premiĂšre crucifixion connue3. 4 Dans Grace, Necessity and Imagination Catholic Philosophy and the Twentieth Century Artist, confĂ© ... 2Mais Chagall a-t-il jamais Ă©tĂ© commandĂ© ? L’auteur du Message Biblique a-t-il jamais illustrĂ© la Bible ? Et son art peut-il vraiment ĂȘtre qualifiĂ© de religieux ? L’un des grands amis de Chagall, le philosophe Jacques Maritain, a proposĂ© sinon une rĂ©ponse du moins une esthĂ©tique qui permet de poser ces questions de maniĂšre Ă  obtenir une rĂ©ponse. Comme l’a montrĂ© Rowan Williams, archevĂȘque de CantorbĂ©ry et ancien professeur Ă  Oxford 4, Maritain apporte de maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale des Ă©lĂ©ments qui sont toujours utiles pour tenter de dĂ©finir ce que peut ĂȘtre un art religieux Ă  l’époque contemporaine, et y distinguer plusieurs degrĂ©s, une vĂ©ritable hiĂ©rarchie d’ordre esthĂ©tique dans ce que d’autres appellent l’art sacrĂ©. 5 . My disc of gold. Itineray to Christ, Reynal & Company, New York, p. II. 3Cette hiĂ©rarchie, Maritain l’a briĂšvement rĂ©sumĂ©e – de maniĂšre Ă  la fois trĂšs lisible et passablement Ă©nigmatique – dans l’introduction qu’il a donnĂ©e en 1961 Ă  l’autobiographie du peintre amĂ©ricain William Congdon5 There are, I see it, three degrees in religious painting the first degree I would call contemplative painting, which has a religious or God- related significance quite independently of the subject or the theme treated. The second degree I would call religious painting in the strict sense, or painting whith deals with specifically religious themes not necessarily related to any public use. The third degree I would call sacred painting, which, on the walls or in the windows of a church is put at the service of public prayer. 
 It is obvious that, from the point of view of the essentials of art and inspiration, the first degree is more important than the second, and the second more important than the third. 4La hiĂ©rarchie est claire, le sens moins quel peut ĂȘtre cet art religieux indĂ©pendant de toute thĂ©matique religieuse, ou cet art explicite- ment religieux mais absent des Ă©glises ? Enfin pourquoi Maritain place-t-il tout en bas l’art religieux de commande, disposĂ© dans les lieux de priĂšre Ă  des fins cultuelles ? I. Une grande amitiĂ© 6 Selon M. DUVAUCHEL, L’esthĂ©tique oubliĂ©e de Jacques Maritain, un chemin de poĂ©sie et de raison, Pub ... 7 Dont Stravinsky, qui reprend l’esthĂ©tique maritainienne dans sa PoĂ©tique musicale de 1945. 8 Le futur cardinal Charles Journet – Sur un chemin de croix de Marek Szwarc », Nova et Vetera 1 1 ... 5Dans l’élaboration de cette hiĂ©rarchie revue et corrigĂ©e par l’expĂ©rience, l’amitiĂ© avec William Congdon arrive en fin de course, comme rĂ©vĂ©lateur. Maritain dĂ©finit son esthĂ©tique dĂšs 1920 dans Art et scolastique, austĂšre traitĂ©6 » Ă©crit en pensant Ă  Georges Rouault. À partir des annĂ©es 1920 il polit et rabote ses idĂ©es en compagnie des intellectuels, des poĂštes, des musiciens7 et des artistes qu’il reçoit chaque dimanche Ă  Meudon. Parmi eux un Juif venu d’Europe de l’Est, habile Ă  illustrer l’Ancien et le Nouveau Testament, qui s’était installĂ© vers 1910 du cĂŽtĂ© de Vaugirard, dans ce phalanstĂšre d’artistes que l’on appelait la Ruche, oĂč il frĂ©quenta LĂ©ger, Soutine, Lipchitz, Kisling, Lichtenstein avant de retourner dans son pays ; il revint en France aprĂšs la guerre, il s’intĂ©gra au cercle de Meudon et devint un intime de Maritain. Non, il ne s’agit pas de Chagall, mais de Marek Szwarc, nĂ© en Pologne et converti au catholicisme en 1919, avant de rencontrer Maritain qui sut apprĂ©cier l’homme mais, semble-t-il, n’a pas fait grand cas d’une Ɠuvre du troisiĂšme degrĂ© », ordonnĂ©e Ă  la dĂ©coration des temples profanes pavillon de la SociĂ©tĂ© des Nations Ă  New-York comme des lieux de culte Ă©glise Saint-Jean et Ă©glise du Saint-Rosaire Ă  Toronto ou apparentĂ©s Szwarc fut chargĂ© de dĂ©corer le pavillon du Saint-SiĂšge Ă  l’exposition universelle de Paris en 1937. Que Szwarc se soit converti au catholicisme et ait Ă©tĂ© bien vu du Vatican n’influa en rien sur le jugement esthĂ©tique de Maritain, peu enthousiaste8. 9 Georges Rouault peintre et lithographe, album ornĂ© de quatre lithographies originales timbrĂ©es, sig ... 10 Archives du Cercle d’Études Jacques et RaĂŻssa Maritain de Kolbsheim [AK], 2 juin 1929. 6Avec le peintre de Vitebsk, ce fut le coup de foudre, et l’aventure. Chagall a Ă©tĂ© amenĂ© Ă  Meudon par Jules Supervielle, Paul Eluard et RenĂ© Schwob – ce qui contribue Ă  expliquer pourquoi Maritain a tou- jours considĂ©rĂ© qu’il Ă©tait d’abord un poĂšte. Dans les archives du Cercle d’Études Jacques et RaĂŻssa Maritain de Kolbsheim, le premier billet adressĂ© par Chagall Ă  son cher Maritaine » avec un e », Ă©criture phonĂ©tique chagallienne date du 28 juillet 1928. Il y dit son affection pour la maisonnette chaude » de Meudon, et tout de suite il demande des textes J’ai une idĂ©e, trop audacieuse peut-ĂȘtre, de vous proposer d’écrire quelques mots dans un des Cahiers de SĂ©lection de Belgique qu’il me consacre. Vous pourrez me dĂ©truire complĂštement, si vous voulez, mais du haut de la pensĂ©e de grand Dieu. Ça sera pour moi un doux martyre ». Il demande aussi un texte pour un livre sur le théùtre juif de Moscou qui doit rĂ©unir les diffĂ©rentes opinions aussi sur mon travail dans ce théùtre. Serais heureux si vous acceptiez ces deux collaborations. Votre prĂ©sence m’y sera chĂšre ». Maritain, qui vient de publier une Ă©tude sur Rouault9, s’exĂ©cute avec plaisir, ce qui lui vaut ce billet de Chagall J’étais touchĂ© de votre amour. Si vous me croyez sincĂšre et un peu sur le vrai chemin – vous qui cherchez ardemment la vĂ©ritĂ© – j’en suis content. Merci profondĂ©ment pour votre bon Ɠil et votre bon cƓur. À vous deux de nous deux10 ». À vous deux de nous deux, car il s’agit d’une amitiĂ© entre deux couples, Marc et Bella, Jacques et RaĂŻssa. RaĂŻssa et Bella sont issues toutes deux d’une famille juive russe de tradition hassidique. Une mĂ©moire commune fonde leur intimitĂ©, leur complicitĂ©, mĂȘme si le rapport au passĂ© n’est pas le mĂȘme chez RaĂŻssa, convertie au catholicisme, et pour laquelle le centre du monde est devenu Paris, alors que Bella se sent toujours exilĂ©e de Vitebsk. 11 Non datĂ©, mais envoyĂ© de JĂ©rusalem, donc en 1931, archives de Kolbsheim. 12 25 mai 1932, archives de Kolbsheim. Fin 1929, les Chagall ont dĂ©mĂ©nagĂ© et achetĂ© une maison prĂšs de ... 13 AK, 7Certains des billets de Chagall Ă  Maritain sont Ă©tonnants, il dĂ©crit ses amis et se dĂ©crit lui-mĂȘme comme des personnages dans une toile de Chagall Il nous semble – vous ĂȘtes suspendus sur un fil dans un autre monde. Nous sommes renversĂ©s 11 ». Ou encore quand il invite les Maritain Ă  visiter son jardin de la villa Montmorency qui nous console de toutes les misĂšres du monde. Venez donc le voir et nous dedans 12 ». Chagallienne aussi, la maniĂšre dont Marc se voit par rapport Ă  Jacques Et Ă  vous, cher Jacques, merci de vos pensĂ©es si gracieusement sĂ©vĂšres. Avec vous, on dirait, on est perchĂ© sur une Ă©chelle, en regardant patiemment et anxieusement la terre et de tout son corps se tendant vers tout 13 ». 8La guerre renforça l’intimitĂ© des deux couples. InstallĂ© Ă  New York depuis 1940, Maritain participa au sauvetage des Chagall avec ses amis du Museum of Modern Art, et en liaison avec l’Emergency Rescue Committee reprĂ©sentĂ© Ă  Marseille par Varian Fry. Les Chagall Ă©chappĂšrent de justesse Ă  la police de Vichy Marc fut pris dans une rafle et libĂ©rĂ© par une intervention personnelle de Varian Fry et purent rallier Lisbonne d’oĂč ils gagnĂšrent les États-Unis. Comme ils ne parlaient pas anglais, ils se repliĂšrent sur leurs amis qui parlaient yiddish, russe ou français, ou les trois Ă  la fois, comme RaĂŻssa. 14 AK, 9 ChĂšre RaĂŻssa », lui Ă©crit Marc le 13 novembre 1941, il nous semble revivre avec vous nos douces jeunes annĂ©es 14 ». RaĂŻssa rendit plusieurs fois visite aux exilĂ©s dans leur retraite de Cranberry Lake, dans le nord de l’État de New York. Mon cher petit Jacques », Ă©crit RaĂŻssa Ă  son mari le 23 janvier 1942, Je t’envoie un autographe de Chagall. Le texte russe signifie Mon cher ami, nous avons bu, mangĂ©, tout le temps parlĂ© de vous, regardĂ© vos photos, et de nouveau parlĂ© de vous
 Nous vous attendons. Je vous embrasse. Votre Chagall’. Nous avons passĂ© avec eux une soirĂ©e trĂšs intime, savoureuse, rĂ©confortante. Maintenant Chagall veut me prendre de face. Il est tout Ă  fait amoureux de mon col de dentelle, celui qui est sur mon ancienne photo ». Et, en marge de la lettre, dressĂ© d’un trait de plume, un autoportrait de Chagall.
 RaĂŻssa a publiĂ© Ă  New York en 1943 Chagall ou l’Orage enchantĂ©, qui comporte des reproductions. Pour la réédition, Chagall n’a pas demandĂ© de droits d’auteur mais quelques exemplaires ; il en a renvoyĂ© deux Ă  RaĂŻssa, aprĂšs en avoir enrichi les pages de garde d’un dessin Ă  la plume et d’une aquarelle. 15 Maritain est ambassadeur auprĂšs du Saint-SiĂšge de 1945 Ă  1948, Chagall ne rentre en France qu’en 19 ... 16 AK, 17 AK, 10La mort de Bella Chagall, en 1944, fut un grand navrement de cƓur, puis les choses de la vie Ă©loignĂšrent les amis15. Les relations se resserrĂšrent quand le peintre s’installa Ă  Orgeval, prĂšs de Saint- Germain-en-Laye, mais elles s’espacĂšrent Ă  nouveau quand il s’établit Ă  Vence, oĂč il ne semble pas que les Maritain se soient jamais rendus. Quelques billets tĂ©moignent cependant de la permanence de l’amitiĂ© Chaque visite de Jacques est comme un soleil qui demeure en moi, un calme, un sourire et un immense encouragement16 », ou encore Si je ne vous vois pas, je vous vois quand mĂȘme17 ». Grand artiste pudique et pĂ©tri d’incertitude, Chagall demande son avis aux Mari- tain, et pas par politesse. À propos par exemple des eaux-fortes pour les Âmes Mortes de Gogol, les Fables de La Fontaine et la Bible 11 J’aimerais bien savoir ce que vous pensez, tous les trois [Chagall inclut Vera, la petite sƓur de RaĂŻssa et le complĂ©ment obligĂ© de la trinitĂ© maritainienne] 
 Moi, je tĂąche toujours de travailler – mais je ne veux pas vous ennuyer de mes paroles. Mon plus grand dĂ©faut est peut-ĂȘtre mon Ă©ternel doute [
] ». Auquel fait Ă©cho ce billet du 15 avril 1953 Je travaille, comme toujours, c’est-Ă -dire sans savoir exactement oĂč est le commencement et oĂč est la fin, voilĂ  ! ». À propos d’un projet de chapelle prĂšs de Vence, qui a du mal Ă  aboutir, il Ă©crit En attendant, je fais seulement des esquisses et je ne sais pas du tout si je pourrai rĂ©aliser cela ; si j’aurai la force de le faire. Vous me direz que j’ai toujours des doutes quand je commence quelque chose et c’est vrai. Comme vous me connaissez un peu, je n’ai pas la clartĂ© latine et la clartĂ©, s’il y en a, s’obtient, avec moi, avec beaucoup de corrections. C’est une clartĂ© Ă  ma maniĂšre toujours. Enfin, si je fais quelque chose, on verra
 Ce dont je ne doute pas, c’est que j’aurai des critiques de tous cĂŽtĂ©s », et surtout, se plaint-il, de la part de ceux qui veulent dĂ©couvrir [
] ce qu’il y a dans mon Ăąme. [
] Il est vrai que je doute et que j’ignore moi-mĂȘme, la seule chose que je sache c’est que je suis fidĂšle Ă  quelque chose ; fidĂšle, bien sĂ»r, Ă  ma maniĂšre AK, 18 J. MARITAIN, ƒuvres complĂštes [OC], vol. X, p. 267. 19 Ibid., p. 139. 12Ces billets – ils prennent rarement la taille d’une lettre – tendent Ă  confirmer Maritain dans l’idĂ©e qui sous-tend son esthĂ©tique un grand peintre est une force qui va, il rĂ©pond par son Ɠuvre Ă  une nĂ©cessitĂ© intĂ©rieure que les marchands, les mĂ©cĂšnes, les commandes ne peuvent ni orienter ni circonscrire ; une nĂ©cessitĂ© qui dĂ©passe le vouloir propre, les intentions claires et jusqu’aux forces physiques et morales du crĂ©ateur qui, laissĂ© Ă  lui-mĂȘme, coupĂ© des sources secrĂštes de son inspiration, ne serait qu’un illustrateur aux ordres de ses commanditaires. Ce ne sont pas les marchands de tableaux ni les critiques d’art ni les collectionneurs mais les poĂštes modernes qui ont fait les peintres cĂ©lĂšbres », Ă©crit Maritain dans L’intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie 18. Le peintre n’est rien s’il n’est entrainĂ© par le pinceau et la palette, instruments dĂ©miurgiques, au-delĂ  des apparences naturelles des Choses » dans la quĂȘte dĂ©sespĂ©rĂ©e » d’une rĂ©alitĂ© plus profonde, obscurĂ©ment signifiĂ©e par les Choses 
 », mais dont lui ignore tout, et dont il doit se saisir Ă©nigmatiquement 19 ». II. Une esthĂ©tique de la forme 20 Livre issu des six leçons donnĂ©es en 1952 Ă  la National Gallery of Art de Washington et publiĂ©es en ... 13Depuis Art et scolastique 1920 jusqu’à L’Intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie 1966 20, l’esthĂ©tique de Maritain se rĂ©fĂšre Ă  une mĂ©taphysique d’inspiration thomiste il existe au cƓur de l’ĂȘtre des formes qui dĂ©terminent la matiĂšre et, ainsi, constituent et achĂšvent les choses ; elles en sont le secret ontologique ». Elles participent Ă  la fois, en une sorte d’incarnation, de la transcendance et de l’immanence toute forme est un vestige ou un rayon de l’Intelligence crĂ©atrice imprimĂ© au cƓur de l’ĂȘtre créé ». C’est pour cela qu’elle est la source de la lumiĂšre et de la splendeur qui Ă©manent des choses. La beautĂ© est le resplendissement de la forme », une fulguration d’intelligence sur une matiĂšre intelligemment disposĂ©e ». Les choses sont belles parce que les formes qui les dĂ©terminent sont intelligibles. 21 J. MARITAIN, Art et Scolastique, 1920, p. 35-42. 14 L’intelligence jouit du beau parce qu’en lui elle se retrouve et se reconnaĂźt 21 ». À partir de lĂ  il est possible de prĂ©ciser le sens de quelques mots du vocabulaire esthĂ©tique de Maritain, qu’il emploie pour parler soit de l’art en gĂ©nĂ©ral, soit de la peinture moderne, soit de Chagall en particulier. 22 Mais sans l’exclure, en l’envisageant comme une sorte d’accĂ©lĂ©rateur du processus de crĂ©ation. Dans ... 23 Art et scolastique, p. 35. Dans L’intuition crĂ©atrice dans l’art et la poĂ©sie, Maritain souligne qu ... 24 L’intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie, OC vol. X, p. 108. Chagall a Ă©tĂ© amenĂ© Ă  Meudon ... 25 OC, vol. XV, p. 19. 26 J. MARITAIN FrontiĂšres de la PoĂ©sie et autres essais, Paris 1935, repris dans OC, vol. V, p. 699-70 ... 27 L’intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie, OC, vol. X, p. 140. 28 Je pense que Chagall est aujourd’hui le grand maĂźtre de l’image illuminatrice [
] Avoir mis la ma ... 29 New York mars-avril 1958, in OC, XV, p. 809. 15Lorsqu’il Ă©voque un art contemplatif, il pense moins Ă  un Ă©lan mystique22 qu’à l’activitĂ© d’une intelligence qui trouve du bonheur Ă  Ă©prouver sa connaturalitĂ© avec l’Intelligence divine. Dans la contemplation du beau artistique, l’intelligence [
] boit la clartĂ© de l’ĂȘtre, [
] elle est irradiĂ©e par une lumiĂšre intelligible qui lui est donnĂ© d’un coup23 ». Mais si la contemplation est Ă  l’origine de l’acte crĂ©ateur, encore faut-il que l’artiste soit actif, doublement actif ; par son savoir-faire d’artifex, bien sĂ»r, mais cela ne suffit pas La poĂ©sie n’est pas seulement dans l’art du poĂšte ; elle est aussi dans l’ñme des choses », c’est-Ă -dire dans leur forme. Pour la reconnaĂźtre et s’en emparer, le peintre doit ĂȘtre lui-mĂȘme poĂšte ou devin, deux termes Ă©quivalents pour Maritain qui dĂ©finit la crĂ©ation poĂ©tique et artistique comme une sorte de divination », rappelle que le vates latin Ă©tait Ă  la fois un poĂšte et un devin » et considĂšre que le peintre [
] n’est plus rien s’il manque de vision poĂ©tique24 ». Dans le priĂšre d’insĂ©rer de Chagall ou l’orage enchantĂ©, Jacques Ă©voque la poĂ©sie essentielle » du peintre, tandis que, selon RaĂŻssa, la poĂ©sie est la grande animatrice [
] de l’Ɠuvre de Chagall 25 ». LĂ  encore un terme trĂšs gĂ©nĂ©ral est pris dans un sens mĂ©taphysique prĂ©cis la poĂ©sie est une divination du spirituel dans le sensible»26, c’est-Ă -dire de la forme dans les choses. Chagall est de ceux qui saisissent et dĂ©voilent ces mystĂšres enfouis, ces formes qui resplendissent, sans doute, mais seulement pour ceux qui ont l’intelligence de les voir puis le gĂ©nie de les recrĂ©er en une construction de lignes et de couleurs27 », une image illuminatrice28 » qui la rende intelligible Ă  tous. Dans la prĂ©sentation en anglais du catalogue de l’exposition Chagall Ă  la galerie Chalette29, Maritain insiste sur la dimension initiatique de l’art chagallien dont la beautĂ© tient Ă  la manifestation d’une connaissance mystĂ©rieuse ». Par le dĂ©voilement des mystĂšres et leur recomposition picturale, l’artiste recrĂ©e la nature, il la change non seulement matĂ©riellement et du dehors, mais aussi du dedans » et rĂ©alise ainsi un analogue de la crĂ©ation divine. 30 R. MARITAIN, Chagall ou l’orage enchantĂ©, p. 22. 31 L’artiste-poĂšte selon Maritain est bien un devin, et non pas un messager. L’interprĂ©tation de Chaga ... 16C’est en ce sens que la peinture peut ĂȘtre dĂ©finie comme religieuse, indĂ©pendamment du thĂšme choisi. La matiĂšre premiĂšre du peintre n’est pas une chose mais le reflet de l’Intelligence crĂ©atrice dans la chose. Un paysage, un animal, un personnage de cirque peuvent ĂȘtre, comme chez Rouault, aussi religieux que la reprĂ©sentation d’un prophĂšte ou du Christ en croix. Et cela quelles que soient les convictions et mĂȘme les intentions explicites de l’artiste. Chagall peut bien ne professer aucune religion dogmatique30 », cela ne concerne en rien le caractĂšre religieux de son Ɠuvre. Ce point de vue Ă©tait partagĂ© par le dominicain Marie-Alain Couturier quand il a demandĂ© Ă  Chagall de participer au dĂ©cor de l’église d’Assy31. 32 MARITAIN L’intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie, OC vol. X, p. 108. 33 Ibid, p. 107. 17Si, dans la divination poĂ©tique, l’intelligence joue un rĂŽle aussi important que l’imagination32 », la crĂ©ation artistique ne se rĂ©sume pas Ă  une rĂ©ception contemplative de ce que cachent les choses. Le dĂ©voilement des mystĂšres rĂ©sulte d’une intercommunion » active entre l’ĂȘtre intĂ©rieur des choses et l’ĂȘtre intĂ©rieur du Soi humain33 ». 34 R. MARITAIN, Chagall ou l’orage enchantĂ©, vol. XV p. 30. 35 MARITAIN, L’intuition crĂ©atrice, p. 137-138. Outre Chagall, Maritain cite CĂ©zanne, Rouault, Van Gog ... 36 MARITAIN, Eaux-fortes de Chagall pour la Bible », Cahiers d’Art, 9e annĂ©e 1934, p. 84, repris i ... 37 Cf. R. DESNOS, Chagall », Le Roseau d’or, 9, quatriĂšme sĂ©rie, Plon 1930, p. 133. Maritain considĂš ... 38 Ce que confirme J. Maritain la saisie simultanĂ©e des choses et du Soi se fait par une expĂ©rience ... 39 R. MARITAIN, OC vol. XV, p. 810. 40 MARITAIN, p. 141, et R. MARITAIN, OC vol. XV, p. 773. 18 Sous la poussĂ©e de son monde intĂ©rieur34 », Chagall transpose les formes naturelles, créées par Dieu, jusqu’à faire surgir des formes nouvelles mystĂ©rieusement apparentĂ©es aux formes naturelles ». Les formes et leur messages sans fin sont saisis dans et par l’éveil 
 de la subjectivitĂ© crĂ©atrice Ă  elle-mĂȘme », ce qui permet d’accomplir un acte de communion spirituelle avec les choses » et de les refondre dans une nouvelle structure visible. C’est l’affirmation de cette subjectivitĂ© crĂ©atrice qui caractĂ©rise la grande Ă©poque de la peinture moderne35 ». Chagall demande peu Ă  la nature 
 et beaucoup Ă  soi-mĂȘme 36 ». AprĂšs ĂȘtre allĂ© dans l’inconnu pour y chercher les mystĂšres, il les abstrait de la rĂ©alitĂ© et les transporte par une dĂ©marche que Jacques et RaĂŻssa qualifient volontiers, Ă  la suite de Robert Desnos, de surrĂ©aliste 37 ». RaĂŻssa, dans Chagall et l’orage enchantĂ©, affirme qu’il est le premier surrĂ©aliste par une donnĂ©e immĂ©diate de sa conscience d’artiste », mĂȘme s’il n’a jamais dĂ©fini, sinon dans son propre mouvement crĂ©ateur, le sens de ce mot38 ». Comme poĂ©sie, surrĂ©alisme n’est pas pris dans son sens commun mais dĂ©signe le peintre qui, grĂące Ă  la libĂ©ration de son moi intĂ©rieur39 », crĂ©e un univers de formes beaucoup plus vaste que le rĂ©el ». Chagall ne fuit pas les formes naturelles » mais il les transforme, les transfigure, dĂ©gage et abstrait d’elles leur propre surrĂ©alitĂ© 40 ». La subjectivitĂ© crĂ©atrice, avec l’idĂ©e que l’intĂ©rieur des choses et le Soi de l’artiste se sont manifestĂ©s ensemble, l’un par l’autre, l’un grĂące Ă  l’autre, intro- duit ou rĂ©introduit l’histoire propre de Chagall dans la perception de son Ɠuvre, en enracinant celle-ci dans une histoire et dans une mĂ©moire. III. La danse du roi David 41 J. MARITAIN, Chagall », SĂ©lection, Cahier n° 6, repris dans FrontiĂšres de la poĂ©sie et autres ess ... 19Dans la mesure oĂč le monde intĂ©rieur de l’artiste joue un rĂŽle dĂ©cisif dans la maniĂšre dont il rend visible le mystĂšre des choses, Jacques et RaĂŻssa n’ont pas manquĂ© de souligner la judĂ©itĂ© de Chagall. Dans le premier texte qu’il lui consacre, en 192941, Jacques dĂ©taille tout ce que le peintre doit Ă  son enfance et Ă  sa jeunesse passĂ©e dans la communautĂ© juive de Vitebsk puis de Moscou PitiĂ©, mĂ©lancolie, hantise du dĂ©part et perpĂ©tuelle errance, chant de la pauvretĂ© et de l’espĂ©rance, c’est la poĂ©sie mĂȘme de l’esprit juif qui nous Ă©meut si profondĂ©ment dans ces rabbins miraculeux, comme les merveilles de mobilitĂ© aĂ©rienne et de vĂ©ritĂ© féérique qui jaillissent du monde de formes et de couleurs inventĂ© par lui pour le théùtre yiddish de Moscou. 42 Cahiers d’Art, 9e annĂ©e, 1934, p. 84 – texte repris aussi dans FrontiĂšres de la poĂ©sie. 43 OC vol. VIII, p. 975. 44 OC vol. X, p. 198-200. 45 Chagall ou l’orage enchantĂ©, OC vol. XV p. 17-44. 46 N° 11-12, juillet aoĂ»t 1950. 20Dans son essai intitulĂ© Eaux fortes de Chagall pour la Bible 42, Jacques dĂ©couvre dans les quarante-deux gravures exĂ©cutĂ©es pour illustrer la GenĂšse des modulations voilĂ©es comme les chants de la Synagogue. 
 Plus juif que jamais, Chagall retrouve ici 
 quelque chose de la grave et naĂŻve inspiration mĂ©diĂ©vale ». En 1944, aux obsĂšques de Bella Chagall, il remercie le couple d’avoir donnĂ© Ă  la France, la poĂ©sie de l’ñme juive dans sa substance la plus profonde 43 ». Il en va ainsi jusqu’à L’Intuition crĂ©atrice dans l’art et la poĂ©sie, oĂč Jacques compare Rouault et Chagall Tous deux sont de vrais primitifs, bien que d’une maniĂšre tout Ă  fait diffĂ©rente, car l’inspiration de Rouault est proche de celle de l’art roman, tandis que Chagall s’enracine dans une tradition juive sĂ©culaire44 ». Et il cite Ă  ce propos le texte de RaĂŻssa, Chagall ou l’orage enchantĂ©, oĂč celle-ci retrouve dans les tableaux de Chagall la danse du roi David et celle des Hassidim. La joie tendre, spirituelle, qui imprime son Ɠuvre est nĂ©e avec lui Ă  Vitebsk, en terre russe, en terre juive », avec le senti- ment tragique de la fragilitĂ© de la vie, la mĂ©moire des souffrances passĂ©es, le sentiment prophĂ©tique des douleurs inimaginables » qui attendent le peuple juif – allusion Ă  la Crucifixion blanche de 1938, peinte alors que l’antisĂ©mitisme faisait dĂ©jĂ  sĂ©vir en Allemagne une atroce persĂ©cution ». RaĂŻssa se souvient de la solennitĂ© bien rare chez lui » avec laquelle il lui a montrĂ© pour la premiĂšre fois ce tableau avec un sentiment profond de l’importance de l’Ɠuvre ». Elle souligne aussi l’empreinte du hassidisme dans l’Ɠuvre de Chagall, celle d’une communautĂ© dont l’ñme ne s’est pas livrĂ©e au monde profane, mais s’est baignĂ©e chaque jour dans l’eau vive de l’Écriture. 
 Les Juifs dans l’Ɠuvre de Chagall sont aussi, dans la transposition et l’abstraction de l’art, une image impĂ©rissable d’IsraĂ«l45 ». RaĂŻssa conclut qu’il serait impossible de comprendre le peintre sans cette connaissance profonde, instinctive, de l’ñme de son peuple ». Elle reprend ce thĂšme dans l’article qu’elle a donnĂ© Ă  Marie-Alain Couturier en 1950 pour la revue L’Art sacrĂ© 46 La joie Ă©merveillĂ©e qui imprĂšgne son Ɠuvre est nĂ©e avec lui Ă  Vitebsk », joie pĂ©nĂ©trĂ©e de mĂ©lancolie, traversĂ©e de l’aiguillon de la nostalgie et de la difficile espĂ©rance ; elle porte en elle le sentiment tragique de sa fragilitĂ© et de sa mort. [
] c’est parce que Chagall est si prĂšs de son peuple que son art surrĂ©el est si parfaitement vrai ». 47 En 1930 la commande de Vollard pour l’illustrer l’Ancien Testament renforce son dĂ©sir de visiter la ... 48 CitĂ© par G. SCHMITT-REHLINGER, JĂ©sus Christ dans l’Ɠuvre de Marc Chagall, Metz 2006, p. 171. 21On peut difficilement reprocher aux Maritain d’avoir ignorĂ© la part juive de Chagall, que celui-ci rĂ©affirme vigoureusement dans les annĂ©es 193047 et surtout Ă  partir de 1948, aprĂšs le gĂ©nocide qui a dĂ©truit le monde de son enfance. Sa fidĂ©litĂ© au peuple juif se double alors d’un engagement en faveur de l’État d’IsraĂ«l. Avant de rĂ©aliser le Passage de la Mer rouge pour l’église d’Assy, il demande l’avis du prĂ©sident d’IsraĂ«l, ChaĂŻm Weizmann, auquel il Ă©crit If I decide to decor this chapel I would not want the people of IsraĂ«l to think that my heart or mind – not to speak of my art – have anything in common with non-Judaism. With my ancestors I shall always be bound to my people ». Et il dit sa rĂ©ticence Ă  travailler pour une Ă©glise catholique at a time when the Vatican is not favourably disposed to IsraĂ«l », une rĂ©ticence qui va au-delĂ  des lieux de culte I refused my friend Jacques Maritain’s request to donate to the Vatican’s Museum of modern Art ». RĂ©ticence qui s’étend Ă  l’Allemagne mais aussi Ă  la Grande-Bretagne at a time when British Policy was unfavorable to our interest 48 ». Rien de confessionnel, encore moins de doctrinal dans cet attachement profond, charnel, Ă  un peuple, Ă  une culture et, dĂ©sormais, Ă  un État. Les rĂ©ticences vis-Ă -vis du Saint-SiĂšge s’effacent Ă  mesure que son opposition Ă  l’État d’IsraĂ«l s’attĂ©nue. Dans une lettre Ă  Maritain du 5 novembre 1957, Chagall est d’accord pour figurer dans les collections du Vatican, Ă  condition qu’on le lui demande. 49 Lors des obsĂšques de Bella, en septembre 1944, Maritain Ă©voque devant Marc Chagall le Dieu des Pa ... 50 R. MARITAIN, Chagall et l’orage enchantĂ©, OC XV p. 22, Jacques Maritain aux obsĂšques de Bella », ... 51 AK, 15 avril 1955. Ce projet est Ă  l’origine du MusĂ©e national Message biblique de Nice. 22Mais son art peut-il ĂȘtre qualifiĂ©, Ă  la fois, de juif et de religieux ? Religieux, certainement. Juif, au sens dogmatique et rituel du terme, non. Pour des raisons accidentelles, d’abord il semble Ă©vident pour les Maritain que si Chagall est croyant49, il ne professe [
] aucune religion dogmatique » et, pas plus que Bella, il ne se rattache Ă  aucune forme dĂ©finie de culte50 ». Chagall n’a jamais dit le contraire. S’il a montrĂ© du respect pour les religions instituĂ©es, il n’a pas jugĂ© utile de trop distinguer entre les clergĂ©s et les rites. Chagall, c’est d’abord une gĂ©nĂ©rositĂ© et un humanisme qui se manifestent bien dans cette lettre Ă  Maritain Ă  propos d’un projet de chapelles ƓcumĂ©niques Depuis des annĂ©es je pense Ă  ces chapelles abandonnĂ©es, du 17e siĂšcle, que la MunicipalitĂ© [de Vence] a l’intention de me proposer de faire. Dans mon imagination, ce sont des chapelles-musĂ©es dans lesquelles, si j’avais la force de les faire, vous-mĂȘme pourriez faire des confĂ©rences. On pourrait aussi y donner des concerts et y Ă©couter du Bach ou mĂȘme Stravinsky
 ou un prĂȘtre ou un rabbin pourraient faire leur sermon, s’ils le voulaient 51 ». 23Chagall, fermement attachĂ© au peuple juif et Ă  sa mĂ©moire, n’est pas un Juif religieux. Mais selon l’esthĂ©tique maritainienne, cela est accessoire. Chagall eĂ»t-il Ă©tĂ© un pratiquant fidĂšle, son art n’aurait pas revĂȘtu pour autant de caractĂšre confessionnel prĂ©cis. Et cela pour une raison essentielle pour Maritain il ne peut pas y avoir d’art religieux confessionnel. Le caractĂšre religieux d’une Ɠuvre ne doit rien Ă  son thĂšme, ni Ă  son usage, ni Ă  l’endroit oĂč elle se trouve exposĂ©e. Il doit tout au processus de la crĂ©ation. La saisie des formes dans les choses et leur reconstruction dans de nouvelles structures visibles, selon une logique et un fonctionnement propres Ă  l’image, dĂ©finissent un rapport aux choses qui exclut la subordination de l’image aux mots, la rĂ©duction de l’image Ă  illustrer les mots, que ceux-ci forment une histoire des origines, un mythe fondateur, une doctrine de salut, un commentaire de la doctrine ou sa rĂ©duction Ă  des fins pĂ©dagogiques. Chagall n’illustre pas l’Ancien ou le Nouveau Testament, il les recrĂ©e Ă  sa maniĂšre, qui est celle de la poĂ©sie. Il est toujours possible de ramener telle ou telle de ses Ɠuvres Ă  une illustration de la Bible ; mais c’est la faire tomber, par contresens, au dernier Ă©tage de la hiĂ©rarchie maritainienne, celle de l’art sacrĂ© de commande, ou, pour reprendre un langage qui fleure l’administration, pour ne pas dire le bureau postal l’art sacrĂ© par destination. Pour Maritain l’ image illuminatrice » ne s’oppose sans doute pas au discours confessionnel ; mais en tant qu’Ɠuvre d’art elle s’affirme dans une autonomie absolue. VoilĂ  semble-t-il comment il faut interprĂ©ter le texte de 1934 consacrĂ© aux Eaux fortes de Chagall pour la Bible, qui dĂ©finit de maniĂšre durable le point de vue de Maritain, mais qui lui a Ă©tĂ© parfois reprochĂ© 52 OC vol. V, p. 776. Sur le rapport Ă  la poĂ©sie Maritain reprend ce que Chagall disait lui-mĂȘme Je ... Chagall, dans ses eaux-fortes, n’a pas voulu ĂȘtre juif, je suppose qu’il ne sait mĂȘme pas exactement quelle dogmatique juive ou chrĂ©tienne l’Ancien Testament 
 nous propose. C’est la poĂ©sie de la Bible qu’il a Ă©coutĂ©e, c’est elle qu’il a voulu rendre 
. Je me reprocherais de sembler solliciter dans un sens quelconque un art qui n’est ainsi religieux que, pour ainsi parler, malgrĂ© lui. Il l’est cependant, du moins selon l’aspiration la plus informulĂ©e. Et il m’est bien permis de remarquer que prĂ©cisĂ©ment parce qu’il n’a rien cherchĂ© ni voulu dans ce sens, le monde plastique de la Bible de Chagall, si profondĂ©ment et douloureusement terrestre, non dĂ©livrĂ© encore, et comme tĂątonnant dans une nuit sacrĂ©, tĂ©moigne sans le savoir de la valeur figurative du grand lyrisme d’IsraĂ«l 52. 53 La Bible illustrĂ©e par Marc Chagall 1887-1985 un dialogue interculturel et son Ă©volution, Paris ... 24Dans une thĂšse rĂ©cente 53, Chan Young Park semble avoir vu dans cette approche une volontĂ© abusive de mettre Chagall hors de l’espace et du temps, peut-ĂȘtre dans le but de le mieux rĂ©cupĂ©rer. Cette interprĂ©tation ne prend en compte ni l’esthĂ©tique de Maritain, ni son apprĂ©ciation de la judĂ©itĂ© profonde de Chagall et le rĂŽle essentiel de celle-ci dans la subjectivitĂ© crĂ©atrice » du peintre. Il semble aussi que l’humanisme moderne et ƓcumĂ©nique de Chagall soit difficile Ă  comprendre dans une postmodernitĂ© marquĂ©e par des replis identitaires qui reconstituent parfois la confusion du culturel et du religieux. On pourrait alors objecter la tendance de RaĂŻssa Ă  christianiser certaines Ɠuvres de Chagall. Cette tendance est fondĂ©e sur son expĂ©rience personnelle. Elle considĂšre non seulement qu’il existe un lien Ă©troit entre le judaĂŻsme et le christianisme, mais aussi que la conversion d’un Juif au christianisme ne signifie pas un rejet mais un dĂ©veloppement du judaĂŻsme. À propos de sa propre conversion, elle Ă©crit 54 R. MARITAIN, “RĂ©cit de ma conversion” rĂ©digĂ© en 1909, Cahiers Jacques Maritain, n° 7-8 1983, p. ... 55 Dans l’article sur Chagall qu’elle publie dans la revue L’Art SacrĂ© en 1950, elle s’appuie sur la C ... 56 N° 11-12, juillet 1950, p. 26-30. 57 Cette thĂšse est reprise par S. ALEXANDER, Marc Chagall An Intimate Biography, Paragon House Publi ... 58 Chez Maritain, l’identification des souffrances des Juifs Ă  la passion du Christ est trĂšs rare. Dan ... 25 LĂ  oĂč j’aurais craint de trouver lutte et opposition, je ne vis, Ă  ma grande joie, qu’unitĂ©, continuitĂ©, harmonie parfaite54 ». C’est dans cette perspective qu’elle reconnaĂźt le Christ dans la figure centrale de la Crucifixion blanche et d’autres Ɠuvres majeurs 55. Cette tendance, dĂ©jĂ  visible dans Chagall ou l’orage enchantĂ©, en 1943, s’affirme dans la revue L’Art SacrĂ© en 195056. RaĂŻssa, qui voit dans les Christ en Croix » de Chagall les Ɠuvres oĂč les caractĂšres permanents de son art apparaissent avec le plus d’évidence et atteignent Ă  la plĂ©nitude de leur signification », Ă©voque Ă  propos de la Crucifixion blanche la compassion du peintre » qui unit la Passion du Christ Ă  celle du Peuple Élu ». Dans chacun de ce qu’elle appelle ses tableaux chrĂ©tiens », Chagall aurait montrĂ© l’indissoluble union des deux Testaments. L’Ancien annonçant le Nouveau, et le Nouveau l’accomplissant ». Pour RaĂŻssa, le Chagall des annĂ©es 1938-1947 ne peint pas le Juif en Christ, mais le Christ en Juif 57. Cette interprĂ©tation semble difficile Ă  soutenir. Mais elle ne doit rien Ă  un refus de situer le peintre dans un temps et une Ă©poque prĂ©cises, la culture de la Yiddishkeit et la mĂ©moire des shtetlekh hassidiques de BiĂ©lorussie. Surtout, elle n’est pas fondĂ©e sur l’esthĂ©tique de Jacques Maritain ni sur la mĂ©taphysique qui la sous-tend 58. Jacques et RaĂŻssa formaient sans doute une couple fusionnel, mais pas au point de penser et sentir toujours exactement de la mĂȘme maniĂšre. D’Art et scolastique jusqu’à L’intuition crĂ©atrice, l’artiste est religieux quand il saisit les traces de Dieu dans les choses, et les recompose selon les lois propres de l’image, en toute autonomie par rapport aux lois de l’église, du temple ou de la synagogue. Autonomie qui, rĂ©pĂ©tons-le, ne signifie pas opposition. Mais l’esthĂ©tique de Maritain, qui est d’abord une poĂ©tique, fait de l’artiste religieux un devin et de son Ɠuvre un analogue de la crĂ©ation divine. Ce qui ne favorise guĂšre l’idĂ©e d’une subordination de l’art aux gestes d’un culte, aux mots d’un credo et aux espĂ©rances d’une rĂ©vĂ©lation. Au bon catholique Marek Szwarc, illustrateur attentif des exigences liturgiques et des Ă©noncĂ©s dogmatiques, Jacques Maritain prĂ©fĂ©ra toujours les Ă©nigmes chagalliennes, quitte Ă  admettre que bien souvent Chagall Ă©tait religieux sans le savoir. 59 My disc of gold. Itineray to Christ, p. II. 60 Et aussi la Stephankirche de Mayence, la chapelle des Cordeliers de Sarrebourg, la chapelle Notre-D ... 26Aujourd’hui, cette dĂ©finition de l’art religieux peut Ă©tonner. Il faut rappeler qu’au moment oĂč Maritain l’énonce, c’est-Ă -dire entre les annĂ©es vingt et les annĂ©es soixante, il en veut beaucoup aux clercs d’avoir fermĂ© les lieux de culte aux artistes qu’il aime. Dans l’introduction qu’il a donnĂ©e en 1961 Ă  My disc of gold du peintre amĂ©ricain William Congdon, il espĂšre qu’un jour Congdon will reach the precincts of sacred painting and ecclesiastical commissioning ». C’est pour ajouter aussitĂŽt qu’il s’agit lĂ  d’un privilĂšge that Rouault almost never had59 ». Almost », Ă  cause des trois vitraux de l’église du plateau d’Assy, glorieuses exceptions. On ne saurait comprendre l’attitude de Maritain si on la dissociait des combats, des rĂ©ussites mais aussi des Ă©checs, des dĂ©convenues et des amertumes de son ami Marie-Alain Couturier. Aujourd’hui, alors que les vitraux de Chagall ornent les cathĂ©drales de Metz et de Reims60, cette attitude peut sembler, d’un point de vue historique, quelque peu dĂ©passĂ©e. 27Autre sujet d’étonnement l’usage, ou plutĂŽt le non-usage que Maritain fait du mot sacrĂ©, rĂ©duit Ă  peu de choses, Ă  une affaire de commissions ecclĂ©siastiques ou de conservateurs du patrimoine. Il y aurait une Ă©tude Ă  faire sur la dĂ©fiance de toute une gĂ©nĂ©ration d’intellectuels catholiques envers ce concept de sacrĂ©, jugĂ© paĂŻen ou relativiste, alors mĂȘme qu’il envahissait l’anthropologie culturelle. Art et scolastique paraĂźt huit ans aprĂšs Les Formes Ă©lĂ©mentaires de la vie religieuse de Durkheim et peut Ă  certains Ă©gards en ĂȘtre considĂ©rĂ© comme l’antidote. Mais que se passerait-il si l’on appliquait Ă  la conception maritainienne de Chagall l’idĂ©e de sacrĂ© telle que la dĂ©veloppe non pas Durkheim – l’écart serait tout de mĂȘme trop grand – mais Roger Caillois, qui rompit avec le surrĂ©alisme en 1935 et publia L’homme et le sacrĂ© en 1939 ? Pour Caillois, le sacrĂ© nait de la rencontre d’au moins deux univers hĂ©tĂ©rogĂšnes, mais qui comportent cependant assez d’analogie pour que la rencontre, ou le passage, soit possible. Selon Maritain, le peintre-poĂšte, par la divination du spirituel dans le sensible, entre en contact avec des formes qui relĂšvent Ă  la fois de la transcendance et de l’immanence, puisqu’elles sont l’empreinte de Dieu dans les choses. Et il se les approprie. De maniĂšre au moins formelle, cette expĂ©rience ne s’approche t-elle pas de ce que Caillois appelle le sacrĂ© ? Pourrait-on lire Maritain en mettant sacrĂ© lĂ  oĂč il dit religieux, et vice-versa ? Oui, en identifiant l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© et la transcendance, c’est-Ă -dire en Ă©vacuant ce qui fonde toute l’Ɠuvre de Maritain, sa mĂ©taphysique. Il faut s’y rĂ©soudre le philosophe de Meudon peut nous aider Ă  dĂ©finir un art religieux, certainement pas un art sacrĂ©, et encore moins les traces du sacrĂ© dans l’art contemporain. Seitenanfang Anmerkungen 1 JĂ©sus le Christ dans l’Ɠuvre de Chagall, sous la direction de Pierre-Marie Beaude, UniversitĂ© de Metz, 2006. Le texte intĂ©gral de la thĂšse et le volume d’annexes iconographiques peuvent ĂȘtre tĂ©lĂ©chargĂ©s Ă  partir du site de l’École Doctorale de l’universitĂ© Paul Verlaine de Metz. La Crucifixion Blanche peut ĂȘtre vue sur le site de l’institution qui la conserve, l’Art Institute de Chicago 2 105 eaux-fortes de 1931 Ă  1939, dont 39 planches reprises et achevĂ©es de 1952 Ă  1956. 3 C’est au plus tard en 1950, selon l’article publiĂ© par RaĂŻssa Maritain dans la revue L’Art SacrĂ© n° 11-12, juillet 1950, qu’à la demande de Couturier Chagall Ă©labore le projet d’une cĂ©ramique murale monumentale pour l’église de Notre-Dame de Toute GrĂące d’Assy ; il s’agit d’un Passage de la mer Rouge assorti de deux bas-reliefs en marbre blanc et deux vitraux aux teintes douces, destinĂ©s Ă  matĂ©rialiser les rites et les symboles du baptĂȘme. L’Ɠuvre n’est installĂ©e qu’en 1957. Deux ans plus tard Chagall accepte de rĂ©aliser sa seconde Ɠuvre d’église », les cartons des vitraux de deux baies du dĂ©ambulatoire nord de la cathĂ©drale de Metz. 4 Dans Grace, Necessity and Imagination Catholic Philosophy and the Twentieth Century Artist, confĂ©rence prononcĂ©e en 2005 dans le cadre des Clarke Lectures de Trinity College, Cambridge, publiĂ©e en anglais sous le titre Grace And Necessity Reflections on Art and Love – et en français sous le titre L’artiste et la grĂące. 5 . My disc of gold. Itineray to Christ, Reynal & Company, New York, p. II. 6 Selon M. DUVAUCHEL, L’esthĂ©tique oubliĂ©e de Jacques Maritain, un chemin de poĂ©sie et de raison, Publibook, Collection Sciences Humaines et Sociales, 2009. 7 Dont Stravinsky, qui reprend l’esthĂ©tique maritainienne dans sa PoĂ©tique musicale de 1945. 8 Le futur cardinal Charles Journet – Sur un chemin de croix de Marek Szwarc », Nova et Vetera 1 1932 44 – et le peintre Jean Bazaine – L’exposition Marek Szwarc », Esprit Mai 1934 p. 339 – se montrĂšrent plus sensibles que Maritain au talent de Marek Szwarc. 9 Georges Rouault peintre et lithographe, album ornĂ© de quatre lithographies originales timbrĂ©es, signĂ©es et numĂ©rotĂ©es Le Pitre, L’EcuyĂšre, Parade, Fille, publiĂ© chez E. Frapier, Ă©diteur, 1926. Maritain y exprime des idĂ©es que l’on va retrouver avec Chagall la peinture de Rouault tire sa vie de l’univers intime de l’ñme, des profondeurs de la vision intĂ©rieure et de l’intuition poĂ©tique, saisissant obscurĂ©ment, dans l’émotion, Ă  la fois la subjectivitĂ© du peintre et le mystĂšre du monde visible. » 10 Archives du Cercle d’Études Jacques et RaĂŻssa Maritain de Kolbsheim [AK], 2 juin 1929. 11 Non datĂ©, mais envoyĂ© de JĂ©rusalem, donc en 1931, archives de Kolbsheim. 12 25 mai 1932, archives de Kolbsheim. Fin 1929, les Chagall ont dĂ©mĂ©nagĂ© et achetĂ© une maison prĂšs de la Porte d’Auteuil, au 15 de l’avenue des Sycomores, dans la villa Montmorency. 13 AK, 14 AK, 15 Maritain est ambassadeur auprĂšs du Saint-SiĂšge de 1945 Ă  1948, Chagall ne rentre en France qu’en 1948. 16 AK, 17 AK, 18 J. MARITAIN, ƒuvres complĂštes [OC], vol. X, p. 267. 19 Ibid., p. 139. 20 Livre issu des six leçons donnĂ©es en 1952 Ă  la National Gallery of Art de Washington et publiĂ©es en anglais en 1953 sous le titre Creative intuition in Art and Poetry. 21 J. MARITAIN, Art et Scolastique, 1920, p. 35-42. 22 Mais sans l’exclure, en l’envisageant comme une sorte d’accĂ©lĂ©rateur du processus de crĂ©ation. Dans Chagall ou l’orage enchantĂ© [Texte achevĂ© Ă  New York en dĂ©cembre 1942, publiĂ© en 1943, rééditĂ© Ă  GenĂšve en 1948 et Ă  Paris en 1965, OC vol. XV], RaĂŻssa affirme que Chagall s’étonnait que l’on puisse concevoir un art sans mysticisme – mais qu’entendait-il par lĂ  ? 23 Art et scolastique, p. 35. Dans L’intuition crĂ©atrice dans l’art et la poĂ©sie, Maritain souligne que le procĂšs intellectuel » qui est Ă  la racine de l’acte crĂ©ateur est Ă©videmment sans parallĂšle Ă  la raison logique » le degrĂ© d’intellectualitĂ© supĂ©rieure » auquel atteint le contemplatif est bien une saisie immĂ©diate, intuitive, et non un cheminement discursif OC, vol. X, p. 146. 24 L’intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie, OC vol. X, p. 108. Chagall a Ă©tĂ© amenĂ© Ă  Meudon par des poĂštes, et Maritain aime Ă  rappeler que tous les grands peintres de l’époque avaient leur poĂšte, Max Jacob pour Picasso, Pierre Reverdy pour Braque, Apollinaire pour Chagall L’intuition crĂ©atrice, p. 267. 25 OC, vol. XV, p. 19. 26 J. MARITAIN FrontiĂšres de la PoĂ©sie et autres essais, Paris 1935, repris dans OC, vol. V, p. 699-700. La formule se retrouve dans Poetic Experience », The Review of Politics, vol. 6, No. 4, pp. 387-402, October 1944, elle est reprise par RaĂŻssa dans son Chagall ou l’orage enchantĂ© et par Jacques dans L’intuition crĂ©atrice. 27 L’intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie, OC, vol. X, p. 140. 28 Je pense que Chagall est aujourd’hui le grand maĂźtre de l’image illuminatrice [
] Avoir mis la main sur ce bien propre des poĂštes est une conquĂȘtes authentiques de la peinture moderne », MARITAIN in L’intuition crĂ©atrice, p. 267 et 380. 29 New York mars-avril 1958, in OC, XV, p. 809. 30 R. MARITAIN, Chagall ou l’orage enchantĂ©, p. 22. 31 L’artiste-poĂšte selon Maritain est bien un devin, et non pas un messager. L’interprĂ©tation de Chagall comme messager se retrouve chez plusieurs critiques, dont FORAY qui Ă©crit [Chagall dans une nouvelle lumiĂšre, Stiftung Frieder Burda, Baden-Baden 2006, p. 188], Ă  propos de l’enthousiasme avec lequel Chagall a acceptĂ© la proposition d’Ambroise Vollard d’illustrer la Bible, que cet enthousiasme 
 tient Ă  la conception que Chagall se fait de l’artiste. Dans L’apparition de 1917- 1918 [Autoportrait avec la muse, MusĂ©e d’Etat russe, Saint-PĂ©tersbourg], le motif classique de l’Annonciation est rĂ©interprĂ©tĂ© la muse qui apparaĂźt Ă  l’artiste est un ange avec les ailes et la main levĂ©e dans l’attitude du Gabriel de l’iconographie classique c’est mĂȘme trĂšs exactement, inversĂ©e, l’attitude de l’ange de l’Annonciation du Greco du musĂ©e des Beaux-Arts de Budapest. Cette peinture, avec sa forte construction opposant deux zones du tableau le terrestre et le cĂ©leste est plus qu’une Ɠuvre profane sur le thĂšme de l’inspiration de l’artiste l’ange est le messager, non de ce qui doit advenir dans le tableau, mais de la source divine de l’inspiration. De sorte que le peintre, qui a reçu cette rĂ©vĂ©lation, devient Ă  son tour un messager ». En servant de contact entre deux mondes hĂ©tĂ©rogĂšnes, l’artiste-messager revĂȘt un caractĂšre non pas religieux mais sacrĂ©. On ne retrouve rien de pareil chez Maritain. 32 MARITAIN L’intuition crĂ©atrice dans l’art et dans la poĂ©sie, OC vol. X, p. 108. 33 Ibid, p. 107. 34 R. MARITAIN, Chagall ou l’orage enchantĂ©, vol. XV p. 30. 35 MARITAIN, L’intuition crĂ©atrice, p. 137-138. Outre Chagall, Maritain cite CĂ©zanne, Rouault, Van Gogh et Braque pour illustrer cette puissante pĂ©nĂ©tration des choses visibles de par la manifestation simultanĂ©e du Soi crĂ©ateur du peintre et des significations occultes saisies par lui dans la rĂ©alitĂ© ». 36 MARITAIN, Eaux-fortes de Chagall pour la Bible », Cahiers d’Art, 9e annĂ©e 1934, p. 84, repris in OC, vol. V, p. 774. 37 Cf. R. DESNOS, Chagall », Le Roseau d’or, 9, quatriĂšme sĂ©rie, Plon 1930, p. 133. Maritain considĂšre que Chagall est le premier surrĂ©aliste’ vĂ©ritable », mais avec des guillemets OC X p. 205. 38 Ce que confirme J. Maritain la saisie simultanĂ©e des choses et du Soi se fait par une expĂ©rience qui n’a pas d’expression conceptuelle et n’est exprimĂ©e que dans l’Ɠuvre de l’artiste » – MARITAIN, OC vol. X, p. 144-145. 39 R. MARITAIN, OC vol. XV, p. 810. 40 MARITAIN, p. 141, et R. MARITAIN, OC vol. XV, p. 773. 41 J. MARITAIN, Chagall », SĂ©lection, Cahier n° 6, repris dans FrontiĂšres de la poĂ©sie et autres essais en 1935, OC vol. V, p. 774. 42 Cahiers d’Art, 9e annĂ©e, 1934, p. 84 – texte repris aussi dans FrontiĂšres de la poĂ©sie. 43 OC vol. VIII, p. 975. 44 OC vol. X, p. 198-200. 45 Chagall ou l’orage enchantĂ©, OC vol. XV p. 17-44. 46 N° 11-12, juillet aoĂ»t 1950. 47 En 1930 la commande de Vollard pour l’illustrer l’Ancien Testament renforce son dĂ©sir de visiter la Palestine, le pays de la Bible ; il s’y rend effectivement en 1931. 48 CitĂ© par G. SCHMITT-REHLINGER, JĂ©sus Christ dans l’Ɠuvre de Marc Chagall, Metz 2006, p. 171. 49 Lors des obsĂšques de Bella, en septembre 1944, Maritain Ă©voque devant Marc Chagall le Dieu des Patriarches et des ProphĂštes, en lequel vous croyez et en lequel elle croyait », OC vol. VIII, p. 975. 50 R. MARITAIN, Chagall et l’orage enchantĂ©, OC XV p. 22, Jacques Maritain aux obsĂšques de Bella », et MARITAIN, Eaux fortes de Chagall pour la Bible, OC V p. 774. 51 AK, 15 avril 1955. Ce projet est Ă  l’origine du MusĂ©e national Message biblique de Nice. 52 OC vol. V, p. 776. Sur le rapport Ă  la poĂ©sie Maritain reprend ce que Chagall disait lui-mĂȘme Je ne voyais pas la Bible, je la rĂȘvais » et il anticipe sur plusieurs critique contemporains Chagall aime lire la Bible dans laquelle il trouve une source inĂ©puisable de poĂ©sie’ [
] Les histoires des patriarches et des prophĂštes [
] l’intĂ©ressaient d’ailleurs moins pour leur sens spĂ©cifiquement religieux que pour leur capacitĂ© Ă  gĂ©nĂ©rer tout un monde d’images ». FORAY, Chagall dans une nouvelle lumiĂšre, Stiftung Frider Burda, Baden-Baden 2006, p. 188. 53 La Bible illustrĂ©e par Marc Chagall 1887-1985 un dialogue interculturel et son Ă©volution, Paris IV – Sorbonne, dĂ©cembre 2008. 54 R. MARITAIN, “RĂ©cit de ma conversion” rĂ©digĂ© en 1909, Cahiers Jacques Maritain, n° 7-8 1983, p. 77. 55 Dans l’article sur Chagall qu’elle publie dans la revue L’Art SacrĂ© en 1950, elle s’appuie sur la Crucifixion blanche de 1938 – qu’elle considĂšre comme la premiĂšre reprĂ©sentation du Christ par Chagall – mais aussi le Martyr de 1939, l’Obsession et la Crucifixion jaune de 1943, la Chute de l’ange achevĂ©e en 1947, l’Ange et le Christ de 1945, et la Descente de Croix de 1947. Elle prĂ©cise Chagall a sans doute peint d’autres fois le figure du Christ. Je parle ici de ce que j’ai vu » – L’Art SacrĂ©, n° 11-12, juillet 1950, p. 30. 56 N° 11-12, juillet 1950, p. 26-30. 57 Cette thĂšse est reprise par S. ALEXANDER, Marc Chagall An Intimate Biography, Paragon House Publishers, New-York 1988 quand Chagall dessine une crucifixion Ă  l’arriĂšre-plan du Songe de Jacob et de la crĂ©ation de l’homme, il suggĂšre au spectateur la rĂ©alisation chrĂ©tienne d’une prophĂ©tie vĂ©tĂ©rotestamentaire » citĂ© par SCHMITT- REHLINGER, p. 59. 58 Chez Maritain, l’identification des souffrances des Juifs Ă  la passion du Christ est trĂšs rare. Dans l’article qu’il a publiĂ© en 2004 dans la revue de l’AmitiĂ© judĂ©o-chrĂ©tienne, Yves Chevalier n’en trouve trace que dans le message radiodiffusĂ© du 5 janvier 1944, oĂč l’extermination des Juifs par les nazis, dĂ©finie comme la passion d’IsraĂ«l », a quelque chose de mystĂ©rieusement analogue avec la crucifixion. De nos jours, la passion d’IsraĂ«l prend de plus en plus distinctement la forme de la croix ». Ce message a peu Ă  voir avec les grands textes de Maritain, comme L’impossible antisĂ©mitisme 1937 oĂč il souligne la finalitĂ© propre d’IsraĂ«l comme peuple de Dieu. Cf. Y. CHEVALIER, Le combat de Jacques Maritain contre l’antisĂ©mitisme », Sens [revue de l’AmitiĂ© judĂ©o-chrĂ©tienne de France] no 8 aoĂ»t 2004, pp. 419-440. Voir aussi la prĂ©face que P. VIDAL-NAQUET donnĂ© Ă  la réédition de l’Impossible antisĂ©mitisme, Jacques Maritain et les juifs », DesclĂ©e de Brouwer 1994, rééd. 2003. 59 My disc of gold. Itineray to Christ, p. II. 60 Et aussi la Stephankirche de Mayence, la chapelle des Cordeliers de Sarrebourg, la chapelle Notre-Dame du Saillant, la FraumĂŒnster Kirche de Zurich, la All Saints Church de Tudeley, l’Union Church de Pocantico Hills, la synagogue de l’hĂŽpital Hadassah de JĂ©rusalem
Seitenanfang Zitierempfehlung Papierversionen RĂ©gis Ladous, „Marc Chagall et les Maritain“, Revue des sciences religieuses, 84/4 2010, 545-560. Online-Version RĂ©gis Ladous, „Marc Chagall et les Maritain“, Revue des sciences religieuses [Online], 84/4 2010, Online erschienen am 01 Dezember 2015, abgerufen am 29 August 2022. URL DOI
CeCD-audio rassemble 20 poÚmes de Jacques Prévert extraits des recueils Paroles, Histoires, La Pluie et le Beau Temps, Soleil de nuit et La CinquiÚme S Tous les livres depuis 1997
17 janvier 2009 6 17 /01 /janvier /2009 2332 6. Deburau rĂ©inventĂ© "Les Enfants du Paradis et le XIX° siĂšcle de Jacques PrĂ©vert" par Mme DaniĂšle GASIGLIA-LASTER. Texte publiĂ© dans "L'invention du XIX° siĂšcle II, le XIX° siĂšcle au miroir du XX°", Librairie Klincksieck, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2002. Ce texte a Ă©tĂ© mis Ă  disposition des internautes avec l'aimable autorisation de DaniĂšle Gasiglia-Laster - DaniĂšle Gasiglia-Laster Critique littĂ©raire ; ses travaux et publications sont axĂ©s sur trois auteurs Victor Hugo, Marcel Proust et Jacques PrĂ©vert; a prĂ©sentĂ©, Ă©tabli et annotĂ©, en collaboration avec Arnaud Laster, l'Ă©dition dans la BibliothĂšque de la PlĂ©iade des Oeuvres complĂštes de Jacques PrĂ©vert ; auteur de la biographie Jacques PrĂ©vert, celui qui rouge de coeur », parue chez SĂ©guier. Le film Les Enfants du paradis a inscrit dans notre mĂ©moire collective une des reprĂ©sentations les plus spectaculaires du XIX° siĂšcle. La proposer Ă  la rĂ©flexion dans un colloque comme celui-ci m'a donc paru s'imposer. La matiĂšre est si vaste que j'ai dĂ©cidĂ© de m'en tenir au scĂ©nario original de Jacques PrĂ©vert tel qu'il a Ă©tĂ© rĂ©cemment publiĂ© 1, sans prendre en compte l'apport Ă©ventuel du rĂ©alisateur, des dĂ©corateurs, du crĂ©ateur des costumes mais sans m'interdire nĂ©anmoins de recourir au film tournĂ©, les dialogues y prĂ©sentant des variantes significatives par rapport Ă  ce scĂ©nario original 2. Celui-ci commence ainsi Un rideau de théùtre rapiĂ©cĂ©, sali, usĂ©, abĂźmĂ© par le temps. On entend frapper "les trois coups" et le rideau se lĂšve, dĂ©couvrant un coin du ciel de Paris avec ses nuages calmes et gris... Nous sommes en 1827 ou 1828, peu importe » 3. VoilĂ , d'emblĂ©e, indiquĂ©s la thĂ©matique — théùtrale —, et la localisation — parisienne. Quant Ă  l'Ă©poque, Ă  peine vient-elle d'ĂȘtre prĂ©cisĂ©e, non sans un lĂ©ger flottement, que cette prĂ©cision toute relative est prĂ©sentĂ©e comme nĂ©gligeable. Signe que le scĂ©nariste ne prĂ©tend pas proposer une reconstitution historique si l'on tente d'ailleurs de relever des repĂšres, on s'aperçoit que la chronologie rĂ©elle n'est pas rigoureusement respectĂ©e. Deburau est encore un inconnu quand il apparaĂźt. Nous sommes devant le théùtre des Funambules oĂč Anselme Deburau, son pĂšre, harangue la foule pour l'inviter Ă  entrer. Puis Anselme se moque publiquement du jeune homme, dĂ©verse sur lui nombre d'insultes et le frappe. Selon Jules Janin, premier biographe de Deburau, le pĂšre brutalisait bien son fils, maladroit faire-valoir de ses frĂšres Ă  ses dĂ©buts 4. Mais si nous Ă©tions en 1827-1828, Jean-Gaspard Deburau, dit Baptiste 5, serait dĂ©jĂ  cĂ©lĂšbre et ne se ferait plus houspiller ainsi par son pĂšre... C'est Ă  se demander si 1827-1828 n'est pas une mauvaise lecture d'une dactylographe ou des Ă©diteurs et si PrĂ©vert n'avait pas en rĂ©alitĂ© indiquĂ© 1817-1818, ce qui correspondrait davantage Ă  la date oĂč commence cette premiĂšre partie 6. Quelque temps aprĂšs, on assiste Ă  une bagarre entre deux familles rivales de mimes les Deburau et les Barrigni en rĂ©alitĂ© les Chiarigny7. Cette bagarre, mĂ©morable, eut lieu au théùtre des Funambules en 1819. C'est Ă  ce moment-lĂ  que FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre, dans le scĂ©nario, y fait son entrĂ©e et demande Ă  y ĂȘtre engagĂ©. Le vrai FrĂ©dĂ©rick a dĂ©butĂ© sur les planches d'un petit théùtre, Les VariĂ©tĂ©s amusantes, ouvert en 1815 sur le boulevard du Temple, dans un rĂŽle de lion 8. Il fut engagĂ© aux Funambules l'annĂ©e suivante. Jules Janin ayant Ă©crit que FrĂ©dĂ©rick y avait commencĂ© », le scĂ©nariste imagine, lui, que c'est Ă  la faveur de la dĂ©mission des Barrigni en plein spectacle, en remplaçant au pied levĂ© l'un d'eux dans le rĂŽle du lion. Ce dĂ©part de la famille Barrigni est prĂ©sentĂ© Ă©galement comme l'occasion pour Baptiste de courir sa chance, en remplaçant de son cĂŽtĂ© le Pierrot. La deuxiĂšme Ă©poque est moins linĂ©aire temporellement. Sur le rideau de théùtre qui, comme celui de la premiĂšre partie, se lĂšve, on peut lire Des annĂ©es ont passĂ©... » ou, formule dĂ©finitive du film Quelques annĂ©es ont passĂ© ». Nathalie, qui a Ă©pousĂ© Baptiste, Ă©voquera, dans un dialogue absent des avant-textes, six annĂ©es » de vie commune. Nous pourrions donc bien ĂȘtre en 1823, date Ă  laquelle FrĂ©dĂ©rick commence Ă  rĂ©pĂ©ter L'Auberge des Adrets au théùtre de l'Ambigu. Mais peu de temps aprĂšs, nous nous retrouvons aux Funambules oĂč est jouĂ©e la pantomime du Marchand d'habits, créée, elle, en 1842 et saluĂ©e par l'article de ThĂ©ophile Gautier Shakespeare aux Funambules », dans La Revue de Paris, article auquel il est fait allusion dans le dialogue 9. Puis on assiste Ă  une reprĂ©sentation d'Othello, avec FrĂ©dĂ©rick dans le rĂŽle titre, que l'acteur a jouĂ© Ă  l'OdĂ©on en 1830. D'autre part, le scĂ©nario original s'achĂšve sur le meurtre par Deburau du marchand d'habits, inspirĂ© par un fait rĂ©el au cours d'une promenade avec sa femme, Deburau et sa compagne furent insultĂ©s par un jeune homme ; le mime rossa le voyou Ă  coups de canne et le tua. Cela se passait le 18 avril 1836 et ce serait l'idĂ©e de dĂ©part des Enfants du paradis 10 Jean-Louis Barrault, qui rĂȘvait d'incarner le mime, ayant racontĂ© Ă  PrĂ©vert et CarnĂ© le meurtre involontaire commis par Deburau, le procĂšs retentissant qui s'ensuivit, la curiositĂ© de l'entendre pour la premiĂšre fois, son acquittement. Ce fait-divers et ses consĂ©quences ne seront pourtant finalement pas reprĂ©sentĂ©s dans le film. Seul Lacenaire y commet un meurtre. AprĂšs une premiĂšre agression, inspirĂ©e des tentatives attestĂ©es de tuer des garçons de recette des banques au retour de leur tournĂ©e et qui Ă©chouĂšrent, il tue le comte de Montray et se laisse arrĂȘter ; en rĂ©alitĂ©, cette arrestation se situe en fĂ©vrier 1835 et sanctionne l'assassinat de la veuve Chardon. La seconde Ă©poque du film concentre donc des faits qui se sont produits entre 1823 et 1842. Somme toute, les sources auxquelles PrĂ©vert et CarnĂ© ont puisĂ© sont nombreuses. Pour Lacenaire, PrĂ©vert s'est servi des mĂ©moires du cĂ©lĂšbre assassin, ainsi que de divers documents publiĂ©s sur son procĂšs, ses conversations en prison et ses oeuvres 11. Le personnage semble l'avoir intĂ©ressĂ©, bien avant la rĂ©daction du scĂ©nario. Un texte, d'abord publiĂ© en 1937 puis repris dans Paroles, Le retour au pays » 12, en tĂ©moigne il prend pour point de dĂ©part la prĂ©diction funeste faite Ă  Lacenaire par son pĂšre – Tu pĂ©riras sur l'Ă©chafaud » – qui aurait, selon le criminel lui-mĂȘme, conditionnĂ© toute sa vie. L'intrusion de Lacenaire dans la loge de FrĂ©dĂ©rick est inspirĂ©e par une de ses conversations en prison rapportĂ©e dĂšs 1836. Lacenaire demande Ă  FrĂ©dĂ©rick de lui prĂȘter de l'argent, en lui disant que c'est une question de vie ou de mort ». L'acteur, endettĂ© mais prodigue, partage avec cet inconnu une somme qu'il a gagnĂ©e Ă  la loterie. FrĂ©dĂ©rick veut alors en savoir un peu plus sur l'Ă©trange personnage Ă  qui il vient de rendre ce service ... entre nous, lui demande-t-il, cette histoire d'argent, c'Ă©tait vraiment une question de vie ou de mort ! » Lacenaire rĂ©pond Oui, pour vous». Or, le vrai Lacenaire raconte ĂȘtre allĂ© trouver Scribe et lui avoir dit Je n'ai pas le sou, voulez-vous me prĂȘter un peu d'argent ? M. Scribe prĂȘta, commente Lacenaire [...] Si Monsieur Scribe m'avait refusĂ© Monsieur Scribe ne ferait plus aujourd'hui ni opĂ©ras ni comĂ©dies» 13. Les circonstances de l'assassinat du comte de Montray, inventĂ© par PrĂ©vert, sont, elles, puisĂ©es dans une dĂ©claration du criminel. InterrogĂ© par la police sur ce qu'il avait fait le jour de la tentative d'assassinat d'un caissier, le vrai Lacenaire avait dit avoir Ă©tĂ© aux Bains Turcs. C'est dans ce dĂ©cor pittoresque que le personnage du film trucide le comte. Marcel Herrand qui incarne le personnage dans le film, a bien fait passer la complexitĂ© de cet homme Ă©trange, qui soigne son apparence mais qui, malgrĂ© son allure posĂ©e, distinguĂ©e et polie, son air indiffĂ©rent Ă  tout, peut se jeter soudain sur sa proie et la tuer. Une jeune femme, Garance, est la seule Ă  ne pas avoir peur de lui et Ă  se moquer ouvertement de ses idĂ©es sinistres, de sa fatuitĂ©. L'orgueil du personnage est tout Ă  fait conforme Ă  ce qu'Ă©tait celui de l'homme rĂ©el. En prison, il dit Ă  un greffier prĂ©sent Monsieur Victor Hugo a fait un beau livre sur le dernier jour d'un condamnĂ©. Eh bien ! je suis sĂ»r que si on m'en laissait le temps, je l'enfoncerais... Et cependant quoi qu'on en dise, Monsieur Hugo a bien du talent! » 14 Peut-ĂȘtre a-t-on exagĂ©rĂ© la part d'identification de PrĂ©vert au personnage de Lacenaire 15. Mais on voit aisĂ©ment dans quelles manifestations de sa rĂ©volte il pouvait se retrouver. Les confidences du vrai Lacenaire – Je n'ai pas cru en Dieu, alors que mes professeurs, ma mĂšre, ma bonne nourrice et les prĂȘtres m'en parlaient tous les jours. À 12 ans j'avais dĂ©jĂ  beaucoup pensĂ© ; Ă  12 ans je me croyais un philosophe, un athĂ©e [...] ma mĂšre [...] me prĂ©fĂ©rait mon frĂšre » 16 – nourrissent les propos du personnage de PrĂ©vert Quand j'Ă©tais enfant, j'Ă©tais dĂ©jĂ  plus lucide, plus intelligent que les autres... "Ils" ne me l'ont pas pardonnĂ©, ils voulaient que je sois comme eux... Levez la tĂȘte Pierre-François... regardez-moi... baissez les yeux... Et ils m'ont meublĂ© l'esprit de force, avec des livres... de vieux livres haussant les Ă©paules... Pourquoi tant de poussiĂšre dans une tĂȘte d'enfant ? Quelle belle jeunesse, vraiment ! Mon pĂšre qui me dĂ©testait... ma mĂšre, ma digne mĂšre, qui prĂ©fĂ©rait mon imbĂ©cile de frĂšre et mon directeur de conscience qui me rĂ©pĂ©tait sans cesse "Vous ĂȘtes trop fier, Pierre François, il faut rentrer en vous-mĂȘme ! Avec un petit rire glacial Alors je suis rentrĂ© en moi-mĂȘme... mais je n'ai jamais pu en sortir ! Jolie souriciĂšre ! son rire redouble Les imprudents ! Ils m'ont laissĂ© tout seul avec moi-mĂȘme... et pourtant ils me dĂ©fendaient les mauvaises frĂ©quentations... ». PrĂ©vert se sert donc des dĂ©clarations rĂ©elles de Lacenaire, les dĂ©veloppe, les réécrit, les interprĂšte avec humour. Il fait passer par sa bouche une critique du bourrage de crĂąne et de la volontĂ© de faire entrer les enfants dans un moule, un rejet de la religion, une insoumission, une ironie qui sont les siens. Mais l'auto-satisfaction de Lacenaire, ce ridicule qu'il a de se prendre toujours au sĂ©rieux, son mĂ©pris et sa haine des autres, des femmes en particulier, sont autant de signes de la distance qui sĂ©pare PrĂ©vert du personnage. À trop identifier l'un Ă  l'autre on risquerait de se tromper ainsi, le dĂ©dain du drame, qu'affiche celui-ci, et son goĂ»t pour le vaudeville, conformes aux goĂ»ts exprimĂ©s par le vĂ©ritable Lacenaire, ne sont pas partagĂ©s par PrĂ©vert. Ses notes prĂ©paratoires sur le personnage en apportent la preuve Comme tous les assassins, il "retarde" ... son esthĂ©tique est pĂ©rimĂ©e ». Les auteurs du film ont d'abord pensĂ© opposer Lacenaire Ă  Deburau, en montrant leurs procĂšs parallĂšles. Mais c'est moins Lacenaire, finalement, qui est confrontĂ© au mime, que FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre. IncarnĂ©s par eux, deux arts, en apparence trĂšs diffĂ©rents, se cĂŽtoient. Les deux acteurs sont Ă  la fois amis et rivaux, sur scĂšne comme dans la vie, avec un mĂȘme besoin d'Ă©chapper Ă  la rĂ©alitĂ©, chacun Ă  sa maniĂšre Baptiste rĂȘve et s'invente des bonheurs, FrĂ©dĂ©rick vit la vie de quantitĂ© de personnages. La sĂ©quence qui les met pour la premiĂšre fois en prĂ©sence montre leur amour commun du théùtre mais aussi la conception diffĂ©rente qu'ils en ont au long monologue de FrĂ©dĂ©rick, sĂ»r de son talent, rĂ©pondent les silences de Baptiste, et ses doutes. FrĂ©dĂ©rick incarnĂ© par Pierre Brasseur dans le film, joue tout le temps, mĂȘme quand il ne joue pas [...] rappelez-vous que ce soir vous avez trinquĂ© avec Jules CĂ©sar ! » dit-il Ă  Baptiste et Ă  quelques clochards invitĂ©s Ă  leur table. Jules CĂ©sar ou un autre... Charles le TĂ©mĂ©raire, Attila, Henri IV, la poule au pot ! [...] Tu ne crois tout de mĂȘme pas, dit-il Ă  Baptiste, que je vais finir mes jours aux Funambules, dans une peau de lion ! Un lion qui n'a mĂȘme pas le loisir de rugir... quel supplice quand on a comme moi, lĂ -dedans, grande claque sur le coeur tout un orchestre, toute une mĂ©nagerie, tout un monde ! » Baptiste paraĂźt plus modeste Je ne voudrais pas seulement les faire rire, je voudrais aussi les Ă©mouvoir, leur faire peur et les faire pleurer... Ce sont de pauvres gens et moi je suis comme eux, je les aime, je les connais, leur vie est toute petite mais ils ont de grands rĂȘves, et je voudrais raconter leurs rĂȘves, leur petite vie, leurs joies, leurs malheurs, leurs petits ennuis ! » PrĂ©vert a pu trouver chez Jules Janin cette idĂ©e d'une affinitĂ© de Deburau avec le peuple ... toujours pauvre comme est le peuple, c'est le peuple que Deburau reprĂ©sente dans tous ses drames ; il a surtout le sentiment du peuple... » 17. Dans ce dialogue, on le comprend, c'est paradoxalement Ă  travers les paroles de Baptiste, le silencieux, que PrĂ©vert, plutĂŽt bavard dans la vie, Ă  l'instar de FrĂ©dĂ©rick, fait entendre sa voix. Alors que FrĂ©dĂ©rick cherche d'abord, dans le mĂ©tier d'acteur, un plaisir narcissique, Baptiste veut traduire les Ă©motions des autres, atteindre un public populaire. L'attitude des deux acteurs Ă  l'Ă©gard de la femme qu'ils dĂ©sirent, Garance, est un peu Ă  l'image de leur maniĂšre de concevoir le théùtre. Baptiste la regarde, Ă©bloui, sans voix, FrĂ©dĂ©rick lui lance des tirades de son cru ; une fois de plus, la balance penchera du cĂŽtĂ© du premier, mĂȘme si la rĂ©ussite couronne d'abord le second ; Baptiste aime plus profondĂ©ment et c'est lui qui sera aimĂ©. Garance incarnĂ©e Ă  l'Ă©cran par l'inoubliable Arletty rĂ©unit en elle plusieurs types de femmes, rĂ©elles et imaginaires, du XIX° siĂšcle, ou inventĂ©es par des auteurs du XIX°. À 15 ans, Garance s'est retrouvĂ©e toute seule et a dĂ» survivre. On devine ce que cela peut signifier. Mais elle a plus d'un Gavroche fĂ©minin – du moins dans la PremiĂšre Ă©poque » du film – que de Fantine. Elle a aussi un cĂŽtĂ© Esmeralda, amie des truands les plus redoutables, Ă  l'aise dans la rue, dĂ©sirĂ©e par tous les hommes, hommes du peuple comme bourgeois et aristocrates. La scĂšne qui a lieu au Rouge-Gorge, taverne mal famĂ©e et repaire de Lacenaire et de ses amis, oĂč un aveugle » retrouve la vue, a d'ailleurs quelque ressemblance avec celles de la Cour des Miracles 18. Moins naĂŻve et farouche, cependant, que l'hĂ©roĂŻne de Notre-Dame de Paris, Garance hĂ©rite aussi de Carmen. La premiĂšre fois qu'elle aperçoit Baptiste, boulevard du Temple, elle lui jette une fleur. Et celui-ci garde prĂ©cieusement cette fleur, la serre sur son coeur, la respire, pareil Ă  JosĂ© qui s'enivre de l'odeur de la fleur jetĂ©e par Carmen. Or Deburau, l'amour de Garance, est enfant de BohĂšme, sans mĂ©taphore... Garance n'a pas, toutefois, la fĂ©rocitĂ© de l'hĂ©roĂŻne de Bizet, mais comme elle, elle entend bien vivre comme il lui plaĂźt. Le scĂ©nariste inverse les rĂŽles traditionnellement impartis Ă  l'homme et Ă  la femme, non seulement au XIX° siĂšcle mais au moment oĂč il Ă©crit son scĂ©nario en plein rĂ©gime de Vichy. Si la mĂšre de Garance semble avoir Ă©tĂ© une bonne mĂšre, la femme n'est ni rĂ©duite Ă  ce rĂŽle ni idĂ©alisĂ©e dans cette fonction. Nathalie, qui aura un petit garçon avec Baptiste, utilise Ă  plusieurs reprises son fils comme moyen de chantage. Garance s'offre Ă  Baptiste sans aucun sens de ce que l'on appellerait immoralitĂ© ou pĂ©chĂ©, sans hypocrisie, sans respect des conventions sociales. Et paradoxalement, c'est Baptiste, l'homme, qui est le plus paralysĂ© par ces conventions. DĂ©concertĂ© par les avances de Garance, il n'ose y rĂ©pondre et prend la fuite. Cette femme du peuple devient, dans la seconde Ă©poque, ce que l'on appelait au XIX° siĂšcle une demi-mondaine. Mais il ne s'agit pas pour PrĂ©vert d'en faire une Marguerite Gautier qui devra ou voudra expier ses fautes. Elle n'a pas choisi le luxe par intĂ©rĂȘt mais pour Ă©chapper Ă  une erreur judiciaire. Garance, comme PrĂ©vert, ne s'empĂȘtre pas dans des notions de faute ou de repentir et elle conserve, d'une certaine maniĂšre, sa libertĂ©, refusant de dire au comte qu'elle l'aime, s'offrant une nuit avec Baptiste. Garance est donc trĂšs en avance sur son temps. Elle est la femme telle que la rĂȘve PrĂ©vert elle lui ressemble d'ailleurs comme une soeur, avec sa maniĂšre de pratiquer l'ironie, de jouer avec les mots, de dĂ©fendre sa libertĂ©, d'aimer l'amour. Une reprĂ©sentation de la sociĂ©tĂ© de la Restauration et de la monarchie de Juillet ne saurait se passer d'un personnage d'aristocrate et c'est le comte Édouard de Montray incarnĂ© par Louis Salou dans le film qui en fait figure. L'auteur de Tentative de description d'un dĂźner de tĂȘtes Ă  Paris-France » 19, dont la conscience de classe n'est plus Ă  dĂ©montrer, concentre sur lui ses traits les plus acĂ©rĂ©s. Dans son scĂ©nario immĂ©diatement prĂ©cĂ©dent 20, il avait dĂ©jĂ  dressĂ© le portrait d'un moderne et pervers chĂątelain, emblĂ©matiquement prĂ©nommĂ© Patrice. Le comte assiste Ă  plusieurs des spectacles qui se donnent, avec quelques-uns de ses amis, parmi lesquels Georges, particuliĂšrement stupide et bornĂ©, ce qui permet Ă  PrĂ©vert, d'esquisser une symbolique lutte des classes entre les riches spectateurs des avant-scĂšnes et ceux du parterre et du paradis » et d'opposer l'ignorance distinguĂ©e des uns Ă  l'authentique et instinctif amour du théùtre des autres. Cette opposition a pu lui ĂȘtre inspirĂ©e par l'article de Gautier. Voici ce qu'Ă©crit Gautier ... quel théùtre et surtout quels spectateurs ! VoilĂ  un public ! et non pas tous ces ennuyĂ©s aux gants plus ou moins jaunes, tous ces feuilletonnistes usĂ©s, excĂ©dĂ©s, blasĂ©s, toutes ces marquises de la rue du Helder, occupĂ©es seulement de leurs toilettes et de leurs bouquets ; – un public en veste, en blouse, en chemise, sans chemise souvent, les bras nus, la casquette sur l'oreille... ». PrĂ©vert, lui, fait dire au directeur des Funambules ... quel public ! –il est pauvre bien sĂ»r mais il est en or mon public ! Tenez, regardez-les lĂ -haut au paradis. » Et le scĂ©nariste dĂ©crit ainsi ce public populaire EntassĂ©s les uns contre les autres, ils ont tombĂ© la veste, ils cassent la croĂ»te, ils boivent de la biĂšre, ils s'esclaffent la bouche pleine et se donnent de grandes claques sur l'Ă©paule, ils embrassent les filles... ». Enfin, Gautier trouve ce peuple naĂŻf comme un enfant », ce qui pourrait bien avoir suscitĂ© en partie le titre du film Les Enfants du paradis, le terme de paradis » pour dĂ©signer les spectateurs perchĂ©s tout en haut ayant Ă©tĂ©, selon Marcel CarnĂ©, empruntĂ© Ă  Jules Janin 21. L'opposition sociale se double d'une opposition esthĂ©tique. Le dĂ©but de cette deuxiĂšme partie montre donc FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre rĂ©pĂ©tant L'Auberge des Adrets, mĂ©lodrame de messieurs Anthieu en rĂ©alitĂ© Benjamin Antier, Saint-Amand et Polygathe en rĂ©alitĂ© Polyanthe, et se moquant ouvertement de la piĂšce face aux auteurs. On sait que le vrai FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre trouva l'oeuvre insipide et qu'il voulut la corser au lieu de faire de Macaire un personnage sinistre et terrifiant, il dĂ©cida de le rendre drĂŽle et cynique, de le faire plaisanter en commettant ses crimes, avec la complicitĂ© de Firmin devenu CĂ©lestin sous la plume de PrĂ©vert, qui devait jouer le rĂŽle de Bertrand, compĂšre de Robert Macaire. Ils rĂ©servĂšrent leurs principaux effets pour la premiĂšre, le 2 juillet, mais leur comportement pendant la rĂ©pĂ©tition inspira dĂ©jĂ , explique Robert Baldick, biographe de FrĂ©dĂ©rick, de sĂ©rieuses inquiĂ©tudes aux auteurs et autres acteurs » 22. Au cours de la rĂ©pĂ©tition qui est montrĂ©e dans le film, l'acteur, tout en faisant des apartĂ©s, suit Ă  peu prĂšs le texte de la piĂšce, pestant cependant contre elle, ce qui provoque la colĂšre des trois auteurs. Leur fureur ne fait que s'amplifier le soir de la premiĂšre, oĂč FrĂ©dĂ©rick ne respecte plus du tout leur texte et les ridiculise en public. Ils iront jusqu'Ă  le provoquer en duel. En rĂ©alitĂ©, il semble qu'ils aient plutĂŽt bien acceptĂ© les modifications de FrĂ©dĂ©rick qui fit de leur oeuvre un immense succĂšs. Mais PrĂ©vert dĂ©verse sur ces malheureux auteurs quelques-unes des impertinences fameuses de l'acteur. Dans son livre sur FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre, Silvain raconte, par exemple, que Victor SĂ©jour, mĂ©content de la maniĂšre dont FrĂ©dĂ©rick interprĂ©tait une de ses piĂšces s'Ă©tait Ă©criĂ© Vous marchez dans ma prose, monsieur ! », Ça porte-bonheur, monsieur ! » 23 aurait ripostĂ© l'acteur ; protestation des auteurs et rĂ©plique Ă  peu prĂšs identiques dans le scĂ©nario. La plupart des rĂ©parties canularesques de l'acteur sont cependant inventĂ©es par PrĂ©vert qui semble s'amuser tout autant que FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre Ă  ce jeu de massacre. Dans le scĂ©nario, Lacenaire applaudit Ă  tout rompre quand FrĂ©dĂ©rick dĂ©clame Vraiment, tant d'histoires pour une trentaine d'escroqueries et cinq ou six malheureux assassinats... [...] DĂ©signant les spectateurs amusĂ©s Vous ne croyez pas qu'en cherchant bien, parmi tout ce monde-lĂ  », vous n'en trouveriez pas de plus coupables que nous ? » Cette question et les applaudissements enthousiastes de l'assassin disparaĂźtront du film oĂč il dit seulement Ă  FrĂ©dĂ©rick qu'il a trouvĂ© le spectacle intĂ©ressant ». Faut-il y voir l'effet d'une censure ou d'une autocensure qui aurait reculĂ©, pour un film tournĂ© pendant l'Occupation, devant l'humour noir et terriblement allusif de la rĂ©plique originale ? Les scĂšnes qui montrent la dĂ©sintĂ©gration du mĂ©lodrame, jusque-lĂ  trĂšs en vogue, et l'Ă©mergence du théùtre de Shakespeare reflĂštent les dĂ©bats esthĂ©tiques des annĂ©es 1820. Mais en dehors des reprĂ©sentations donnĂ©es par des troupes anglaises Ă  Paris, on jouait surtout Shakespeare dans la traduction de Ducis. C'est dans cette adaptation, selon toute vraisemblance, que FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre interprĂ©ta Othello, non pas sur le boulevard du Temple 24, mais Ă  l'OdĂ©on, en 1830. PrĂ©vert aime trop Shakespeare pour faire dire Ă  l'acteur un texte aussi infidĂšle que celui de Ducis, au langage chĂątiĂ©, montrer un Othello sans mouchoir ni oreiller pour Ă©touffer DesdĂ©mone et qui, dans l'ultime version de Ducis, se laisse mĂȘme convaincre de l'innocence de sa douce Ă©pouse. Il semble partir du principe que si FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre avait eu Ă  sa disposition une bonne traduction, c'est celle qu'il aurait jouĂ©e. Il lui fera donc interprĂ©ter Othello dans la traduction de François-Victor Hugo, revue par Christine et RenĂ© Lalou en 1939 ! AprĂšs la reprĂ©sentation, l'acteur et l'assassin ont une discussion trĂšs vive avec Édouard de Montray et ses amis qui dĂ©fendent la sobriĂ©tĂ© et le bon goĂ»t. FrĂ©dĂ©rick et Lacenaire vantent Shakespeare, le mĂ©lange des genres, et disent que le théùtre ne doit pas donner une vision Ă©dulcorĂ©e de la vie. Ce que suggĂšre aussi le scĂ©nariste, c'est que les partisans du classicisme, qui ne veulent pas voir de meurtre sur scĂšne, ne sont pas nĂ©cessairement les moins violents dans la rĂ©alitĂ©. Édouard de Montray rĂȘve de tuer Frederick parce qu'il croit que Garance en est Ă©prise, adore les combtas de coqs, provoque des gens en duel mĂȘme – et peut-ĂȘtre surtout – quand il se sait le plus fort. Le comte accuse Shakespeare d'avoir dĂ©butĂ© dans les lettres en dĂ©coupant de la viande sur l'Ă©tal d'un boucher ! [...] Ce qui expliquerait, ajoute-t-il, le cĂŽtĂ© bestial et forcenĂ© de son théùtre et pourquoi il obtint, de son vivant, tant de succĂšs auprĂšs des dĂ©bardeurs, des charretiers... » Or, dans Tentative de description d'un dĂźner de tĂȘtes Ă  Paris-France », PrĂ©vert avait fait intervenir, au cours d'un repas mondain, un homme, trĂšs Ă©videmment son porte-parole, qui venait troubler la rĂ©ception en parlant de la misĂšre du peuple et en annonçant une rĂ©volution. Et cet homme disait je parle ici pour les grabataires, je monologue pour les dĂ©bardeurs... » Ce public dĂ©daignĂ© par Édouard de Montray est donc le public que revendique PrĂ©vert. De mĂȘme, certains de ses scĂ©narios, tels ceux du Quai des brumes ou du Jour se lĂšve, ont Ă©tĂ© qualifiĂ©s de nausĂ©eux par une certaine critique. Parce qu'ils donnaient une vision sombre et crue de la rĂ©alitĂ© sociale. Il s'inscrit ici dans la lignĂ©e du combat menĂ© sous l'Ă©tendard de Shakespeare, par les romantiques, en particulier Hugo qui rapporte trĂšs symboliquement la rĂ©putation faite Ă  Shakespeare d'avoir Ă©tĂ© garçon boucher 25. La violence et la trivialitĂ© de Shakespeare, on les avait dĂ©jĂ  rencontrĂ©es quelques sĂ©quences auparavant, dans la pantomime Marchand d'habits, jouĂ©e par Baptiste, et comparĂ©e par Gautier Ă  du Shakespeare. Il semble qu'en rĂ©alitĂ© Deburau n'ait pas interprĂ©tĂ© cette oeuvre. Mais la lĂ©gende le soutint quelque temps et le scĂ©nariste choisit la lĂ©gende, car elle lui permet une fois encore de dĂ©fendre un théùtre oĂč les personnages sont en proie aux passions les plus exacerbĂ©es et qui transpose la rĂ©alitĂ© sociale dans toute sa cruautĂ©. Marchand d'habits interprĂ©tĂ© par Baptiste peut-ĂȘtre ainsi mis en parallĂšle avec Othello interprĂ©tĂ© par FrĂ©dĂ©rick, comme si, chacun des deux acteurs, Ă  sa maniĂšre, avait Ă©voluĂ© dans le mĂȘme sens. Par la voix de FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre, et par celle de Lacenaire, qui semble, cette fois, avoir dĂ©passĂ© son goĂ»t pour le vaudeville, PrĂ©vert clame l'absurditĂ© des classifications par genres. Il ne rend pas seulement hommage Ă  Shakespeare, il poursuit aussi l'apologie, dĂ©jĂ  explicite Ă  travers les propos de Baptiste, d'un théùtre populaire, prenant comme personnages principaux des gens du peuple et pas systĂ©matiquement, comme dans les tragĂ©dies classiques, ceux qui dĂ©tiennent le pouvoir ; un théùtre non seulement Ă©crit pour le peuple mais par des hommes du peuple, comme ce nommĂ© Shakespeare Ă  qui l'aristocrate reproche implicitement d'avoir Ă©tĂ© garçon-boucher. Bien sĂ»r, expliquer la bestialitĂ© et la fureur qui rĂšgnent dans les drames de Shakespeare par ses origines sociales est dĂ©risoire car il n'est pas besoin d'aller chercher dans les abattoirs le modĂšle des sanglantes boucheries humaines auxquelles se livrent les tyrans. Mais si Shakespeare a Ă©tĂ© boucher, c'est une preuve que les bouchers peuvent ĂȘtre gĂ©niaux. Tout en faisant Ă©cho si nous sommes en 1830, Ă  travers la joute verbale entre FrĂ©dĂ©rick et Lacenaire, d'un cĂŽtĂ©, Édouard de Montray et ses amis, de l'autre, au combat qui oppose romantiques et classiques, dans la bataille d' Hernani, par exemple, le scĂ©nariste Ă©voque sa propre expĂ©rience. Rappelons que de 1932 Ă  1936, il a Ă©crit des piĂšces, sketches et choeurs parlĂ©s pour le groupe Octobre, troupe d'acteurs amateurs qui allait sur les lieux de travail des ouvriers, dans leurs fĂȘtes et jusque dans les rues, pour encourager les revendications, mettre en scĂšne et ridiculiser les exploiteurs et leurs complices. Ce combat, il n'y a pas renoncĂ© dans les annĂ©es 1940 mais il le transpose autant que possible sur les Ă©crans de cinĂ©ma. Le projet d'un art pour le peuple et miroir du peuple reste le sien, que ce soit dans LumiĂšre d'Ă©tĂ© ou Les Enfants du paradis et toujours ce peuple trouve en face de lui une caste ou une classe, imbue de ses prĂ©jugĂ©s comme de ses privilĂšges. Le scĂ©nariste montre donc le XIX° siĂšcle, qu'Ă  l'Ă©vidence, il aime, comme un moment d'intense bouillonnement esthĂ©tique, oĂč l'art se libĂšre des carcans du passĂ© et ne s'adresse plus seulement Ă  une Ă©lite mais aussi – et mĂȘme surtout – Ă  un public populaire. Que la fiction l'emporte totalement sur l'Histoire ou qu'elle emprunte Ă  l'histoire sans vraiment s'y soumettre, le scĂ©nario des Enfants du Paradis porte la trace du temps de son Ă©criture. Une des preuves de ce que j'avance n'a jamais, Ă  ma connaissance, Ă©tĂ© remarquĂ©e. Dans un passage disparu du film, mais connu depuis sa publication dans le numĂ©ro de L'Avant-ScĂšne consacrĂ© en 1967 aux Enfants du paradis, Lacenaire dĂ©clare avoir entendu en rĂȘve au lieu de Marchand d'habits... avez-vous des habits Ă  vend'? », Marchand d'amis... avez-vous des amis Ă  vendre ? » et il demande Ă  l'intĂ©ressĂ© s'il est vrai qu'il a ses petites entrĂ©es rue de JĂ©rusalem », autrement dit Ă  la prĂ©fecture de police ; calomnie », rĂ©pond le marchand d'habits, aussi vrai qu'on m'appelle... » et Lacenaire de complĂ©ter qu'on t'appelle Mouton-blanc, dit le FrisĂ©, dit Vend-la-mĂšche, dit Treize-Ă -table ». L'allusion Ă©tait transparente et se doublait d'une troublante mise en cause, si l'on prend conscience que ce rĂŽle d'indicateur prĂ©sumĂ© Ă©tait destinĂ© Ă  Robert Le Vigan, qui abandonna le tournage pour suivre CĂ©line Ă  Sigmaringen... Et quand le paisible Baptiste, jetĂ© Ă  travers le vitrage d'un bistrot par Avril, complice et ami de Lacenaire, se relĂšve et dĂ©coche un coup de talon dans le ventre Ă  son agresseur, peut-ĂȘtre reprĂ©sente-t-il allĂ©goriquement le coup de poing qu'il est arrivĂ© Ă  PrĂ©vert, pacifiste, de donner aux plus arrogants des collaborationnistes sans parler des coups de main qu'il donna Ă  ses amis rĂ©sistants 26. Quant Ă  Garance, nous avons vu Ă  quel point elle est Ă  la fois de son siĂšcle et en avance sur lui. Dans ce XIX° siĂšcle mythique, qui s'est forgĂ© Ă  la lecture des romans de Victor Hugo, d'Alexandre Dumas et d'EugĂšne Sue, la pantomime prĂ©figure le cinĂ©ma muet ; le mĂ©lodrame subverti et le drame de Shakespeare, le cinĂ©ma parlant et ses potentialitĂ©s. PrĂ©vert rend en mĂȘme temps hommage aux grands interprĂštes que sont Deburau – ses silences et sa gestuelle –, FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre – son goĂ»t des mots et sa verve – et aux acteurs de cinĂ©ma dont ils sont les modĂšles, comme Chaplin, Barrault, Gabin ou Pierre Brasseur. De mĂȘme que la scĂšne se fait miroir de la vie et que la vie imite la scĂšne, le XIX° siĂšcle des Enfants du Paradis se reflĂšte au miroir du XX°, et inversement. DaniĂšle GASIGLIA-LASTER 1 Par les Ă©ditions Jean-Pierre de Monza avec des prĂ©sentations et analyses de Bernard ChardĂšre, 1999. 2 PrĂ©vert ayant signĂ© le scĂ©nario et les dialogues du film tournĂ©, on peut considĂ©rer ceux-ci comme le dernier Ă©tat du texte. 3 Les Enfants du paradis, Ă©ditions Jean-Pierre de Monza, 2000, p. 53 4 Jules Janin, Deburau, Histoire du Théùtre Ă  quatre sous pour faire suite Ă  l'Histoire du Théùtre français, Librairie des bibliophiles, 1881, p. 22-24. 5 Il fut probablement surnommĂ© ainsi Ă  cause des rĂŽles de brigands qu'il jouait Ă  ses dĂ©buts sous le nom de Baptiste avant d'incarner Pierrot. 6 Mais seules deux pages manuscrites du scĂ©nario sont reproduites par les Ă©ditions Jean-Pierre de Monza. Il nous est donc impossible de vĂ©rifier cette hypothĂšse. Le scĂ©nario publiĂ© en 1967 par L'Avant-scĂšne cinĂ©ma n° 72-73, donnait aussi les dates 1827-1828 », Ă  partir d'un dĂ©coupage technique » dactylographiĂ©. 7 Au dĂ©part, PrĂ©vert avait donnĂ© Ă  Deburau, LemaĂźtre et Lacenaire des noms fictifs Taburau, Leprince et MĂ©cenaire. Cette dĂ©formation de Chiarigny en Barrigni est sans doute un reliquat. 8 RĂŽle qui figurait dans une pantomime Ă  trois personnages, Pyrame et ThisbĂ©. 9 La Revue de Paris, Nouvelle SĂ©rie, annĂ©e 1842, Bruxelles. Cette pantomime de Cot d'Ordan, selon toute probabilitĂ©, n'a pas, en rĂ©alitĂ©, Ă©tĂ© jouĂ©e par Deburau voir Tristan RĂ©my, Jean-Gaspard Deburau, Paris, 1954, Elle eut un tel succĂšs qu'elle fut adaptĂ©e par Catulle MendĂšs Ă  la fin du siĂšcle. 10 À Nice, en janvier 1943. 11 Entre autres Lacenaire aprĂšs sa condamnation. Ses conversations intimes. Ses poĂ©sies. Sa correspondance. Un drame en 3 actes, Marchant Ă©diteur, 1836, et Lacenaire, ses crime, son procĂšs et sa mort, suivis de ses poĂ©sies et chansons et de documents authentiques et inĂ©dit, recueillis par Victor Cochinat, Paris, Jules LaisnĂ©, 1857. 12 Voir Jacques PrĂ©vert, Oeuvres complĂštes, Gallimard, la PlĂ©iade », 1992, Edition prĂ©sentĂ©e, Ă©tablie et annotĂ©e par DaniĂšle Gasiglia-Laster et Arnaud Laster. 13 Lacenaire aprĂšs sa condamnation, 14 Lacenaire, ses crimes, 15 J'ai dit moi-mĂȘme qu'il Ă©tait une sorte de nĂ©gatif de PrĂ©vert voir DaniĂšle Gasiglia Laster, Jacques PrĂ©vert, celui qui rouge de coeur », SĂ©guier, 1994, 16 Lacenaire aprĂšs sa condamnation, 17 Jules Janin, Deburau, 18 Jacques PrĂ©vert adaptera en 1956 Notre-Dame de Paris de Victor Hugo pour Jean Delannoy. 19 Voir Jacques PrĂ©vert, Paroles, dans Oeuvres complĂštes, Ă©dition Ă©tablie, prĂ©sentĂ©e et annotĂ©e par DaniĂšle Gasiglia-Laster et Arnaud Laster, 20 lumiĂšre d'Ă©tĂ©, rĂ©alisation de Jean GrĂ©millon, tournĂ© d'aoĂ»t 1942 Ă  janvier 1943. 21 Janin indique en effet vous n'aurez Ă  payer que [...] 1 franc aux avant-scĂšnes, si vous ĂȘtes riche ; / Et 4 sous au paradis, si vous ĂȘtes avare ou pauvre » Deburau, ; et le Cassandre de PrĂ©vert Un franc aux avant-scĂšnes si vous ĂȘtes fortunĂ© et quatre sous au Paradis si vous ĂȘtes pauvre ou momentanĂ©ment gĂȘnĂ© » Les Enfants du paradis, 22 Robert Baldick, la Vie de FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre, DenoĂ«l, 1961, 23 Voir Silvain, FrĂ©dĂ©rick LemaĂźtre, Librairie FĂ©lix Alcan, 1930, p. 153. 24 Dans son Ă©tude critique » — si souvent contestable — des Enfants du paradis Nathan, 1992, GeneviĂšve Sellier pense que cette transposition de lieu par PrĂ©vert et CarnĂ© leur permet d'accrĂ©diter l'idĂ©e que la vraie culture s'Ă©tait tout entiĂšre rĂ©fugiĂ©e dans ce lieu synonyme de culture populaire ». 25 Victor Hugo, William Shakespeare, PremiĂšre partie, livre I, III, dans Oeuvres ComplĂštes, critique, coll. Bouquins », Laffont, 2002, 26 Peut-ĂȘtre aussi la scĂšne transpose-t-elle un Ă©nigmatique radio-dĂ©fenestrage », que PrĂ©vert situe en 1942 et ce qui s'ensuivit voir Oeuvres ComplĂštes, LIENS La page du site Presses de la Sorbonne Nouvelle Une critique de l'ouvrage sur le site La Revue d’histoire du XIXe siĂšcle. Letemps qui nous est accordĂ© sur Terre est une source prĂ©cieuse. Il faut vivre le moment prĂ©sent intensĂ©ment. Semer les graines de douceur et de bonheur autour de soi. Proclamer la paix et l'amour, sans condition. Ainsi, lorsque le moment sera venu, notre mission de vie, aura Ă©tĂ© accomplie. - Une citation de JoĂ«lle Laurencin Accueil Le MAG Quarante ans dĂ©jĂ  que Jacques PrĂ©vert est mort. Le poĂšte, formidablement populaire, est toujours appris Ă  l’école, son Ɠuvre, paradoxalement, mĂ©connue. Une Ɠuvre corrosive, rouge », engagĂ©e. Du cĂŽtĂ© des petites gens. Article rĂ©servĂ© aux abonnĂ©s Article rĂ©servĂ© aux abonnĂ©s Pour lire la suite de cet article Abonnez-vous Ă  partir de 1€ Ă  notre offre numĂ©rique. Sans engagement de durĂ©e. ESSAYER POUR 1€ Vous ĂȘtes dĂ©jĂ  abonnĂ© ou inscrit ? Se connecter L'info en continu 18h59 Lille Panne du mĂ©tro Ă  Lille la ligne 1 trĂšs impactĂ©e jusqu’à la fin du service 18h49 Tennis Video US Open Caroline Garcia franchit sans trembler le premier tour 18h35 Braderie de Lille Video Trois ans aprĂšs, la vraie Braderie de Lille fait son grand retour 18h34 France Lourde peine pour l’agresseur d’un gĂ©nĂ©raliste de SOS MĂ©decin Ă  Mulhouse 18h16 International Mission ArtĂ©mis avant un astronaute, un petit bout d’Europe vers la Lune Toute l'info en continu >
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Carole Aurouet est universitaire. Elle consacre une large partie de ses rĂ©flexions aux relations entre la littĂ©rature et le cinĂ©ma, et notamment Ă  partir de l’Ɠuvre de Jacques PrĂ©vert. A l’occasion de du 40Ăšme anniversaire de sa disparition, cet entretien permet de revenir sur la figure singuliĂšre de PrĂ©vert et sur le cheminement de Carole Aurouet. SĂ©bastien Rongier Quelle est l’histoire de votre rencontre avec PrĂ©vert ? Quelle dĂ©couverte ? L’école ? Un texte ? Un livre ? Une rĂ©plique de cinĂ©ma ? Une chanson ? Un passeur ? Un hasard ? Carole Aurouet C’est une rencontre en plusieurs Ă©pisodes, des rĂ©miniscences comme des instantanĂ©s, de plus en plus flous avec le temps
 Retour en arriĂšre, premiĂšre. Je dois avoir 7 ans. Rien de trĂšs original pour les enfants de ma gĂ©nĂ©ration, j’ai rencontrĂ© Jacques PrĂ©vert Ă  l’école primaire, apprenant ses poĂšmes en classe. Puis, je l’ai perdu de vue. Retour en arriĂšre, deuxiĂšme. Je dois avoir 18 ans. Je saisis Paroles dans la bibliothĂšque familiale, l’exemplaire avec en couverture la photographie du graffiti de BrassaĂŻ et les lettres manuscrites, couleur sang, qui gouttent. Du recueil tombe une copie double de petit format, Ă  petits carreaux 5x5. Une fois le papier un peu jauni dĂ©pliĂ©, apparaĂźt une Ă©criture enfantine tracĂ©es au crayon de grosses lettres, hĂ©sitantes, tremblotantes mĂȘme, tentent de se poser sur les lignes et interlignes. Pour faire le portrait d’un oiseau » et Le Cancre » sont les deux poĂšmes recopiĂ©s. Une consigne du maĂźtre ? Une initiative personnelle ? Sans doute la seconde hypothĂšse est-elle la plus vraisemblable, puisqu’un devoir de ce genre aurait Ă©tĂ© accompli dans un cahier, non sur une feuille volante. Retour en arriĂšre, troisiĂšme. J’ai 22 ans. Je dĂ©bute un Master 1 de Lettres Ă  l’universitĂ© Paris 3 – Sorbonne nouvelle. Je cherche un sujet qui allie mes deux passions en l’occurrence la littĂ©rature et le cinĂ©ma. Jacques PrĂ©vert m’apparaĂźt alors comme une Ă©vidence. Il est poĂšte. Il est scĂ©nariste. Et je me sens une communautĂ© de cƓur avec lui. TrĂšs vite, je cerne une erreur d’apprĂ©ciation le concernant, puis je dĂ©couvre le cimetiĂšre de projets avortĂ©s qui constitue aussi sa filmographie. Je commence par me focaliser sur un film Ă©crit par PrĂ©vert et son ami Pierre Laroche, rĂ©alisĂ© par Edmond T. GrĂ©ville Une femme dans la nuit. ConsidĂ©rĂ© comme perdu, aucune copie n’en subsistait disait-on, ce film attisait la curiositĂ© d’un grand nombre de cinĂ©philes. GrĂące aux tĂ©moignages recueillis et Ă  la presse de 1941, 1942 et 1943, j’ai pu effectuer une reconstitution de l’histoire de et autour de ce film. Et Ă  force de persĂ©vĂ©rance, j’en ai retrouvĂ© une copie
 Ă  Moscou ! J’ai alors dĂ©cidĂ© de poursuivre mes recherches sur ce que j’ai nommĂ© les scĂ©narios dĂ©tournĂ©s » de Jacques PrĂ©vert, c’est-Ă -dire des scĂ©narios restĂ©s sur le papier ou modifiĂ©s par d’autres et qu’il n’a pas signĂ©s, donnant lieu Ă  des films plus ou moins Ă©loignĂ©s de la partition d’origine. ÉcartĂ©s de leur destinĂ©e premiĂšre, partis dans une autre direction, ces Ă©crits cinĂ©matographiques ont donc Ă©tĂ© abandonnĂ©s ou mutilĂ©s. Les sortir de l’ombre en me lançant dans une entreprise de rĂ©habilitation de tout un pan du travail scĂ©naristique de PrĂ©vert, afin de proposer un nouvel Ă©clairage, tel fut mon objectif. Je l’ai poursuivi en Master 2 et en ThĂšse de doctorat. Devenue universitaire, j’ai ensuite consacrĂ© une quinzaine d’ouvrages, une quarantaine d’articles et une soixantaine de confĂ©rences Ă  PrĂ©vert, et ainsi partagĂ© mes recherches avec le plus grand nombre. Et Ă  mon parcours personnel, il faut ajouter une rencontre dĂ©cisive, un pyrogĂšne prĂ©vertien » devenu un ami trĂšs proche Ă  qui je dĂ©die d’ailleurs mon essai, PrĂ©vert et le cinĂ©ma Les Nouvelles Ă©ditions Place, 2017 Bernard ChardĂšre. Fondateur des revues Premier Plan et Positif, ainsi que de l’Institut LumiĂšre, ChardĂšre a bien connu PrĂ©vert, et la bande Ă  PrĂ©vert », de Robert Doisneau Ă  Maurice Baquet en passant par Pierre PrĂ©vert. N’y a-t-il pas toujours eu un malentendu autour de PrĂ©vert ? Un regard un peu hautain Ă  l’égard de son Ɠuvre ? Je pense Ă  Paroles par exemple dont vous rappelez dans votre biographie la sortie saluĂ©e par beaucoup mais aussi trĂšs vite les critiques dĂ©nonçant une poĂ©sie populaire » ? Vous avez pleinement raison, le cas de Paroles me semble en effet assez reprĂ©sentatif. PrĂ©vert est un autodidacte ; il a beaucoup engrangĂ© et il a fait ses classes dans la rue, auprĂšs des surrĂ©alistes notamment, avant d’écrire assez tardivement, vers la fin des annĂ©es 1920. PrĂ©vert n’a pas cherchĂ© Ă  ĂȘtre publiĂ©. Mais devant l’insistance de certains, des textes sont parus de maniĂšre Ă©parse dans des revues dans les annĂ©es 1930. Puis, en 1945, PrĂ©vert raconte qu’il se promĂšne Ă  Saint-Germain-des-PrĂ©s lorsqu’il rencontre un ami dĂ©corateur de cinĂ©ma, Robert Clavel. Celui-ci lui dit connaĂźtre quelqu’un qui souhaite publier ses poĂšmes. Il laisse alors Ă  l’auteur les coordonnĂ©es de l’intĂ©ressĂ© RenĂ© BertelĂ©. Ce dernier a Ă©tĂ© professeur de français dans le sud de la France, et lors d’un sĂ©jour dans le Midi vers 1942, PrĂ©vert a fait briĂšvement sa connaissance dans les milieux de la RĂ©sistance. En 1944, BertelĂ© fonde sa propre maison d’édition, Le Point du Jour, et c’est suite aux conseils du poĂšte Henri Michaux – grand admirateur des Ă©crits de PrĂ©vert – qu’il dĂ©cide d’éditer ses poĂšmes. Cette fois, PrĂ©vert accepte. Paroles rencontre un succĂšs fulgurant et inĂ©galĂ©. Les huit premiers jours, 5 000 exemplaires sont vendus. Au bout d’un an, 25000 ont Ă©tĂ© achetĂ©s. Pierre BĂ©arn SortilĂšges, 1953 tĂ©moigne Je peux vous dire que Paroles a battu de loin dans ma petite librairie du Quartier Latin le record de la vente. J’en ai vendu des mĂštres cube ». Pensez donc, un libraire comptabilisant ses ventes de poĂ©sie en mĂštres cube ! À ce jour, Paroles est le recueil français du XXe siĂšcle le plus traduit et vendu dans le monde. PrĂ©vert offre en quelque sorte la poĂ©sie au peuple, crĂ©ant une sorte de lutte des classes culturelle qui n’est Ă©videmment pas du goĂ»t de tous
 Ces mots de PrĂ©vert qui ne laissent jamais indiffĂ©rent comptent en effet des dĂ©tracteurs, aujourd’hui encore. Sans vouloir accorder plus d’importance qu’il n’en faut Ă  ces derniers, voici quelques griefs formulĂ©s, dont je laisse le lecteur juge. Henri-Jacques Dupuy Ce Soir, 1946 affirme que PrĂ©vert ne parvient pas Ă  Ă©chapper Ă  une sorte d’anarchisme de collĂ©gien, assez peu efficace en dĂ©finitive malgrĂ© ces cinglantes irrĂ©vĂ©rences ». Du cĂŽtĂ© des communistes, Jacques Gaucheron La Nouvelle Critique, mars 1950 parle des faux sentiments d’un anarchiste dĂ©solĂ© » et d’une antithĂšse mĂ©canique ». En 1965, Alain Bousquet Parler qualifie PrĂ©vert de Maurice Chevalier pour midinettes bavardes ». Claude Mauriac parle quant Ă  lui de guignol du pavĂ© qui se prend pour Goya ». En 1992, Michel Houellebecq Les Lettres françaises publie Jacques PrĂ©vert est un con », se demandant Pourquoi la poĂ©sie de Jacques PrĂ©vert est-elle si mĂ©diocre, Ă  tel point qu’on Ă©prouve parfois une sorte de honte Ă  la lire ? ». Parce que ce qu’il a Ă  dire est d’une stupiditĂ© sans bornes ; on en a parfois la nausĂ©e », que sa vision du monde est plate, superficielle et fausse » et que sur le plan philosophique et politique, Jacques PrĂ©vert est avant tout un libertaire ; c’est-Ă -dire fondamentalement un imbĂ©cile ». En 2007, le chanteur Jean-Louis Murat Lire tient les propos suivants J’ai toujours aimĂ© Baudelaire. C’est l’apogĂ©e de la langue française, avec Rimbaud, Stendhal et Proust. AprĂšs, on fait face Ă  une lente dĂ©crĂ©pitude. La poĂ©sie, c’est toujours la lyre avec des mots, et Baudelaire se prĂȘte admirablement Ă  ça – bien plus que cette tragĂ©die de Jacques PrĂ©vert, sans doute le plus mauvais poĂšte français – Souviens-toi, Barbara, quelle horreur ! Et les frĂšres Jacques n’arrangeaient rien... ». Quelques mois plus tard, Murat prĂ©cise L’Express [Baudelaire est] le dernier poĂšte chantable. MallarmĂ© est inadaptable. Aragon, c’est du sous Baudelaire. Je dĂ©teste PrĂ©vert. AprĂšs, c’est la dĂ©gĂ©nĂ©rescence, on arrive au nĂ©ant, Ă  Grand Corps malade... ». Comme le note avec humour Bernard ChardĂšre dans la prĂ©face qu’il m’a fait l’amitiĂ© d’écrire pour PrĂ©vert, portrait d’une vie Ramsay, 2007 Il n’y a pas lieu de s’étonner qu’il [PrĂ©vert] n’ait jamais fait l’unanimitĂ© chez les critiques quand on se moque des rĂ©ceptions Ă  la Nouvelle Oisellerie Française, on ne peut s’attendre aux sourires des plumitifs car il y en a de la NRF ; quand on ne se veut pas commandeur des croyants et il y en a, de tous bords, on ne peut s’attendre Ă  leur bĂ©nĂ©diction. Éditer tant de Cahiers des Amis de Claudel ou de CĂ©line, mais de PrĂ©vert, jamais, relĂšve plus du maintien de l’ordre social que de motifs “littĂ©raires”. Pour un “abstracteur de quintessence” dĂ»ment diplĂŽmĂ©, PrĂ©vert qui parle, qui recherche un langage commun, ne saurait ĂȘtre sa tasse de thĂ© ou de thĂšse ; l’intellectuel moyen type n’est pas sensible Ă  la subtilitĂ© sous la simplicitĂ©, ni au cĂŽtĂ© “Grand RhĂ©toriqueur” que cache l’écrivain sous son flot de paroles, son flux de mots. Il en reste Ă  la lettre, Ă  la poĂ©sie pour l’école, de mĂȘme qu’il peut tenir Rabelais pour un primitif contant des balivernes. À d’autres
 Hors des rangs, Ă  la marge, libre-penseur, franc-tireur et partisan, Jacques PrĂ©vert, homme contre, prĂ©fĂšre sortir en griller une ». Pourquoi sa poĂ©sie est-elle lue avec autant de dĂ©fiance ? À cause de cette libertĂ© irrĂ©ductible que vous dĂ©crivez au fil de votre portrait de l’artiste ? Et quelle est l’histoire et l’état de la rĂ©ception de PrĂ©vert aprĂšs sa mort ? La question est complexe, et certains Ă©lĂ©ments que nous venons d’évoquer pour le cas de Paroles s’appliquent aussi Ă  la totalitĂ© de son Ɠuvre. On peut bien entendu en ajouter d’autres, notamment le fait que PrĂ©vert dĂ©veloppe constamment une thĂ©matique libertaire, qui elle non plus n’est pas du goĂ»t de tous. Il est anticlĂ©rical. DĂšs son enfance il nourrit une profonde aversion pour la Bible. Lors des cours de catĂ©chisme, il est surpris du dĂ©calage qui existe entre ce qui est dit dans les textes sacrĂ©s et ce qui se passe dans la rĂ©alitĂ©. Il est mĂȘme choquĂ© par la cruautĂ© et l’autoritĂ© de JĂ©sus, et par le fait que la femme est prĂ©sentĂ©e comme infĂ©rieure Ă  l’homme auquel elle doit ĂȘtre soumise. TrĂšs vite, PrĂ©vert dĂ©cĂšle une tentative de tromperie et d’assujettissement. Enfin, il considĂšre cette histoire comme la banale histoire d’une famille qui ne dĂ©fend que ses intĂ©rĂȘts et ne revĂȘt de fait pas un grand intĂ©rĂȘt. En regard, il trouve les histoires mythologiques bien plus justes et exaltantes, avec de si belles dĂ©esses ! Ses rĂ©parties en la matiĂšre lui valent d’ĂȘtre souvent mis Ă  la porte des cours. Le texte Pater noster » Paroles, 1946 demeure sans doute son travestissement satirique le plus cĂ©lĂšbre. AprĂšs le titre en latin qu’il donne au poĂšme, PrĂ©vert reprend tel quel le premier vers de la priĂšre que JĂ©sus enseigna Ă  ses disciples, Notre-PĂšre qui ĂȘtes aux cieux ». Seulement, dĂšs le vers 2, blasphĂšme absolu, la réécriture dĂ©bute par un claquant Restez-y ». Puis la priĂšre est alors revue et corrigĂ©e. Un autre Ă©lĂ©ment de crispation est l’antimilitarisme. L’armĂ©e est une cible privilĂ©giĂ©e de PrĂ©vert. NĂ© en 1900, l’auteur vit les deux Guerres mondiales. Il est trop jeune pour faire la PremiĂšre, mais en 1917, il voit des soldats en permission chantent L’Internationale et À Craonne sur le plateau – cette derniĂšre est interdite car violemment opposĂ©e Ă  la guerre Adieu la vie, adieu l’amour, adieu toutes les femmes ! C’est bien fini, c’est pour toujours. De cette guerre infĂąme, c’est Ă  Craonne, sur le plateau, qu’on doit laisser sa peau, car nous sommes tous condamnĂ©s. Nous sommes les sacrifiĂ©s », tel est son refrain. PrĂ©vert assiste Ă  leur passage Ă  tabac par la police. Il proteste. Il est embarquĂ© par les policiers. Ceux-ci lui glissent une lame de rasoir dans la poche. Une dĂ©position tout prĂȘte lui est tendue. Il proteste Ă  nouveau. Il est malmenĂ©. Il est amochĂ©. En 1918, il passe devant le Conseil de RĂ©vision. En juin 1940, PrĂ©vert quitte Paris pour la zone libre. Il est rĂ©formĂ© – comme goitreux, atteint par surcroĂźt de sĂ©nilitĂ© prĂ©coce » selon Marcel Duhamel dans son autobiographie Raconte pas ta vie Mercure de France, 1972 – aprĂšs avoir tenu volontairement des propos saugrenus et adoptĂ© un comportement intriguant. PrĂ©vert refuse avec vĂ©hĂ©mence le combat, le port d’armes, la torture, les bombes, les fusillades et les exĂ©cutions. Pensons au cĂ©lĂšbre vers de Barbara » Paroles, 1946, Quelle connerie la guerre ». Ce texte probablement Ă©crit fin 1944 donna lieu Ă  une chanson, initialement interdite Ă  la radio. Nouvel Ă©lĂ©ment de crispation encore la dĂ©fiance de PrĂ©vert Ă  l’égard des intellectuels et des journalistes. L’auteur nous invite en effet Ă  nous mĂ©fier de ceux qui croient monopoliser le savoir dans des textes comme Il ne faut pas » Paroles, 1946 ou La Tour » Spectacle, 1951. Quant Ă  Tentative de description d’un dĂźner de tĂȘtes Ă  Paris-France » Paroles, 1946, c’est un pamphlet contre le journalisme et le conformisme social, appelant Ă  ne pas se fier aux apparences et Ă  ne pas croire ceux qui portent des masques. Avec sa premiĂšre piĂšce pour la troupe de théùtre le groupe Octobre Ă©crite en 1932, Vive la presse, PrĂ©vert s’en prenait dĂ©jĂ  violemment Ă  la presse accusĂ©e de lĂąchetĂ© et de mensonges. Avec ces quelques Ă©lĂ©ments, le ton est donnĂ©. Ajoutons que PrĂ©vert Ă©chappe aussi Ă  toute classification et ne s’insĂšre dans aucune taxinomie poĂ©tique. En effet, ses ouvrages prennent des formes variĂ©es. Outre les recueils de textes, il y a aussi, de maniĂšre plus hĂ©tĂ©roclite, des livres qui associent textes et dessins avec Elsa Henriquez ou encore AndrĂ© François, textes et photographies avec Ylla, Izis, et AndrĂ© Villers notamment, textes et compositions Marc Chagall et Joan MirĂł par exemple, textes et lithographies Max Ernst, textes et gravures Georges Ribemont-Dessaignes, textes et dĂ©coupages Pablo Picasso, etc. Ce caractĂšre protĂ©iforme Ă©branle les structures fondamentales des arts traditionnels et se dĂ©cline aussi avec un mĂ©lange de textes et de collages dont PrĂ©vert est l’auteur Fatras 1966 et Imaginaires 1970. De plus, au sein mĂȘme de ces ouvrages se mĂȘlent des genres Ă©clectiques puisque l’on trouve aussi bien des textes courts que des chansons, des histoires, des instantanĂ©s et des inventaires. Quant Ă  la rĂ©ception de PrĂ©vert aprĂšs sa mort, il faudrait l’étudier avec prĂ©cision, mais il ne me semble pas finalement que les choses aient tellement changĂ©. Une exception de taille cependant son insertion dans les manuels scolaires des Ă©coliers. C’est une belle initiative, mĂȘme s’il est regrettable qu’elle ne concerne que les trĂšs jeunes Ă©lĂšves
 Cette date anniversaire n’est-elle pas l’occasion d’une réévaluation bienvenue ? Car, outre les nombreuses publications et rencontres partout en France, il y aura Ă©galement cet Ă©tĂ© un colloque Ă  Cerisy attendu qui permettra sans doute de remettre quelques pendules Ă  l’heure. Quelle sera l’idĂ©e de ce rendez-vous ? Depuis une vingtaine d’annĂ©es, ma recherche scientifique est motivĂ©e par une entreprise de rĂ©habilitation qui permette de réévaluer l’Ɠuvre protĂ©iforme de PrĂ©vert. J’espĂšre y ĂȘtre en partie parvenue. Contre vents et marĂ©es, en essayant de conserver ma libertĂ© d’expression malgrĂ© les obstacles dressĂ©s sur mon chemin
 et pour le montage de ce colloque, qui a nĂ©cessitĂ© deux ans de prĂ©paration, il y en eut beaucoup ! Quarante ans aprĂšs la disparition de Jacques PrĂ©vert, le colloque de Cerisy est une manifestation internationale que nous nous devions absolument d’offrir enfin en hommage Ă  Jacques PrĂ©vert. Je m’explique. Depuis 1952, le Centre culturel international de Cerisy-la-Salle est un lieu de rencontres capital oĂč se dĂ©roulent les fameux Colloques de Cerisy », qui permettent de dĂ©battre de sujets artistiques, littĂ©raires, philosophiques, politiques et sociaux. Depuis 65 ans, plus de 500 colloques qui ont fait date ont Ă©tĂ© organisĂ©s. Or, aucun colloque PrĂ©vert ne s’y est jamais tenu ! Cerisy est pourtant situĂ© dans la Manche, dĂ©partement normand oĂč PrĂ©vert a fini ses jours, oĂč il est enterrĂ© et oĂč se visite sa maison, situĂ©e dans le village d’Omonville-la-Petite. Comment alors expliquer une telle aberration ? Les raisons sont multiples l’indiffĂ©rence de bon nombre de chercheurs vis-Ă -vis de son Ɠuvre et donc l’absence d’initiative pour proposer une manifestation scientifique ; les tensions entre le dĂ©partement et la succession Jacques PrĂ©vert, spĂ©cifiquement depuis l’installation de la statue de PrĂ©vert et Trauner dans le parc d’Omonville ; le coĂ»t des droits Ă  acquitter pour donner Ă  entendre et Ă  lire PrĂ©vert ; les pressions pour contrĂŽler ce qui s’écrit sur l’Ɠuvre et la vie de l’artiste
 L’initiative est donc venue cette fois directement du Centre culturel international de Cerisy-la-Salle, qui m’a demandĂ© d’élaborer un programme scientifique pour renouveler le regard portĂ© sur PrĂ©vert en cette annĂ©e commĂ©morative. J’aurai le plaisir de le codiriger avec Marianne Simon-Oikawa, de l’universitĂ© de Tokyo. MalgrĂ© le contexte difficile dont je viens de parler, nous avons rĂ©uni une Ă©quipe de chercheurs motivĂ©s, et dĂ©fini un programme Ă  la fois indĂ©pendant et le plus complet possible. Il convient ici de saluer l’écoute, l’adhĂ©sion sans faille de la directrice de Cerisy, Édith Heurgon, qui a Ă©tĂ© convaincue par notre projet et s’est battue pour la tenue de cet Ă©vĂ©nement. Qu’elle en soit ici trĂšs chaleureusement remerciĂ©e ! Ainsi, le colloque international Jacques PrĂ©vert, dĂ©tonations poĂ©tiques » se tiendra Ă  Cerisy du 11 au 18 aoĂ»t 2017. PrĂ©cision de taille c’est avec une joie immense que Marianne et moi avons reçu le soutien de la Mission des commĂ©morations nationales pour la publication des Actes ! Vous l’avez compris, ce colloque sera l’occasion de redĂ©couvrir PrĂ©vert, de le donner Ă  lire autrement, d’une maniĂšre plus complĂšte et plus juste. En tĂȘte des classements des poĂštes prĂ©fĂ©rĂ©s des Français, en tĂȘte des traductions et des ventes avec son recueil de poĂšmes Paroles, en tĂȘte des scĂ©naristes qui ont marquĂ© le cinĂ©ma français, et dans la tĂȘte des enfants qui apprennent ses textes dĂšs les petites classes, la poĂ©sie de Jacques PrĂ©vert est familiĂšre aujourd’hui comme hier aux petits et aux grands. Cependant, malgrĂ© son immense popularitĂ©, il reste mĂ©connu. Un profond dĂ©calage existe entre son Ɠuvre rĂ©elle et l’image que la postĂ©ritĂ© en garde. La diversitĂ© de ses crĂ©ations n’est prĂ©sentĂ©e que de maniĂšre partielle. La perception actuelle qu’en a le public est Ă©galement erronĂ©e. À cĂŽtĂ© de textes doux et rĂȘveurs figure en effet, et mĂȘme majoritairement, une poĂ©sie-action. Mais trop atypiques et trop dĂ©rangeantes, les productions prĂ©vertiennes ont Ă©tĂ© Ă©dulcorĂ©es. FidĂšle toute sa vie Ă  ses convictions, l’artiste a créé une Ɠuvre rebelle et virulente, anticlĂ©ricale et antimilitariste, crue et corrosive, vivante et roborative, d’une actualitĂ© encore Ă©tonnamment criante. Elle rĂ©sonne fortement dans le monde qui est Ă  prĂ©sent le nĂŽtre, et contribue Ă  l’éclairer. Participeront Ă  ce colloque des chercheurs du monde entier, universitaires universitĂ© d’Arras, École nationale Louis LumiĂšre, universitĂ© de Tokyo, universitĂ© Doshosha, universitĂ© Paris-Est Marne-la-VallĂ©e, universitĂ© de Nantes, universitĂ© Paris 8 – Saint-Denis, universitĂ© Paris 3 – Sorbonne nouvelle, École d’art marocaine de Casablanca
 ou institutionnels BibliothĂšque Kandinsky du Centre Pompidou, BibliothĂšque nationale de France, BibliothĂšque Centre national du cinĂ©ma et de l’image animĂ©e.... Les diffĂ©rentes facettes de l’Ɠuvre de PrĂ©vert seront ainsi apprĂ©hendĂ©es au fil de la semaine cinĂ©ma d’animation, cinĂ©ma visible et invisible, cinĂ©ma documentaire, théùtre, tracts et manifestes politiques, collage d’images et de mots, poĂ©sie, chanson, livres avec les peintres et les photographes
 En plus de ces communications, le 13 aoĂ»t en soirĂ©e sera projetĂ©e Un oiseau rare, dĂ©lectable comĂ©die rĂ©alisĂ©e par Richard Pottier en 1936. Pour cette projection, nous serons rejoints par les participants du colloque Psychanalyse et cinĂ©ma du visible et du dicible » coorganisĂ© par Chantal Clouard et Myriam Leibovici, ce qui donnera lieu, sans nul doute, Ă  des Ă©changes trĂšs fructueux ! Le 14 aoĂ»t une journĂ©e d’escapade mĂšnera intervenants et auditeurs Ă  Omonville-la-Petite, oĂč nous serons accueillis Ă  la Maison Jacques PrĂ©vert par Fanny Kempa, responsable de la demeure de l’artiste. Et le 15 aoĂ»t seront donnĂ©s Ă  entendre les mots de PrĂ©vert par les comĂ©diens Philippe MĂŒller et Vincent Vernillat de la compagnie Le grain de sable. Le programme complet est disponible ici. Rejoignez-nous nombreux pour commĂ©morer joyeusement PrĂ©vert en Normandie, cette rĂ©gion qu’il a tant apprĂ©ciĂ©e ! En lisant votre biographie intellectuelle de PrĂ©vert, on constate deux choses d’abord la parfaite discrĂ©tion de l’homme sur sa propre vie ; ensuite que l’artiste PrĂ©vert est au milieu de toutes les grandes aventures artistiques de son temps, qu’il s’agisse de littĂ©rature, de cinĂ©ma, des arts plastiques, ou de la chanson. Il est un interlocuteur, pris au sĂ©rieux aussi bien par Breton que Picasso, ou Éluard, Montand, Renoir ou CarnĂ©, GrĂ©co ou Gabin. PrĂ©vert semble ĂȘtre au cƓur de tout. Pourtant sa place n’est jamais centrale. En effet, PrĂ©vert n’aimait guĂšre se livrer sur sa propre existence, ni sur son Ɠuvre d’ailleurs, dĂ©clarant frĂ©quemment Raconte pas ta vie ». En effet Ă©galement, PrĂ©vert est de toutes les grandes aventures de son temps. Par exemple, il participe au surrĂ©alisme de 1924 Ă  1930, annĂ©e d’oĂč il s’en exclut en signant le cĂ©lĂšbre pamphlet Mort d’un monsieur » contre AndrĂ© Breton dans Un Cadavre. DĂšs 1924, le 54 rue du ChĂąteau, la demeure de PrĂ©vert et de ses amis situĂ©e dans le XIVe arrondissement de Paris, devient mĂȘme l’un des centres nĂ©vralgiques du mouvement. Breton dĂ©clara d’ailleurs que lĂ  se trouvait le vĂ©ritable alambic de l’humour au sens surrĂ©aliste » Entretiens 1913-1952. Autre exemple, PrĂ©vert participe activement au cinĂ©ma français, par l’écriture de plus de cent scĂ©narios, dont la majoritĂ© a Ă©tĂ© fort heureusement tournĂ©e L’affaire est dans le sac Pierre PrĂ©vert, 1932, Le Crime de monsieur Lange Jean Renoir, 1936, DrĂŽle de drame Marcel CarnĂ©, 1937, Le Quai des brumes MC, 1938, Le jour se lĂšve MC, 1938, Remorques Jean GrĂ©millon, 1941, Les Visiteurs du soir MC, 1942, Adieu
 LĂ©onard ! Pierre PrĂ©vert, 1943, Les Enfants du paradis MC, 1945, Notre-Dame de Paris Jean Delannoy, 1956, Le Roi et l’Oiseau Paul Grimault, 1980
 Je m’arrĂȘte lĂ , je pense que la mĂ©moire de tous est ainsi rafraĂźchie. Le scĂ©nariste Jean Aurenche dĂ©clara alors qu’ un jour le cinĂ©ma s’est mis Ă  parler PrĂ©vert » citĂ© par Didier Decoin dans Les Nouvelles LittĂ©raires, 1975. Autre exemple encore, PrĂ©vert a Ă©crit des textes dont les interprĂštes et les compositeurs se sont emparĂ©s. Saint-Germain-des-PrĂ©s s’est alors mis Ă  chanter ses mots, et l’onde s’est propagĂ©e au-delĂ  de l’hexagone ! Et PrĂ©vert est l’ami des peintres et des photographes, de Picasso Ă  MirĂł en passant par Doisneau ou encore Izis. Il Ă©crit avec eux, pour eux, collabore aussi Ă  des livres avec eux. Les dĂ©clinaisons sont multiples. Bref, PrĂ©vert est bien au milieu de tout. Il est un pyrogĂšne qui met le feu aux poudres crĂ©atrices. Il donne. Il transmet. Il soutient. Il permet. Sans compter. Sans imposer. Sans rien demander en retour. Et souvent dans l’ombre. Parmi les Ă©lĂ©ments qui resurgissent dans votre biographie, c’est la participation de PrĂ©vert au groupe Octobre. Pouvez-vous nous rappeler ce qu’était Octobre et la place de PrĂ©vert ? Au dĂ©part se trouve la troupe de théùtre PrĂ©mices. ConstituĂ©e de comĂ©diens amateurs enseignants, employĂ©s et ouvriers et de professionnels, elle se produit dans des fĂȘtes syndicales, dans des piĂšces d’intellectuels communistes comme Paul Vaillant-Couturier et LĂ©on Moussinac, mais aussi de Prosper MĂ©rimĂ©e ou d’Octave Mirbeau. En 1932, PrĂ©mices se divise en deux mouvements. D’un cĂŽtĂ©, Roger Legris prend la direction d’une Ă©quipe, avec Gaston Baty et Georges Vitray, et donne des piĂšces formellement trĂšs travaillĂ©es. De l’autre cĂŽtĂ©, Lazare Fuchsmann, Guy Decomble, Raymond BussiĂšres et Suzanne Montel, avec le soutien de Vaillant-Couturier et Moussinac, forment un groupe de théùtre davantage basĂ© sur la spontanĂ©itĂ©, auquel ils donnent le nom de Groupe de choc PrĂ©mices. Ces troupes appartiennent Ă  la FĂ©dĂ©ration du théùtre ouvrier de France. L’annĂ©e de cette sĂ©paration, PrĂ©vert et Jean-Paul Dreyfus - Le Chanois se rendent frĂ©quemment Ă  des meetings dans lesquels des groupes de cette fĂ©dĂ©ration se produisent. À l’Association des Ă©crivains et artistes rĂ©volutionnaires, ils rencontrent Vaillant-Couturier et Moussinac. BussiĂšres, alors fonctionnaire Ă  l’HĂŽtel de Ville de Paris, cherche des textes nouveaux. Sur les conseils de Vaillant-Couturier, il contacte PrĂ©vert. La rencontre est insolite. Elle a lieu chez Jacques, rue Dauphine dans le VIe arrondissement. PrĂ©vert est encore bouleversĂ© par le suicide de son ami l’acteur Pierre Batcheff. PrĂ©vert Ă©crit alors Vive la presse, que nous avons dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©, qui dĂ©nonce le capitalisme et la malhonnĂȘtetĂ© de ceux qui ont le pouvoir, et attaque avec virulence la presse, accusĂ©e de mensonges. PrĂ©vert Ă  la plume, Lou Bonin - Tchimoukow Ă  la mise en scĂšne Lou Bonin, dit Lou Tchimoukow, pour que son nom fasse plus soviĂ©tique, Arlette Besset, Jean BrĂ©maud, Jacques-Bernard Brunius, Raymond BussiĂšres, Guy Decomble, Lou FĂ©lix, Virginia GrĂ©gory, Paul Grimault, Ida Lods, Lazare et Jeanne Fuchsmann, Jean LoubĂšs, Suzanne Montel, GisĂšle Fruhtman future femme de Pierre PrĂ©vert et Zoula Ă  l’interprĂ©tation. La premiĂšre a lieu en mai 1932. C’est un succĂšs. Cette piĂšce marque le dĂ©but de la participation de PrĂ©vert Ă  cette troupe qui deviendra, sur la suggestion de Lou Bonin - Tchimoukow et en souvenir de la rĂ©volution russe d’octobre 1917, le groupe Octobre. Ce groupe, c’est le théùtre de l’agit-prop, c’est-Ă -dire de l’agitation-propagande. La troupe se produit dans la rue, dans les cafĂ©s, dans les usines en grĂšve et dans des soirĂ©es théùtrales. Elle donne des chƓurs parlĂ©s, des piĂšces, des saynĂštes et des sketches, qui sont constamment en rapport avec l’actualitĂ© politique, auprĂšs d’un public populaire qui participe et donne force aux mots. Elle agit dans l’urgence les textes sont souvent Ă©crits et rĂ©pĂ©tĂ©s durant la nuit pour le lendemain. PrĂ©vert se rĂ©vĂšle et excelle dans cet exercice. La mĂȘme annĂ©e, le groupe Octobre fait parler de lui avec une autre manifestation. Au cimetiĂšre du PĂšre-Lachaise se trouve le mur des FĂ©dĂ©rĂ©s, contre lequel 147 communards furent exĂ©cutĂ©s en mai1871 par les Versaillais, aprĂšs la chute du gouvernement insurrectionnel. La troupe s’y produit, en hommage aux fusillĂ©s. Puis PrĂ©vert livre deux textes d’actualitĂ© qui ont considĂ©rablement marquĂ© les membres du groupe Octobre L’AvĂšnement d’Hitler et CitroĂ«n. Parvenu au pouvoir en janvier 1933, Hitler apparaĂźt tout de suite comme dangereux aux yeux de PrĂ©vert, ce qui l’incite Ă  aborder l’évĂ©nement dans un chƓur parlĂ© jouĂ© par la troupe. En avril de la mĂȘme annĂ©e, CitroĂ«n fait de la tour Eiffel un gigantesque panneau publicitaire lumineux. Or, les ouvriers de l’entreprise automobile sont en grĂšve et manifestent. Autre moment fort La Bataille de Fontenoy. Écrite en octobre 1932 et prĂ©sentĂ©e dĂ©but 1933 au deuxiĂšme congrĂšs de la FĂ©dĂ©ration du Théùtre ouvrier, cette piĂšce s’oppose violemment Ă  la guerre. Du 24 au 30 mai 1933 a lieu Ă  Moscou l’Olympiade internationale du Théùtre RĂ©volutionnaire. C’est avec La Bataille de Fontenoy, prĂ©cĂ©dĂ© d’ActualitĂ©s, que le groupe Octobre y participe. La troupe part de Londres sur un cargo soviĂ©tique. Du 18 au 23 mai, elle est Ă  LĂ©ningrad. Sont notamment du voyage Yves AllĂ©gret, Arlette Besset, Jacques-AndrĂ© Boiffard, Jean BrĂ©maud, Lou Bonin/Tchimoukow, Raymond BussiĂšres, Jean-Paul Dreyfus - Le Chanois, Marcel Duhamel, GisĂšle Fruhtman, Jean LoubĂšs, Suzanne Montel, LĂ©on Moussinac et LĂ©o Sabas. Sur le bateau, l’enthousiasme est dĂ©bordant et les rĂ©pĂ©titions vont bon train. Dreyfus - Le Chanois envoie des lettres et tient un journal qui tĂ©moigne de l’ambiance qui rĂšgne Ă  bord. L’Olympiade se dĂ©roule Ă  merveille et La Pravda Ă©crit dans ses colonnes que le groupe Octobre a donnĂ© une revue-montage, extrĂȘmement intĂ©ressante, intitulĂ©e La Bataille de Fontenoy. L’intĂ©rĂȘt particulier de cette revue consiste en ce que tout le texte est composĂ© de coupures de journaux, de discours parlementaires, d’aphorismes sur les dirigeants politiques, etc. ». La prestation du groupe est remarquĂ©e, tout comme sa sortie, trĂšs risquĂ©e le dernier jour, certains membres, dont PrĂ©vert, refusent de signer un texte qui fait l’éloge de Staline. De retour Ă  Paris, le groupe Octobre est en pleine gloire et poursuit vaillamment ses activitĂ©s jusqu’en 1936. Il est rejoint par Fabien Loris, Yves Deniaud, Sylvain Itkine, les frĂšres Marc l’un d’eux deviendra le chanteur Francis Lemarque et Maurice Baquet. PrĂ©vert est extrĂȘmement actif et produit de nombreuses piĂšces. Fin 1935, il Ă©crit Le Tableau des Merveilles, une adaptation de CervantĂšs. Il a conservĂ© les deux saltimbanques, Chanfalla et Chirinos, qui arrivent dans une ville espagnole pour prĂ©senter aux notables ce qu’ils nomment le tableau des merveilles », spectacle que seuls ceux qui possĂšdent certaines qualitĂ©s peuvent voir
 La mise en scĂšne est de Jean-Louis Barrault et les rĂ©pĂ©titions se dĂ©roulent Ă  Paris, dans son grenier du 7, rue des Grands-Augustins, Ă  l’endroit mĂȘme oĂč Picasso peindra Guernica quelques mois plus tard. À la Maison de la Culture de la rue d’Anjou, dans le VIIIe arrondissement, la piĂšce est jouĂ©e pour la premiĂšre fois en janvier 1936. Elle accompagne des spectacles d’autres troupes de la FĂ©dĂ©ration du théùtre ouvrier de France et une conversation sur le théùtre entre Louis Aragon et Bernard. Le groupe Octobre participe aussi Ă  des fĂȘtes et kermesses qui font grand bruit. En juin 1935, c’est la fĂȘte bretonne de Saint-Cyr l’École. La troupe y reprĂ©sente Suivez le druide, revue bretonne en six tableaux. Elle anime la fĂȘte par un dĂ©filĂ© antimilitariste et anticlĂ©rical qui fait scandale ; PrĂ©vert est dĂ©guisĂ© en abbĂ©. Le groupe Octobre rĂ©cidive Ă  Villejuif, en juillet 1935 Ă  la kermesse bretonne et auvergnate et en juin 1936 lors de la kermesse municipale. En juillet 1936, la troupe se dissout. Si j’ai Ă©tĂ© un peu longue sur le sujet, c’est parce que le groupe Octobre est une aventure capitale pour PrĂ©vert. Il ne faut pas la sous-estimer. Il apprend Ă  Ă©crire beaucoup et vite avec le groupe Octobre, entre 1932 et 1936. Et il ne s’arrĂȘtera plus ! Si Paroles occupe une place dĂ©terminante dans l’Ɠuvre de PrĂ©vert, parce qu’il s’agit d’une Ɠuvre emblĂ©matique, c’est peut-ĂȘtre l’arbre qui cache la forĂȘt, d’abord parce qu’il y a d’autres textes de PrĂ©vert
 Tout Ă  fait ! L’heureux succĂšs de Paroles a eu aussi comme consĂ©quence de faire de l’ombre, avec le temps, aux autres recueils de PrĂ©vert. C’est pourquoi, dans mon entreprise de prĂ©vertisation rires, j’invite toujours Ă  lire d’autres ouvrages du poĂšte. Une prĂ©cision au passage j’utilise volontairement le terme poĂšte », aprĂšs l’avoir Ă©vitĂ© pendant un certain nombre d’annĂ©es. Pourquoi ? Si PrĂ©vert prĂ©tend ne pas savoir ce qu’est la poĂ©sie et ne pas avoir de carte de visite estampillĂ©e poĂšte, il est pourtant incontestablement un poĂšte. Je m’explique. Il me semble en effet qu’avec ce mot, PrĂ©vert rejetait surtout, d’une part le permanent Ă©tiquetage qu’impose la sociĂ©tĂ©, et d’autre part le sens prĂ©tentieux et Ă©litiste qu’elle colle souvent Ă  ce vocable, le dĂ©naturant alors. PrĂ©vert est un poĂšte dans l’acception que Guillaume Apollinaire lui attribue dans sa confĂ©rence L’Esprit nouveau et les poĂštes » qu’il donne au Vieux-Colombier le 26 novembre 1917 celui qui dĂ©couvre de nouvelles joies, fussent-elles pĂ©nibles Ă  supporter », ajoutant que l’ on peut ĂȘtre poĂšte dans tous les domaines il suffit que l’on soit aventureux et que l’on aille Ă  la dĂ©couverte ». Les autres textes donc. Pour les recueils de textes, je renvoie les lecteurs Ă  Histoires 1946, Spectacle 1951, La Pluie et le Beau Temps 1955 ou encore Choses et autres 1972. Pour les livres contenant textes et collages, lisez Fatras 1966 Imaginaires 1970. Quant aux ouvrages contenant textes et photographies, ceux avec Ylla sont moins connus mais pourtant absolument dĂ©licieux Le Petit Lion 1947 et Des BĂȘtes
 1950. Pour les livres avec les peintres, je conseille fortement Diurnes 1962, avec des dĂ©coupages de Pablo Picasso, des interprĂ©tations photographiques d’AndrĂ© Villers et des textes de PrĂ©vert. Avec des gravures de Georges Ribemont-Dessaignes, Arbres 1967 est une petite merveille, qui s’adresse aux arbres, puis aux hommes Pour les livres pour la jeunesse, ouvrez Contes pour enfants pas sages 1947 avec des dessins d’Elsa Henriquez ou encore Lettres des Ăźles Baladar 1952, avec des illustrations d’AndrĂ© François, une fable qui a pour thĂšme la colonisation et revĂȘt la forme d’un pamphlet anticolonialiste. L’inventaire est Ă©videmment loin d’ĂȘtre exhaustif, mais il montre en effet, pour reprendre votre image, que Paroles est l’arbre qui cache la forĂȘt. Alors, entrez dans la forĂȘt ! Vous avez dĂ©sormais quelques pistes
 
arbre qui cache la forĂȘt, ensuite parce que PrĂ©vert Ă©galement quelqu’un qui aura Ă©normĂ©ment Ă©crit pour le cinĂ©ma. Vos rĂ©centes publications Jacques PrĂ©vert. Une vie , mais aussi en poche les scĂ©narios Ă©crits par PrĂ©vert, et surtout l’étude PrĂ©vert et le cinĂ©ma montrent une autre facette de l’auteur PrĂ©vert. Certes, PrĂ©vert est l’auteur de quelques scĂ©narios et dialogues cĂ©lĂšbres du cinĂ©ma, mais il est Ă©galement l’auteur de trĂšs nombreux scĂ©narios inĂ©dits ou inconnus. Dans PrĂ©vert et le cinĂ©ma vous appelez cette production le cinĂ©ma de papier ». Cela aussi semble avoir Ă©tĂ© oubliĂ©. PrĂ©vert Ă©tait un travailleur du monde du cinĂ©ma particuliĂšrement prolixe, mais sans compromis. Les films rĂ©alisĂ©s Ă  partir de scĂ©narios de Jacques PrĂ©vert sont nombreux. Nous en avons dĂ©jĂ  mentionnĂ© un certain nombre. Pourtant, cette filmographie dĂ©jĂ  copieuse aurait dĂ» l’ĂȘtre plus encore, nous l’avons dĂ©jĂ  indiquĂ© Ă©galement. Au cours d’une vingtaine d’annĂ©es de recherches sur le sujet, j’ai dĂ©couvert plusieurs dizaines de scĂ©narios inĂ©dits, dans des fonds d’archives publiques parfois, dans des archives privĂ©es le plus souvent. Des tout premiers cinĂ©-textes de jeunesse, comme Le Pont Mirabeau ou Le Bateau Mouche Pirate, Ă  des synopsis plus dĂ©veloppĂ©s de l’ñge mĂ»r comme La nuit tombe sur le chĂąteau ou La Fortune des Rougon, en passant par des synopsis succincts d’une Ă  quelques pages seulement comme Pour ses beaux yeux ou Guichet 14. Le fruit de mes recherches a donnĂ© lieu Ă  une longue filmographie commentĂ©e et enrichie mois aprĂšs mois, annĂ©e aprĂšs annĂ©e, dont la derniĂšre version Ă©ditĂ©e figure dans PrĂ©vert et le cinĂ©ma Les Nouvelles Ă©ditions Place, 2017. D’autre part, j’ai proposĂ© des Ă©tudes de certains cas, de Baleydier Ă  Taxi de minuit en passant par Bulles de savon Les Nouvelles Ă©ditions Place, 2012 ou encore La Fleur de l’ñge Gallimard, 2013. Enfin, en ce quarantenaire de la disparition de PrĂ©vert, trois scĂ©narios inĂ©dits sont parus en Folio, prĂ©cĂ©dĂ©s Ă  chaque fois de deux pages de prĂ©sentation Le Grand Matinal, Au Diable vert, La Lanterne magique. Au vu de l’ampleur des recherches menĂ©es, et du nombre de dĂ©couvertes, une Ă©dition scientifique annotĂ©e, proposant des variantes et des analyses convoquant aussi bien les outils des Ă©tudes cinĂ©matographiques, historiques, littĂ©raires et gĂ©nĂ©tiques serait Ă©videmment pertinente et indispensable
 Mais c’est un projet ambitieux, qui fait hĂ©siter les Ă©diteurs. Pour commencer, j’ai donc proposĂ© une synthĂšse succincte de cet ensemble dans mon dernier essai sur le cinĂ©ma de Jacques PrĂ©vert, dans le chapitre intitulĂ© en effet le cinĂ©ma de papier ». Et le colloque international de Cerisy sera pour moi l’occasion de communiquer encore sur d’autres aspects de ce cinĂ©ma invisible. PrĂ©cisons que si Jacques PrĂ©vert compte bon nombre de projets avortĂ©s dans sa filmographie, il n’est pas le seul dans ce cas. C’est pourquoi je dirige aux Nouvelles Ă©ditions Place, un nouveau volume de l’Anthologie du cinĂ©ma invisible. Cent auteurs prĂ©senteront cent scĂ©narios inĂ©dits d’écrivains, de poĂštes, de plasticiens, de photographes, de rĂ©alisateurs de toute Ă©poque et de toute nationalitĂ©. Une folle aventure, soutenue par le CNC ! Quand on apprend que PrĂ©vert a eu un projet d’adaptation de Mary Poppins , on se met Ă  rĂȘver. En Ă©largissant le propos, quelle est la rĂ©ception de PrĂ©vert Ă  l’étranger ? Est-il ou serait un auteur plus lu ou reconnu qu’en France ? Oh que je vous comprends ! En 1938 en effet, Jacques PrĂ©vert a le projet d’écrire une adaptation de Mary Poppins de Pamela L. Travers pour son frĂšre Pierre. Paru quatre ans plus tĂŽt, ce roman basĂ© sur le personnage de la gouvernante-magicienne est dĂ©coupĂ© en chapitres qui sont autant de nouvelles aventures un goĂ»ter pris au plafond, une vache rouge qui danse, des enfants qui comprennent le langage des oiseaux, un anniversaire cĂ©lĂ©brĂ© dans un zoo oĂč ce sont les humains qui sont enfermĂ©s dans des cages, etc. Ces aventures plurent Ă  PrĂ©vert. Mais le projet ne vit pas le jour. Le scĂ©nariste envisagea de le reprendre en 1942 pour Marcel CarnĂ©, sans plus de succĂšs. Quant Ă  la rĂ©ception de PrĂ©vert Ă  l’étranger, il conviendrait de se lancer dans une rĂ©elle analyse, ce que je n’ai pas fait. Ce que je peux vous dire n’est basĂ© que sur mon expĂ©rience sur des continents variĂ©s, de Tokyo Ă  La Havane en passant par Bruxelles, auprĂšs de publics trĂšs divers. PrĂ©vert semble Ă  chaque fois connu uniquement pour un ou deux pans de son Ɠuvre. Par exemple, les Japonais connaissent surtout Les feuilles mortes » et Le Roi et l’Oiseau Paul Grimault, 1980 alors que les Belges maĂźtrisent plus les poĂšmes aux accents fortement surrĂ©alistes. Cet automne, je me rendrai successivement Ă  Monaco et Ă  Alger pour Ă©voquer PrĂ©vert. PrĂ©vert y est peut-ĂȘtre perçu encore diffĂ©remment
 Et je trĂ©pigne dĂ©jĂ  d’impatience d’en savoir davantage ! Quand on lit vos livres consacrĂ©s Ă  PrĂ©vert, on voit ressurgir des noms et des figures, occultĂ©es par les grandes vedettes, des figures amies de PrĂ©vert, des figures qui ont accompagnĂ©es toute la culture populaire de la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle, je pense Ă  Maurice Baquet, Raymond BussiĂšre, l’ami Marcel Duhamel, le frĂšre Pierre
 PrĂ©vert, c’est aussi le rĂ©cit d’une atmosphĂšre, d’une libertĂ© et d’une sĂ©rie d’amitiĂ©s. Votre biographie se termine par un chapitre intitulĂ© Avec les copains ». Oui, l’amitiĂ© est capitale pour PrĂ©vert. C’est d’ailleurs pourquoi, aprĂšs lui avoir consacrĂ© le chapitre que vous Ă©voquez, j’ai dĂ©cidĂ© de revenir sur le sujet, diffĂ©remment et plus en profondeur, avec un livre au titre on ne peut plus explicite L’AmitiĂ© selon PrĂ©vert Textuel, 2012, rééd. 2016. L’amitiĂ© se noue, ou ne se noue pas d’ailleurs, en un clin d’Ɠil pour PrĂ©vert. Avec lui, l’amitiĂ© naĂźt d’un coup de cƓur, de maniĂšre instinctive, quasiment viscĂ©rale. Et quand PrĂ©vert choisit quelqu’un comme copain, il lui est fidĂšle toute sa vie. Ainsi bon nombre de ses rencontres de jeunesse sont restĂ©es Ă  ses cĂŽtĂ©s pour la vie. Vous citez Ă  juste titre les formidables comĂ©diens Maurice Baquet et Raymond BussiĂšre, rencontrĂ©s avec le groupe Octobre, et Marcel Duhamel dont PrĂ©vert fait la connaissance durant son service militaire. Ils ne se quitteront jamais, jusqu’à la fin. L’une des spĂ©cificitĂ©s de l’amitiĂ© prĂ©vertienne est qu’elle n’est pas exclusive, et qu’elle est mĂȘme en quelque sorte contagieuse, si bien qu’existe cette fameuse bande Ă  PrĂ©vert » dont nous avons dĂ©jĂ  parlĂ©. De plus, l’amitiĂ© prĂ©vertienne est fructueuse au niveau artistique car les amis se retrouvent souvent dans la crĂ©ation pour des films ou des livres par exemple. Citez tous les copains de PrĂ©vert est impossible, mais dans le cadre de L’AmitiĂ© selon PrĂ©vert, j’ai fait le rude choix d’en sĂ©lectionner quinze et de les Ă©clairer Arletty, Maurice Baquet, RenĂ© BertelĂ©, Pierre Brasseur, Henri Crolla, Robert Doisneau, Marcel Duhamel, Jean Gabin, Paul Grimault, Joan MirĂł, Marcel Mouloudji, Pablo Picasso, Simone Signoret et Yves Montand, Alexandre Trauner, Boris Vian
 sans oublier le frĂšre-ami, Pierre PrĂ©vert. Jacques PrĂ©vert Ă©tait semble-t-il un homme aussi libre que libertaire, autodidacte refusant les cloisons artistiques. Y a-t-il des enfants de PrĂ©vert ? Quelle serait l’influence de PrĂ©vert ? On a pu entendre un Serge Gainsbourg se revendiquer dans une chanson de PrĂ©vert, mais aujourd’hui ? La question est difficile
 D’une part il faudrait ĂȘtre constamment Ă  l’écoute de ces tĂ©moignages d’appartenance. Et d’autre part, les artistes influencĂ©s par Jacques PrĂ©vert ne le revendiquent pas toujours ostensiblement
 Il y a pourtant un hĂ©ritage, sans doute d’autant plus important qu’il est diffus, dans l’air, qu’il fait partie de l’inconscient collectif. LibertĂ©, refus des courbettes, attention aux petites gens, tendresse, sincĂ©ritĂ©, solidarité  PrĂ©vert, c’est aussi une maniĂšre d’aborder la vie et les ĂȘtres. Les enfants de PrĂ©vert sont dispersĂ©s un peu partout. À l’étranger Ă©galement. J’ai encore reçu rĂ©cemment des demandes d’inscription en thĂšse de doctorat d’étudiants chinois, maghrĂ©bin et brĂ©silien, qui souhaitent le mettre en regard avec d’autres poĂštes de leurs pays respectifs. Sans que nous en mesurions parfois vraiment l’ampleur, PrĂ©vert a considĂ©rablement oxygĂ©nĂ© notre vie. Et il a considĂ©rablement contribuĂ© Ă  oxygĂ©ner la mienne ! Je continuerai bien entendu Ă  vivre avec PrĂ©vert et Ă  partager ma passion avec le plus grand nombre mais j’arrĂȘterai fin 2017 de consacrer mes recherches Ă  son Ɠuvre et Ă  sa vie. De nouveaux champs de recherche inexplorĂ©s et passionnants s’offrent Ă  moi, les sollicitations d’ayants-droit et les projets s’accumulent, ma vie de chercheuse se poursuit avec de nouvelles aventures, avec le cinĂ©ma des poĂštes, avec le cinĂ©ma invisible, avec le cinĂ©ma de papier, avec le cinĂ©ma en France de 1908 Ă  1919, avec d’autres magnifiques poĂštes comme Robert Desnos, avec
 J’ai Ă©tĂ© trĂšs heureuse de travailler si longtemps et intensĂ©ment sur PrĂ©vert, et je suis dĂ©sormais trĂšs heureuse lui dire au-revoir sereinement pour voler vers d’autres contrĂ©es poĂ©tiques et cinĂ©matographiques si accueillantes et roboratives.
Ă  Carl Orff, Ă  sa musique – Jacques RĂȘve-vert qui regrette bien de ne pouvoir venir Ă  Stuttgart Paris dĂ©cembre 1959 4 » (Spectacle) «Les Imaginicus magicus de Jacques PrĂ©vert, pour Carl Orff, Jacques PrĂ©vert automne 1963» (Les images de Jacques PrĂ©vert) “A Carl ORFF, Ă  Carmina Burana” aoĂ»t 1969 (La pluie et le beau temps)
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laissetoi imprĂ©gner par sa douceur, par le moment qui passe, par l'air que tu respires, par la chaleur du soleil. Touche une main, elle te raconte une histoire, Touche un pied, et sens le chemin parcouru, Touche une jambe, un corps et permets lui de te CĂ©lĂšbre par quelques chansons, Jacques PrĂ©vert est poĂšte, homme de théùtre et de cinĂ©ma, plasticien. Son imagination pourrait se rĂ©sumer par l’esprit de l’enfance ». NĂ© en 1900 Ă  Neuilly-sur-Seine, Jacques PrĂ©vert est le deuxiĂšme d’une fratrie de trois garçons. Il passe toute son enfance Ă  Paris, hormis un sĂ©jour de quelques mois Ă  Toulon, oĂč son pĂšre, AndrĂ©, espĂ©rait trouver du travail. La plupart des adresses familiales sont situĂ©es dans le 6e arrondissement, qui, Ă  l’époque, ne s’est pas encore gentrifiĂ©. Le pĂšre est employĂ© dans les assurances, mais sans enthousiasme ; c’est un amoureux du théùtre, il s’adonne Ă  la critique et conduit volontiers son fils dans les salles de spectacle. La mĂšre, Suzanne, donne Ă  Jacques le goĂ»t de la lecture et des livres ; l’enfant se passionne pour les Mille et Une Nuits et les aventures de Sherlock Holmes, et Ă©prouve une vraie fascination pour les illustrations de la presse Ă  sensation. En revanche, il manifeste assez vite une aversion pour l’école et pour le catĂ©chisme. Il aura toujours Ă  cƓur de conserver les qualitĂ©s qu’il attribue Ă  l’enfance simplicitĂ©, fantaisie et souci de ne pas ĂȘtre raisonnable » – ce qu’il rĂ©sume par un adage personnel PassĂ© 7 ans, on est un vieux con. »Jacques PrĂ©vert Ă  Paris dans les annĂ©es 1960. OZKOK/SIPA. À l’école du surrĂ©alisme AprĂšs avoir quittĂ© l’école Ă  14 ans, muni de son certificat d’études, PrĂ©vert exerce divers petits mĂ©tiers, notamment celui d’employĂ© dans un bazar de la rue de Rennes. Le service militaire mars 1920-mars 1922, qu’il effectue en grande partie Ă  Istanbul, est l’occasion de nouer deux grandes amitiĂ©s, avec le futur peintre Yves Tanguy et le futur Ă©diteur Marcel Duhamel qui sera le crĂ©ateur, en 1945, de la collection SĂ©rie noire » chez Gallimard. En 1924, les trois compĂšres s’installent au 54, rue du ChĂąteau, prĂšs de la gare Montparnasse, dans l’ancienne boutique d’un marchand de peaux de lapin. Adresse historique ! Elle va rapidement devenir un des hauts lieux du surrĂ©alisme, mouvement esthĂ©tique radical de l’immĂ©diat aprĂšs-guerre. En 1925, PrĂ©vert et Tanguy s’enthousiasment pour la virulence de La RĂ©volution surrĂ©aliste, revue qui paraĂźt de 1924 Ă  1929. PrĂ©vert, qui prend son temps pour entrer en littĂ©rature », se forme au contact de l’avant-garde artistique qui se retrouve, dans le quartier de Montparnasse, au cafĂ© Cyrano ou rue du ChĂąteau, et qui rassemble des personnalitĂ©s fortes et originales comme Robert Desnos, Louis Aragon, Raymond Queneau, Benjamin PĂ©ret, Antonin Artaud, Michel Leiris, sous la houlette intransigeante d’AndrĂ© Breton. Les surrĂ©alistes organisent des scandales ainsi, en janvier 1928, PrĂ©vert monte sur la scĂšne du théùtre du Vieux-Colombier pour gifler l’acteur qui dit des textes de Jean Cocteau. Ils se livrent aussi Ă  des expĂ©riences de crĂ©ation collective comme celle du cadavre exquis », qui consiste Ă  complĂ©ter de façon alĂ©atoire un mot proposĂ© comme point de dĂ©part ; la premiĂšre de ces expĂ©riences d’écriture donnera la phrase Le cadavre exquis boira le vin nouveau », d’oĂč le titre choisi par la suite pour ce type de jeu. Pour PrĂ©vert, c’est une pĂ©riode intense d’apprentissage de l’expression libre. En 1930, lassĂ©s de l’autoritarisme de Breton, lui et quelques-uns de ses camarades prennent leurs distances avec le mouvement surrĂ©aliste. Mais l’impertinence et le non-conformisme de ce courant novateur marquent d’une empreinte dĂ©finitive la maniĂšre qu’a l’artiste de crĂ©er, de vivre et de se faire sa place dans la théùtre au service du peuple En 1932, un groupe de la FĂ©dĂ©ration du théùtre ouvrier de France, en quĂȘte d’auteur, contacte PrĂ©vert, qui propose un texte, Vive la presse, dĂ©nonçant la malhonnĂȘtetĂ© des journaux au service des puissances d’argent. La piĂšce est reprĂ©sentĂ©e en mai. DĂšs lors, PrĂ©vert se lance dans une forme de lutte politique qui passe par le travail artistique. Il Ă©crit rapidement et sur mesure, fournissant au groupe – qui prend le nom d’Octobre, en hommage Ă  la rĂ©volution bolchevique de 1917 voir p. 134 – des piĂšces de théùtre et des chƓurs parlĂ©s qui prennent la dĂ©fense des plus faibles dans la sociĂ©tĂ© et sont en prise directe avec l’actualitĂ© nationale ou internationale des textes comme La Bataille de Fontenoy, FantĂŽmes, La Famille Tuyau de poĂȘle 1933, Le Palais des mirages 1934, d’aprĂšs Don Quichotte de CervantĂšs ou Suivez le druide 1935 dĂ©noncent la guerre, les industriels avides, les politiciens cyniques, tournent en dĂ©rision la famille et l’ordre bourgeois. Ils sont jouĂ©s en plein air, lors de meetings, dans des usines en grĂšve
 En 1933, le groupe théùtral voyage en URSS pour se produire dans le cadre de l’Olympiade du théùtre ouvrier de Moscou. Mais, au retour, PrĂ©vert refuse de signer l’éloge pour la politique de Staline que des officiels soviĂ©tiques lui Ă©crit des piĂšces de théùtre qui prennent la dĂ©fense des plus faibles dans la sociĂ©tĂ©, en prise directe avec l'actualitĂ© nationale ou internationale. En 1936, l’annĂ©e du Front populaire, Octobre se disloque pour des raisons politiques et financiĂšres. Un ultime projet, Bonne nuit, capitaine, n’est donc pas reprĂ©sentĂ©. Quelles que soient les diffĂ©rences politiques entre PrĂ©vert, plutĂŽt libertaire et anarchiste, et les membres du groupe, communistes pour la plupart, les cibles visĂ©es par ces textes dramatiques d’agit-prop théùtre d’agitation-propagande sont les mĂȘmes que celles Ă©pinglĂ©es dans nombre de poĂšmes de PrĂ©vert. Par ailleurs, l’esprit des textes imaginĂ©s pour Octobre soufflera trĂšs largement dans Spectacle, publiĂ© en talent aux multiples facettes Photomontage par RenĂ© Magritte, paru dans la revue La RĂ©volution surrĂ©aliste de dĂ©cembre 1929, avec les grands reprĂ©sentants du courant artistique surrĂ©aliste. SIPA Les premiers poĂšmes datent des annĂ©es 19 .
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  • texte de jacques prĂ©vert sur le temps qui passe